Retrouver le portrait du docteur Sheng Zhong Wang, spécialiste en médecine traditionnelle chinoise, issu de nos archives. A Chiang Mai, il est une pharmacie connue de tous pour son étonnante diversité de plantes et la maîtrise parfaite dans ce domaine du docteur Sheng Zhong Wang.
Assis derrière un minuscule bureau, au centre de la boutique, presque de manière anonyme, le docteur Sheng Zhong Wang est pourtant le maître des lieux et la référence pour les dizaines d’individus qui passent quotidiennement dans sa pharmacie du quartier chinois Warorot. On y vient pour une consultation et pour acheter toutes sortes de décoctions destinées à soulager les petits bobos, les allergies, les excès de fatigue, de stress ou de poids. Nul besoin d’enseigne aguicheuse, les lieux parlent d’eux- même : un mur entier de tiroirs sur lesquels sont inscrits des noms barbares pour le néophyte, des bocaux alignés et des sachets regorgeant d’un contenu insignifiant pour celui qui ignore tout de la puissance des plantes.
Des préparations sur-mesure
Le docteur Sheng Zhong Wang est né en Chine, il y a 53 ans. A l’issue de ses études de médecine, il débute sa carrière à l’hôpital public. En 1989, il décide de venir s’installer en Thaïlande. Il estime alors que les conditions sont meilleures pour s’occuper de sa famille et voir grandir ses enfants. L’autre argument qui l’incite à s’expatrier c’est la présence de son oncle qui, 20 ans plus tôt, a ouvert cette pharmacie au cœur du marché chinois. Bien que spécialisé en médecine douce, l’endroit propose aussi des produits de médecine allopathique. Une échoppe réputée auprès de la population locale et des résidents étrangers. La raison est facile à comprendre : se soigner avec les plantes c’est-à-dire de manière naturelle est devenu un art de vivre très courtisé. Voilà pourquoi les deux préparateurs attachés à son service sont actifs et concentrés, dès très tôt le matin.
Debout, face à un comptoir qui traverse la pharmacie de part en part, ils amoncellent consciencieusement, sur des pages de papier blanc, de petits tas de feuilles, d’herbes, d’écorces d’arbres, de copeaux de bois, de brindilles, de pétales de fleurs et de plantes. Pour le visiteur, ces mélanges sont peu évocateurs, sinon la vision d’un après désherbage, où le jardinier négligeant aurait oublié de tout nettoyer. Plusieurs balances en inox et de nombreux poids démontrent la précision requise pour concocter ces petits monticules, en apparence tellement anodins.
A la chaîne, le préparateur en chef va successivement se servir dans les tiroirs, farfouiller dans d’immenses sacs de papier kraft ou bien encore plonger sa main dans un des nombreux bocaux et peser chaque poignée avant de la déverser sur les petits monticules. Une alchimie calculée et rigoureuse. Selon les besoins, certains ne contiendront que quelques dizaines de grammes, d’autres seront beaucoup plus volumineux. Lorsque la préparation est complète, vient l’étape du pliage. Des automatismes acquis au fils des années permettent en quelques gestes de faire disparaître le tout, sans laisser la moindre ouverture par où pourrait s’échapper quelques « miettes ». Or, il s’agit là de produits précieux car toutes ces plantes sont expédiées de Chine. Les commandes sont passées de manière hebdomadaire auprès de fournisseurs qui ont toute la confiance de Sheng Zhong Wang.
Parler avant de guérir
Pour accéder à son cabinet, il faut emprunter un couloir étroit, à l’arrière de la pharmacie. C’est ici, modestement que le docteur Sheng Zhong Wang reçoit ses patients. En fait, l’essentiel de sa consultation consiste à écouter son vis-à-vis et à lui poser des questions. Souvent les gens viennent pour se confier, exposer les raisons de leur déprime ou les causes de leur stress. Certains font cette démarche car ils n’ont pas trouvé de réponse auprès d’institutions classiques comme l’hôpital. « J’ai des patients qui ressentent des douleurs au cerveau. Ils ont fait un IRM, suivi des traitements sans résultat. Alors ils viennent ici chercher une réponse. Et les plantes contiennent mille et une substances au moins pour soulager sinon guérir. » Cet homme timide a la réputation d’être un fameux docteur avec des diagnostics pertinents, au prix modeste de 100 bahts la consultation. Et quand ses plantes sont inefficaces, il n’hésite pas à avoir recours à une médecine plus moderne ou encore l’acupuncture, mais jamais pour les enfants. Il a un autre cabinet, à quelques kilomètres de la pharmacie où il fait ses séances tous les jours de 14h à 16h30. Un art qu’il a également appris en Chine. Il boucle ses journées à l’espace Tao Garden Health Spa and ressort, où il reçoit un autre type de clientèle, en quête elle aussi d’un ressourcement par les plantes.
Marie-France Grugeaux-Etna