Dans la plupart des pays d’Asie, la pandémie a mis en lumière des systèmes de protection et d’aide aux victimes de la violence sexiste insuffisants. La Covid-19 n’a fait qu’exposer ces lacunes et vulnérabilités existantes dans toute la région. Les membres du Groupe de travail sur les femmes et la torture, une initiative régionale conjointe de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) et de l’Alliance des défenseurs des droits de l’homme des Philippines (PAHRA), expriment leur inquiétude quant à l’impact disproportionné de Covid-19 sur les femmes.
Dans de nombreux pays d’Asie, les familles partagent des espaces limités et les maisons sont devenues des espaces particulièrement surpeuplés qui exacerbent les risques de violence domestique accrue. Au Bangladesh, une enquête téléphonique menée par des organisations de la société civile en avril a révélé qu’au moins 1672 femmes ont connu leurs premiers incidents de violence domestique pendant le confinement.
Les services judiciaires, de police et de santé, qui n’apportent souvent qu’une aide limitée aux victimes de violence sexiste, même dans des circonstances normales, ont désormais changé de priorités à la suite de la pandémie ou se trouvent dans l’incapacité d’apporter leur aide. Dans plusieurs pays, tels que le Sri Lanka et le Népal, la police a refusé à plusieurs reprises d’enregistrer les plaintes pour violence domestique.
Pas d’aide possible
Le Népal est également l’un des nombreux pays asiatiques où le nombre de cas de violence domestique signalés en situation de confinement est moins élevé. Plutôt qu’une diminution réelle de la commission de violence, cela reflète l’incapacité des femmes à accéder à de l’aide et à signaler les incidents dans le cadre de mesures de confinement sans distinction de sexe. Les agresseurs exploitent l’incapacité des femmes à s’échapper ou à obtenir de l’aide, et les acteurs de la société civile ne peuvent plus accéder aux victimes. Cela crée des défis importants dans la collecte de données précises.
Détresse aux Philippines
Dans la plupart des pays, la pandémie met en lumière des systèmes de protection et d’aide aux victimes de la violence sexiste déjà insuffisants. La Covid-19 n’a fait qu’exposer ces lacunes et vulnérabilités existantes dans toute la région. Aux Philippines, par exemple, il n’existe pas de ligne téléphonique nationale qui s’occupe spécifiquement des femmes victimes de violence domestique. L’augmentation spectaculaire de la violence contre les femmes est souvent liée à l’incapacité des institutions nationales à traiter ce problème de manière adéquate. Dans la plupart des pays, les femmes sont déjà souvent réticentes à dénoncer la torture et d’autres formes de violence, y compris la violence domestique, et s’abstiennent de demander justice.
À la lumière de ce qui précède, les membres du groupe de travail sur les femmes et la torture appellent les gouvernements d’Asie à:
– Concevoir et mettre en œuvre une réponse à la pandémie qui tienne compte de la dimension de genre et garantir le droit des femmes à vivre à l’abri de la torture et d’autres mauvais traitements. La pandémie exige des autorités nationales qu’elles reconnaissent l’impact différencié de Covid-19 sur les femmes et qu’elles mettent en œuvre des mesures rigoureuses pour répondre à l’augmentation de la violence sexiste.
– Donner la priorité et intégrer des mesures de soutien aux femmes victimes de violence dans les plans nationaux de réponse à la Covid-19. Les mesures comprennent, sans s’y limiter, les éléments suivants
o Veiller à ce que tous les services d’assistance aux femmes victimes de violence fondée sur le sexe soient considérés comme des services essentiels pendant la pandémie, et restent donc accessibles ;
o combler les lacunes préexistantes dans les cadres d’intervention contre la violence fondée sur le sexe en développant tous les services nécessaires pour assurer la protection des femmes ;
o Garantir que les centres d’accueil restent ouverts et reçoivent les ressources nécessaires pour s’adapter aux besoins de quarantaine ;
o en désignant des espaces sûrs pour que les femmes puissent signaler les incidents de violence, par exemple dans les pharmacies, et en veillant à ce que les employés de ces espaces sûrs disposent d’un protocole clair à suivre dans ces situations ;
o Adapter les services à la situation de pandémie, par exemple en déplaçant l’assistance en ligne ;
o renforcer les campagnes de sensibilisation et de communication sur la violence sexiste, y compris celles qui visent les hommes. Par exemple, le hashtag #AntiDomesticViolenceDuringEpidemic s’est révélé utile en Chine.
– Garantir l’accès des femmes à la justice dans le contexte de la pandémie, par des mesures qui tiennent compte des défis actuels ainsi que des restrictions de voyage.
-Garantir la libération immédiate des militantes des droits de l’homme et des prisonniers politiques, et veiller à ce qu’elles ne soient pas soumises à la torture et à d’autres mauvais traitements pendant leur détention.
– Garantir que les femmes prennent une part active et significative dans les processus de prise de décision liés à la pandémie et à ses conséquences.
En période d’urgence, la violence à l’égard des femmes augmente. La pandémie de grippe 19 n’est pas différente. Les dirigeants politiques en Asie ont maintenant l’occasion de démontrer que ce cycle peut être brisé. Nous appelons les gouvernements à respecter les normes internationales et à veiller à ce que les femmes vivent sans torture ni autres mauvais traitements, y compris la violence sexiste.