Ce dimanche 18 août a marqué le deuxième anniversaire du début des opérations militaires lancées par l’État Birman dans l’État d’Arakan, qui ont contraint plus de 740 000 femmes, hommes et enfants rohingyas à fuir leurs maisons et leurs villages. La campagne brutale a été marquée par des atrocités généralisées, qu’une équipe d’enquête de l’ONU a qualifiées de «crimes contre l’humanité et de génocide présumé». Amnesty International redonne de la voix à cette occasion pour réclamer le transfert des généraux birmans responsables devant la Cour Pénale Internationale.
«La récente proposition du Bangladesh et du Myanmar de rapatrier des milliers de Rohingya a suscité une peur généralisée dans les camps de réfugiés. Les souvenirs de meurtres, de viols et de villages incendiés sont encore présents dans l’esprit des réfugiés rohingyas. Les forces armées de Birmanie étant aussi puissantes et impitoyables que jamais, il est toujours dangereux de revenir dans l’Arakan», explique Nicholas Bequelin, directeur régional d’Amnesty International pour l’Asie de l’Est et du sud-est.
«Ce triste anniversaire est un rappel fort de l’échec du Conseil de sécurité des Nations unies à approuver les survivants et à traduire les auteurs d’atrocités de masse en justice. Le Conseil de sécurité doit soumettre de toute urgence la situation au Myanmar à la Cour pénale internationale et imposer un embargo complet sur les armes. »
Un cauchemar des deux côtés de la frontière
Les Rohingyas continuent de se voir dénier leurs droits des deux côtés de la frontière entre la Birmanie et le Bangladesh. En Birmanie, des centaines de milliers de Rohingyas vivent dans un système d’apartheid, confinés dans des camps surpeuplés et dans des villages de «prisons», où ils sont privés de la liberté de circulation et ont un accès très limité aux écoles et aux soins de santé.
L’armée contrôle étroitement l’accès à l’État d’Arakan, ce qui signifie qu’il sera extrêmement difficile de contrôler au niveau international tous ceux qui rentrent chez eux. Rakhine, isolant encore plus ces zones.
Selon la mission d’enquête des Nations unies, l’administration de l’état d’arakan a couvert la mort de 10 000 femmes, hommes et enfants rohingyas fin 2017, et contraint plus de 740 000 personnes à fuir de l’autre côté de la frontière, au Bangladesh, où ils restent aujourd’hui. Dans un rapport publié en juin 2018, Amnesty International exigeait que 13 responsables des forces de sécurité – le général en chef Min Aung Hlaing – fassent l’objet d’une enquête et de poursuites en justice pour crimes contre l’humanité.
Des massacres documentés
En mai 2019, Amnesty International a documenté la manière dont l’armée birmane a lancé de nouvelles opérations dans l’État d’Arakan, notamment les attaques coordonnées menées par l’armée d’Arakan contre des postes de police. La riposte militaire comprend des attaques illégales faisant des morts ou des blessés, des exécutions extrajudiciaires, des arrestations arbitraires, des actes de torture et autres mauvais traitements et des disparitions forcées. Un grand nombre de ces violations constituent des crimes.
Au Bangladesh, plus de 910 000 Rohingyas, y compris des personnes ayant vécu les précédentes vagues de violence, vivent dans des camps de réfugiés où ils se voient souvent refuser les droits fondamentaux. Le gouvernement bangladais ne peut pas se déplacer librement et les enfants ne peuvent pas aller à l’école.
Accord de rapatriement
Depuis la signature d’un accord de rapatriement en novembre 2017, les gouvernements du Bangladesh et de Birmanie ont accueilli des réfugiés Rohingya au Myanmar. En novembre 2018, les plans de rapatriement ont été annulés à la suite du tollé international suscité par la fuite des consultations avec les Rohingya et par l’incapacité de la Birmanie à créer un environnement propice à un retour sûr.
Le 15 août, le plan de rapatriement indiquait qu’ils figuraient sur une liste de 3 540 réfugiés rohingya à renvoyer. «Pour les Rohingyas, l’Etat d’Arakan n’est rien d’autre qu’une prison à ciel ouvert. Les autorités du Myanmar n’ont pratiquement rien fait pour remédier à la situation et continuent de commettre des crimes contre l’humanité» accuse Amnesty International.