Les juges de la Cour pénale Internationale viennent d’autoriser, jeudi 14 novembre, l’ouverture d’une enquête sur la situation au Bangladesh et en Birmanie au sujet des massacres commis contre les Rohingyas. La Chambre préliminaire III de la Cour pénale internationale (« CPI » ou « la Cour ») a autorisé le procureur à procéder à une enquête sur de possibles crimes contre l’humanité qui auraient été commis dans la situation en République populaire du Bangladesh / République de l’Union du Myanmar (« la situation au Bangladesh/Myanmar »).
Nous reproduisons ici le communiqué de la Cour pénale Internationale
Cette autorisation fait suite à la demande présentée le 4 juillet 2019 par le Procureur d’ouvrir une enquête concernant des crimes relevant de la compétence de la CPI qui auraient été commis contre le peuple rohingya du Myanmar.
La Chambre a également reçu les vues de centaines de milliers de victimes présumées, ou en leur nom, à ce sujet. Selon le Greffe de la CPI, les victimes insistent à l’unanimité pour demander une enquête de la Cour et bon nombre des victimes présumées consultées « croient que seules la justice et la responsabilité peuvent garantir la fin du cercle perçu de violence et d’abus ». La Chambre a reconnu toutes les personnes et organisations qui ont aidé, guidé et conseillé les victimes présumées tout au long de ce processus.
Compétence de la CPI
La Chambre a conclu que la Cour pouvait exercer sa compétence concernant des crimes lorsqu’une partie des comportements criminels seraient commis sur le territoire d’un État partie. Bien que le Myanmar ne soit pas un État partie, le Bangladesh a ratifié le Statut de Rome de la CPI en 2010. Après avoir examiné les informations disponibles, la Chambre a accepté qu’il existait une base raisonnable de croire que des actes de violence généralisés et / ou systématiques pourraient être qualifiés de crimes contre l’humanité de déportation à la frontière entre le Myanmar et le Bangladesh et de persécution pour des motifs d’ordre ethnique et / ou religieux contre la population Rohingya. La Chambre a estimé ne pas avoir besoin de déterminer si d’autres crimes relevant de la compétence de la Cour avaient pu être commis, bien que ces crimes présumés puissent faire partie de la future enquête du Procureur.
Notant l’ampleur des crimes allégués et le nombre de victimes présumées, la Chambre a estimé que la situation atteignait clairement le seuil de gravité nécessaire pour l’ouverture d’une enquête de la Cour. Selon les documents fournis, entre 600 000 et un million de Rohingyas auraient été déplacés de force du Myanmar vers le Bangladesh voisin à la suite d’actes de coercition allégués. Notant le point de vue des victimes, la Chambre était d’accord avec le Procureur qu’il n’existait aucune raison sérieuse de croire qu’une enquête sur la situation ne serait pas dans l’intérêt de la justice.
Prochaine étape
En conséquence, la Chambre préliminaire III a autorisé l’ouverture de l’enquête pour tout crime, y compris les crimes futurs, tant que : a) il relève de la compétence de la Cour ; b) il serait commis au moins en partie sur le territoire du Bangladesh ou le territoire de tout autre État partie ou État acceptant la compétence de la CPI ; c) il est suffisamment lié à cette situation ; et d) il aurait été commis après la date de l’entrée en vigueur du Statut de Rome pour le Bangladesh ou un autre État partie concerné.
Prochaines étapes : Le Bureau du Procureur recueillera les éléments de preuve nécessaires auprès de diverses sources fiables, de façon indépendante, impartiale et objective. L’enquête pourra durer aussi longtemps que nécessaire pour obtenir ces preuves. Si elle recueillait des preuves suffisantes pour établir que certaines personnes en particulier ont engagé leur responsabilité pénale, le Procureur demanderait aux juges de la Chambre préliminaire III de délivrer à leur encontre soit des citations à comparaître soit des mandats d’arrêt. La responsabilité de faire exécuter les mandats d’arrêt délivrés par une Chambre de la CPI incombe aux États. Les États parties au Statut de Rome ont l’obligation juridique de coopérer pleinement avec la CPI. D’autres États peuvent être invités à coopérer avec la CPI et peuvent décider de le faire de façon volontaire.