Chanteur du groupe Shining Star, Christophe Deschamps, Chris de son nom d’artiste, commence à imposer sa patte vocale dans le paysage musical du royaume. Rencontre.
Avec son faciès d’enfant de choeur, son tee-shirt estampillé Le Monde et son foulard autour du cou, tout y est pour le faire passer pour un sage petit étudiant. Mais non. Au banc de Sciences Po lui a préféré les micros. « Apres le bac, je ne savais pas trop quoi faire. Aucune filière d’études ne me branchait vraiment, alors j’ai décidé de me lancer dans la musique, seule chose que j’aimais faire par plaisir », raconte Chris. Il démarre tout seul et tente de démarcher les labels avec sa petite guitare sous le bras. Mais, très vite, il rencontre Guang, le guitariste de son groupe actuel. « Nous avons alors entendu dire que l’Alliance française de Bangkok organisait un concours de musique française en préparation du festival La Fête. Nous avons remporté le premier prix », se souvient-il. Grisés par ce premier succès, les deux jeunes hommes enchaînent les rendez-vous au sein des maisons de disques du pays. Mais ils essuient refus sur refus. « On nous expliquait que notre musique ne collait pas aux attentes du marché », justifie Chris. Face aux tubes pop, le bien plus confidentiel R’n’B tendance Motown ne garantit pas autant de recettes.
Vaincre le dictat de la pop
« Ici, en Thaïlande, trois grands labels ont la main mise sur l’industrie du disque et reproduisent à l’infini les formules qui marchent, sans prendre de risques. En plus, à l’époque, je ne chantais pas très bien en thaï. Par le passé, dans les écoles internationales, on ne nous enseignait pas la langue, ce qui nous a handicapés au départ », estime le chanteur. Ce Shinnig Star a dû attendre neuf ans avant de voir son premier single, Five years, apparaître dans les bacs. « Et nous avons pour cela dû faire beaucoup de compromis musicaux », dit-il. Le contenu de ce premier single a ainsi nécessité une multitude « d’adaptations et de compromissions ». Mais cette carte de visite a fini par leur ouvrir de nombreuses portes. Le 11 mars dernier, le groupe a même donné un concert dans l’enceinte du musée du quai Branly à Paris, devant un parterre d’institutionnels endimanchés. « Mon but est de faire évoluer le paysage musical du pays, quitte à faire quelques concessions au départ. Mais je sais qu’il faudra du temps pour que le royaume s’ouvre à des courants plus variés », pense ce passionné. Pour cela, tous les moyens sont bons : cours de chant, enregistrement d’un disque en français pour l’anniversaire du roi, concerts, plan presse. Chris et son groupe font tout pour mettre un stop au dictat de la pop. Avec pour référence la Motown ou encore Mickaël Jackson.
Une vraie « patte »
Produit par Boyd Kosiyabong, un chanteur thaïlandais devenu producteur dans le même but que ses protégés, le groupe commence peu à peu à imposer sa patte. « Nous aimerions pouvoir revenir à l’originalité des chanteurs thaïlandais des années 80. Leurs chansons étaient simples mais très modernes pour l’époque. En les écoutant aujourd’hui, elles n’ont pas vieilli », pense Chris. « Notre objectif est de raconter des histoires du quotidien, mais de façon toujours positive. En gros, apprendre à passer à travers les gouttes de la vie en combattant les intempéries », explique Meng, le bassiste. « Je pense aussi que la voix et le style de Chris sont un vrai plus pour nous. Sa façon d’écrire les textes des chansons est totalement unique et inédite, que ce soit en anglais ou en thaï », décrit Guang. Chris, lui, n’a aucun complexe pour revendiquer son amour inconditionnel pour Jamiroquai, « un artiste Old School mais moderne à la fois, qui sait faire passer des messages tant positifs que politiques dans ses chansons », dit-il. Des messages que Shining Stars compte bien lui aussi véhiculer.