L’ancien Premier ministre malaisien Najib Razak a été déclaré coupable de corruption et d’abus de pouvoir ce mardi 28 juillet par le tribunal de Kuala Lumpur. Condamné à douze ans de prison, il va interjeter appel. Il n’ira pas en prison de sitôt et reste une puissance politique. Mais la lecture de son jugement montre l’ampleur des détournements de fonds commis durant son mandat.
L‘ancien Premier ministre malaisien Najib Razak a été reconnu mardi 28 juillet coupable de sept chefs d’accusation d’abus de pouvoir et de blanchiment d’argent dans le pire scandale de l’histoire du pays: la perte de 4,6 milliards de dollars US à cause du vol et de la mauvaise gestion du fonds d’investissement 1Malaysia Development Bhd. soutenu par l’État.
Empêcher l’ancien Premier ministre de se représenter
Le principal effet immédiat sera d’empêcher l’ancien Premier ministre de se faire enregistrer comme candidat aux élections éclair qui pourraient être organisées avant la date de 2023 à laquelle le parlement doit être dissous. Bien qu’il conserve son siège au Parlement, sa condamnation le rend incapable de se représenter et contrecarre son ambition de reprendre la présidence de l’Organisation nationale des Malais unis (UMNO), l’ancien parti au pouvoir.
Il reste néanmoins libre, puis qu’il a interjeté appel.
Compte tenu des vastes ressources qu’il a mobilisées au cours de ses décennies de leadership au sein de l’UMNO et de son appartenance à l’aristocratie malaise – son père était le deuxième Premier ministre du pays -, le Najib de 67 ans, malgré sa condamnation, restera probablement un faiseur de rois et une force majeure de la politique malaise. Le 4 juin, lui, ses frères et Ahmad Zahid Hamidi, l’actuel chef de l’UMNO, se sont laissé photographier au domicile de Zahid, planifiant ostensiblement un retour politique malgré les accusations.
Une coalition dirigée par l’UMNO
Si des élections rapides devaient ramener au pouvoir une coalition dirigée par l’UMNO, une possibilité bien réelle étant donné le désarroi des forces politiques en compétition, il reste une chance que le vaste éventail de charges retenues contre lui puisse être réduit ou annulé. Jusqu’à présent, son beau-fils, Reza Aziz, a été libéré par le procureur général sans avoir été inculpé pour avoir détourné les fonds de la 1MDB afin de créer une société hollywoodienne qui a produit le célèbre «Wolf of Wall Street» et d’autres films. Un autre allié, l’ancien ministre en chef du Sabah, Musa Aman, a également été libéré sans être inculpé en juin malgré de nombreuses preuves de corruption.
Après 95 jours de témoignages de 76 personnes ( 57 pour l’accusation et 19 pour la défense dans une affaire qui a débuté en avril 2019) le juge de la Haute Cour Mohd Nazlan Mohd Ghazali a déclaré qu’il était tiré par les cheveux de croire que l’ancien Premier ministre avait été escroqué par Low Taek Jho, le flamboyant financier né à Penang qui a eu l’idée de convertir un obscur fonds d’investissement de l’État de Terengganu en un véhicule de 11 milliards de dollars soutenu par le gouvernement qui servirait de tiroir-caisse à Najib et à sa femme, Rosmah Mansor, à Jho Low lui-même, à divers potentats du Moyen-Orient et à d’autres dans ce que le ministère américain de la justice a appelé la plus grosse affaire de kleptocratie jamais portée devant l’agence.
Le juge a également écarté l’argument de Najib selon lequel l’argent qui avait été versé sur ses comptes personnels à AmBank Malaysia lui avait été donné par des princes saoudiens comme rempart contre l’extrémisme islamique, en soulignant assez crûment que Najib n’avait jamais renvoyé de note de remerciement en échange des milliards.
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