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Khao Preah Vihear: un bijou de l’art khmer

Journaliste : Xavier Galland
La source : Gavroche
Date de publication : 16/12/2012
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Les échanges de feu entre soldats cambodgiens et thaïlandais le mois dernier remettent au centre de l’actualité la dispute qui oppose les deux royaumes sur la propriété du site de Khao Phra Viharn. Si l’enjeu est avant tout territorial, l’attraction touristique et les devises qu’elle procure sont aussi au centre des enjeux.

 

Mais quelle est donc l’importance de ce temple inscrit en juillet dernier au patrimoine mondial de l’Unesco ?

 

Perché sur une falaise qui surplombe de quelque 500 mètres la plaine environnante, le temple de Khao Phra Viharn se situe à 110 km de la ville de Si Saket et à 280 km d’Angkor. Officiellement appelé Preah Vihear, le lieu est connu en Thaïlande sous le nom de Prasat Phra Viharn or Prasat Khao Phra Viharn.

 

La falaise sur laquelle se dresse le temple était sacrée depuis des siècles quand débuta la construction de l’édifice actuel, et un premier temple datant du début du IXe siècle le précéda sur cet emplacement. Le sanctuaire que l’on visite aujourd’hui, originellement dédié au dieu hindou Shiva, ne remonte cependant pas plus haut que la période dite de Koh Ker, quand, de 928 à 944, sous les règnes de Jayavarman IV (928-941) et Harshavarman II (941-944), la capitale de l’empire fut déplacée vers le site du même nom. C’est néanmoins sous Rajendravarman II (944-968) que la construction du temple fut véritablement entreprise pour ne s’achever que deux siècles plus tard sous Suryavarman II, le “constructeur” d’Angkor. Une inscription trouvée à Khao Phreah Vihear montre d’ailleurs ce dernier étudiant les rituels sacrés, célébrant des fêtes religieuses et faisant des offrandes de parasols blancs, de bols en or et d’éléphants à son maître spirituel, le brahmane Divakarapandita, qui aurait lui-même offert au temple une statue en or de Shiva Nataraja, ou Seigneur de la Danse.

 

En tant que pièce-clef de la vie spirituelle de l’empire, Khao Phreah Vihear fut l’objet de l’attention de nombreux monarques (une dizaine) – principalement Suryavarman I (1002-1050) et Suryavarman II (1113-1150) – et porte donc les traces de divers styles architecturaux: Koh Ker, Banteay Srei, Khléang, Baphuon.

 

A la différence des temples khmers classiques, de plan rectangulaire et orientés à l’Est, Khao Phreah Vihear, forcé de se conformer à la topographie, suit un axe Nord-Sud et s’étale sur une longueur d’environ 800 m. Le complexe consiste en une chaussée en escaliers s’élevant progressivement vers le sanctuaire situé en haut de la falaise. Le dénivelé entre les deux extrémités du temple est de 120 mètres. Bien que sa structure tranche avec celle traditionnelle des temples d’Angkor, Khao Phrea Vihear constitue lui-aussi une représentation symbolique du Mont Mérou, axe du monde et séjour des dieux.

 

L’ascension vers le lieu de culte est ponctuée de cinq gopuras – un gopura est un pavillon d’entrée dans les enceintes successives des temples, de plan généralement cruciforme et surmonté de une ou trois tours -, auxquels on accède par une volée de marches. Deux tronçons de la chaussée du temple sont flanqués d’une balustrade à tête de Naga et permettent d’accéder respectivement aux premier et quatrième gopuras.

 

Le second gopura possède un remarquable linteau représentant l’amritamanthana, ou “barattage de la mer de lait”, un des mythes fondamentaux de l’hindouisme expliquant comment, au début des temps, les dieux et les démons se sont unis pour extraire le nectar d’immortalité de la mer de lait. Bien moins imposante que la version de la même scène figurant sur les murs du temple d’Angkor, cette représentation est néanmoins une des principales attractions de Khao Phreah Vihear.

 

Ceux qui ont déjà visité les sites thaïlandais de Pimaï et Phanom Rung, magnifiquement restaurés, seront peut-être un peu déçus par l’état dans lequel se trouve Khao Phreah Vihear. Les autorités cambodgiennes envisagent de se pencher sur la question mais privilégient dans un premier temps l’amélioration des voies d’accès côté cambodgien, du moins officiellement.

 

A défaut d’aller sur place, il est possible de faire une visite virtuelle du temple de Khao Phreah Vihear sur le site du Patrimoine mondial de l’Unesco qui propose pas moins de treize “panographies” (ou visualisations à 360°) réparties le long de la chaussée principale du temple, du sanctuaire et des gopuras. En faisant glisser sa souris, on peut virtuellement tourner sur soi-même ainsi que zoomer sur les éléments architecturaux environnants. Une visite qui vaut assurément le cyber-détour.

 

Xavier Galland, auteur du «Que Sais-je? n°1095, Histoire de la Thaïlande», présente chaque mois un personnage ou un site qui a marqué l’histoire de l’ancien royaume de Siam.

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