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PHILIPPINES – SOCIÉTÉ : Aux Philippines, la « guerre contre la drogue » n’a rien résolu

Journaliste : Rédaction
La source : Gavroche
Date de publication : 26/08/2021
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Après la mort de milliers de trafiquants et de consommateurs de drogue réels ou présumés, d’innombrables innocents et de victimes de vendetta, les Philippines ne montrent aucun signe de volonté d’atténuer, sans même parler de mettre fin, à leur problème de drogue.

 

Le site d’information Asia Sentinel, toujours très nourri en analyses pertinentes, vient de publier un excellent point de vue de Philip Bowring.

 

Selon lui, les drogues, principalement la méthamphétamine ou la méthamphétamine en cristaux, restent omniprésentes et l’usage semblent avoir été peu affecté dans l’ensemble, même par la pandémie et ses restrictions de voyage.

 

Ce qui distingue les Philippines de ses voisins, c’est la politique violente de son président Rodrigo Duterte, assisté par une force de police réputée pour ses exécutions extrajudiciaires dans le cadre de “fusillades” fictives avec des trafiquants de drogue présumés.

 

Un taux d’homicide élevé a apparemment favorisé les promotions, tout en étant un outil pratique pour éliminer les ennemis personnels ou les opposants politiques.

 

État de la loi et de l’ordre

 

Tel est l’état de la loi et de l’ordre dans un pays qui porte le christianisme, sous diverses formes, sur sa manche et où Duterte est salué comme un héros par un public qui préfère le plus souvent fermer les yeux sur le massacre.

 

Bien qu’il doive être démis de ses fonctions après six ans de pouvoir, il est suffisamment populaire pour que son parti politique au pouvoir, le PDP-Laban, le soutienne en tant que candidat à la vice-présidence, et qu’il puisse éventuellement se présenter avec sa fille comme présidente, afin de revenir au pouvoir par des moyens détournés.

 

L’évaluation de la consommation et de la disponibilité des drogues illégales n’est pas très précise. Les chiffres publiés récemment ne montrent aucune tendance à la baisse persistante sur la période 2016-2020 et, en effet, en 2020, les saisies de shabu, comme on appelle la méthamphétamine cristalline aux Philippines, ont augmenté par rapport à 2019, même face aux lockdowns.

 

Les données sur les Philippines font partie d’une enquête sur les problèmes de drogue en Asie de l’Est et du Sud-Est intitulée Synthetic Drugs in East and Southeast Asia Latest Developments and Challenges de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime.

 

Difficile de dégager une tendance constante

 

Les saisies de shabu varient d’une année à l’autre, mais il est difficile de dégager une tendance constante. Il en va de même pour le cannabis, la deuxième drogue illégale la plus populaire. On constate toutefois une très forte augmentation des saisies d’ecstasy, tandis que celles de cocaïne, qui est surtout une drogue des classes aisées, varient fortement d’une année à l’autre.

 

Ce qui est encore plus révélateur de l’impact réel de la guerre contre la drogue menée par Duterte sur son propre peuple, c’est l’évolution des prix, qui reflète directement l’équilibre entre l’offre et la demande. Depuis 2016, date du début de la “guerre”, les prix du shabu n’ont que peu fluctué d’année en année et ont légèrement baissé en 2020.

 

Dans le même temps, cependant, on a observé une baisse significative de la pureté, ce qui peut indiquer une certaine augmentation du risque. Les prix de l’ecstasy et de la cocaïne sont assez stables depuis 2017 – il n’existe pas de données pour les années précédentes – tandis que les prix du cannabis ont baissé.

 

Données sur la consommation

 

Ces données sur la consommation indiquent une utilisation globale stable malgré une augmentation du nombre d’arrestations liées à la drogue, qui est passé d’environ 20 000 en 2015 à un pic d’environ 60 000 en 2019 avant de retomber à environ 50 000 en 2020.

 

Le nombre d’arrestations relativise le nombre de décès et suggère que la plupart des personnes arrêtées s’en sortent très bien, ce qui témoigne de la nature arbitraire des exécutions extrajudiciaires. Les autorités semblent surtout considérer la consommation de drogue et même le petit trafic de drogue comme un délit mineur, et non comme un crime majeur, à moins qu’elles ne veuillent abattre quelqu’un.

 

Pendant ce temps, le nombre d’admissions dans les centres de traitement de la toxicomanie et des overdoses a chuté de moitié en 2020, sans doute en réponse aux mesures de confinement. Mais même si elles ont atteint un pic de plus de 6 000 en 2016, les admissions restent faibles par rapport à la consommation, car le shabu n’est pas considéré comme créant une forte dépendance et de nombreux utilisateurs ne sont qu’occasionnels. Certaines des admissions concernent diverses substances synthétiques résumées en tant que nouvelles substances psychoactives, et d’autres plus anciennes comme l’usage non médical de benzodiazépines. La consommation d’opioïdes en vente libre est faible – malgré la croyance selon laquelle Duterte lui-même a été un utilisateur régulier de Fentanyl.

 

Plus généralement, les Nations unies signalent que le trafic de méthamphétamine a chuté au cours du premier semestre de 2020, mais qu’il a ensuite fortement augmenté à mesure que de nouveaux itinéraires étaient découverts. Les prix sont restés stables dans les grands centres de consommation comme la Thaïlande, la Malaisie et le Cambodge, malgré l’augmentation des saisies. Elle constate un lien direct entre le volume des saisies et la demande.

 

Remerciements à Michel Prévot

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