Une cruciale réunion préparatoire de la conférence climatique COP 24 s’ouvre mardi 4 septembre dans la «cité des anges». Des dizaines de diplomates et d’experts spécialisés sur la question du réchauffement climatique se retrouvent à Bangkok. Dans une capitale qui, selon tous les rapports internationaux, s’enfonce irrémédiablement sous le poids des constructions.
Les inondations sont récurrentes à Bangkok, ce n’est pas un scoop. La saison des pluies, très précoce, a d’ailleurs déjà inondé une partie de la Thaïlande. On se souvient aussi, bien sûr, des inondations exceptionnelles d’octobre-novembre 2011. La «cité des anges» n’avait été épargnée que par le sacrifice de la proche province, condamnée à la noyade par les dispositifs de délestage et par l’installation de digues pour protéger les quartiers des affaires. Plus de 20 % de la cité avait néanmoins été inondé. Les quartiers populaires avaient été tout particulièrement touchés
La prochaine fois ? Ce sera pire. Bien pire. Alors que Bangkok s’apprête à accueillir, du 4 au 9 septembre, la réunion préparatoire de la COP-24, – la prochaine conférence de l’ONU sur le climat est programmée pour décembre à Katowice, en Pologne -, tous les indicateurs sont négatifs.
Le poids des gratte-ciels, qui ne cessent de grimper dans la cité en perpétuelle transformation, contribue à son engloutissement progressif. La mégalopole de plus de 10 millions d’habitants est construite 1,5 m au-dessus de la mer, mais elle s’enfonce régulièrement d’un à deux centimètres par an. Bangkok est une « ville obèse sur un squelette d’enfant », pour reprendre l’expression du géologue Thanawat Jarupongsakul.
Montée des eaux
De nombreux canaux qui sillonnaient la Venise de l’Orient, comme on appelait autrefois Bangkok, ont également, en partie, disparu, recouverts par l’important réseau routier, alors qu’ils assuraient un bon système de drainage naturel. Si Bangkok s’enfonce, dans le même temps, le niveau de la mer, monte. Et c’est tout particulièrement vrai pour les eaux du golfe de Thaïlande qui progressent de 4 millimètres par an, plus que la moyenne mondiale. Quant aux kilomètres de littoral qui bordent la capitale du Royaume, ils subissent une importante érosion qui fragilise encore un peu plus Bangkok.
Dans un entretien accordé à l’AFP, Tara Buakamsri, directeur de Greenpeace Thaïlande, évoque « des inondations très importantes dans un futur proche ». Près de 40 % de Bangkok pourraient être inondés d’ici 2030, selon des prévisions de la Banque mondiale, qui classe la mégapole comme l’une des plus menacées d’Asie, avec Djakarta, en Indonésie. « Si rien ne change, dans cinquante ans […] la majorité de Bangkok sera en dessous du niveau de la mer », prédisait, en 2011, Anond Snidvongs, alors expert du changement climatique à l’université Chulalongkorn de Bangkok, dans une interview accordée au quotidien français Le Monde. Cela se vérifie. En 2018, c’est déjà le cas pour une partie de la ville affirme Tara Buakamsri.
Course contre la montre
Certes, ces dernières années, des dispositions ont été prises pour éviter que Bangkok ne « sombre » : mise en place de digues, installation de stations de pompage, restrictions en ce qui concerne le pompage de l’eau des nappes phréatiques, création de tunnels d’évacuation… Mais c’est encore insuffisant estime Tara Buakamsri qui plaide pour une politique claire de gestion des sols dans la ville et, plus concrètement encore, pour la multiplication des espaces verts susceptibles de servir de grosses éponges absorbantes et de drainer les eaux, de manière à protéger certains quartiers. « Mais le prix du terrain, très cher à Bangkok, fait que les intérêts économiques sont prioritaires », conclut-il. Pour combien de temps encore avant de boire la tasse, c’est toute la question…
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Fabrice Barbian
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