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ASIE – CLIMAT : Non au fatalisme asiatique après l’échec de la COP 26 !

Journaliste : Dr Ioan Voicu
La source : Gavroche
Date de publication : 22/11/2021
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Tribune cop 26

 

Gavroche est la plate-forme des points de vue qui dérangent et font bouger les choses ! La preuve : cette prise de position de Ioan Voicu, ancien ambassadeur de Roumanie en Thaïlande et professeur invité à l’université de l’Assomption.

 

Le rendez-vous mondial le plus important de 2021 dans le domaine de la diplomatie multilatérale, organisé sous l’égide de l’ONU, fut sans conteste la Conférence des parties à la Convention des Nations Unies sur le climat (COP 26), qui s’est déroulée à Glasgow en Grande-Bretagne.

 

La période exacte couverte par cet événement était du 31 octobre au 13 novembre 2021. 25 000 délégués de 200 pays ont participé à ce marathon diplomatique et près de 120 chefs d’État ou de gouvernement étaient présents.

 

Base légale

 

La base juridique de la Conférence était l’Accord de Paris de 2015 – un traité multilatéral composé de 29 articles couvrant 26 pages et ratifié par 192 États.

 

La conférence de Glasgow s’est achevée dans la soirée du 13 novembre par l’adoption d’un document final intitulé Glasgow Climate Pact, qui a nécessité des négociations laborieuses et a reçu des amendements jusqu’au dernier moment.

 

Le texte final qui en résulte se compose de 97 articles. Ce document s’appelle Pacte malgré le fait que, contrairement à l’Accord de Paris de 2015, ratifié par les États parties dans le cadre de procédures constitutionnelles nationales et contenant des obligations assumées par 192 États, le document adopté à Glasgow ne contient que des engagements et des recommandations dont la mise en œuvre dépend entièrement de la volonté politique des États.

 

La Conférence de Glasgow ne peut être qualifiée de succès ou d’échec sans une interprétation objective du contenu du Pacte par les experts du changement climatique.

 

Toute  action interprétative doit être guidée par les dispositions de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, même si le texte sujet à interprétation n’est pas un traité au sens de ladite Convention, mais est, en fait, un important instrument international de valeur et portée universelles par ses dispositions.

 

La Convention de Vienne stipule à l’article 31, paragraphe 1 : « Un traité doit être interprété de bonne foi suivant le sens ordinaire à attribuer aux termes du traité dans leur contexte et à la lumière de son objet et de son but. »

 

Espérons que les interprètes compétents de tous les continents se laisseront guider par cette règle, richement détaillée dans la Convention citée.

 

En prévision de cette interprétation, qui demandera du temps et de l’expertise, il convient de noter quelques évaluations préliminaires du Pacte climatique de Glasgow faites en Asie, notamment en ce qui concerne la position des pays membres de l’ASEAN.

 

Nous constatons que les médias asiatiques sont fortement partagés quant à l’appréciation des résultats de la Conférence de Glasgow et du contenu de l’acte final adopté par consensus à la suite d’efforts diplomatiques sérieux pour assurer une conclusion honorable d’une réunion mondiale dans laquelle de grands espoirs étaient déjà placés.

 

Une caractéristique commune des évaluations post-Glasgow exprimées dans les 10 États membres de l’ASEAN est l’équilibre et le réalisme de l’analyse, couplés à une déception naturelle face à l’absence d’un esprit de véritable solidarité dans la négociation du Pacte climatique de Glasgow.

 

Un air de tension

 

En Thaïlande, pour le Bangkok Post, contrairement aux précédentes conférences sur le climat, l’édition de cette année avait un air de tension avec un tiraillement constant entre coopération et concurrence alors que les retombées de Covid-19, la montée du nationalisme et les crises économiques ont érodé la confiance dans la diplomatie internationale.

 

Par le même quotidien, les lecteurs ont été informés que l’engagement du financement climatique a désormais 12 ans. Lors de la COP15 à Copenhague, les économies avancées ont promis de fournir 100 milliards de dollars US par an au monde en développement, et l’Accord de Paris sur le climat de 2015 a clairement indiqué que tous les pays en développement seraient éligibles à un tel financement. Ce montant est considéré comme négligeable par rapport aux besoins des pays en développement, qui se chiffrent en milliers de milliards de dollars.

 

Alors que l’Indonésie, le plus grand pays de l’ASEAN, a déclaré à Glasgow que le changement climatique est une menace majeure pour la prospérité et le développement mondiaux et que la solidarité, le partenariat, la coopération et la collaboration mondiale sont essentiels, le Jakarta Post a écrit que dans plusieurs décennies, lorsque la Terre sera tellement plus chaude qu’aujourd’hui, de nombreuses personnes en Indonésie et dans le monde regarderont en arrière et se demanderont pourquoi les pays n’ont pas réussi à endiguer l’utilisation du charbon, sachant parfaitement que cela accélérerait le réchauffement climatique avec des conséquences désastreuses pour l’environnement.

 

Le même quotidien indonésien a rappelé que l’Inde a mené la campagne à Glasgow pour édulcorer un accord proposé par de nombreux autres pays pour repousser l’échéance de 2030 pour l’élimination progressive du charbon. La plupart des scientifiques s’accordent à dire que c’est ce qui est nécessaire pour freiner l’augmentation de la température mondiale à 1,5 degré Celsius, le niveau maximum tolérable pour éviter une destruction catastrophique de l’environnement.

 

Dans une note critique, on a également été souligné que les pays développés n’avaient pas pris les engagements financiers de 100 milliards de dollars d’ici 2020 nécessaires pour aider les pays en développement à lutter contre le réchauffement climatique. En effet, le passage à zéro émission nette de gaz à effet de serre d’ici 2050 repose sur des financements des pays riches, qui sont en grande partie responsables de l’état actuel de dégradation du climat.

 

Absence de solidarité mondiale

 

Ce constat n’est pas nouveau. Le 20 octobre, Laurence Tubiana, ancienne ambassadrice de France et professeur à Sciences Po, Paris, dans un article intitulé L’esprit de coopération climatique fait face à un test à Glasgow écrivait entre autres : « Fait révélateur, la communauté internationale n’a toujours pas atteint l’objectif de l’accord de Paris de 100 milliards par an pour soutenir les investissements climatiques dans les pays en développement. Ce chiffre est un seuil, pas un objectif final : il est essentiel que nous franchissions cet obstacle pour que toutes les parties à la COP26 sachent que les pays riches sont sérieux et sincères dans leur solidarité ».

 

Malgré les appels forts du Secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres qui a déclaré « Optez pour la solidarité… La solidarité dont vous avez besoin fait défaut. La solidarité doit émerger ici à Glasgow «, la COP 26 reste un exemple éloquent de solidarité insuffisante. Même le Pacte climatique de Glasgow ne mentionne la solidarité qu’une seule fois, et cela uniquement par rapport à la lutte contre le COVID-19.

 

Dans ce contexte, nous ne devons pas oublier que le premier document diplomatique mondial important de ce siècle a été adopté par consensus le 19 février 2000 par la CNUCED sous le titre Déclaration de Bangkok : Dialogue mondial et engagement dynamique. Cette Déclaration dit entre autres : « La solidarité et un sens aigu de responsabilité morale doivent inspirer la politique nationale et internationale. Ce sont non seulement des impératifs éthiques, mais aussi les préalables indispensables à un monde prospère, pacifique et sûr, fondé sur un véritable partenariat ».

 

La validité de cette évaluation est plus visible que jamais.

 

Vers la COP 27

 

À l’heure actuelle, les États devront se pencher sur la  préparation de la COP 27 en Égypte, dans l’attente d’efforts plus sérieux pour pratiquer la solidarité mondiale, tout en faisant face au changement climatique. La tâche est immense. La pratique diplomatique dans les négociations montre que, sur de nombreuses questions, certains pays sont réticents à accepter des engagements obligatoires. Cette tendance pourrait se poursuivre. Pourtant, le changement climatique ne connaît pas de frontières et les efforts pour y faire face peuvent échouer à moins qu’une approche multilatérale visionnaire basée sur la solidarité ne soit acceptée par tous les pays.

 

Le succès de la COP 27 en Égypte serait un symbole de la valeur indéniable du multilatéralisme. Pour cela, il est impératif d’apprendre des erreurs du passé. Il n’y a plus de temps pour la rhétorique. Agir avec énergie maintenant est une question de grande responsabilité. Tous les pays doivent être prêts à relever ce défi et à façonner un système écologique durable pour les générations présentes et futures.

 

Le fatalisme n’est pas une option lorsque toute l’humanité est confrontée à des développements catastrophiques.

 

Dr Ioan Voicu

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