Dans ma dernière chronique, je relatais mes premières impressions « singulières » en arrivant en France, après avoir été tenu éloigné de l’Hexagone ces trois dernières années en raison de la COVID. Me voici donc chez ma fille à Écully, dans la banlieue Ouest de Lyon. Pour sentir battre le pouls de la France quand on vient de l’étranger après une longue absence, rien ne vaut un bistro, cœur vivant de la cité. C’est le sujet de la chronique ci-dessous. Bonne lecture donc.

Les jeunes étaient partis. Fuyant le vent glacial,
Retraités fortunés et travailleurs contraints
Trainaient dans le bistro, ce samedi matin,
Munis du sésame, le passe vaccinal.

Les congés scolaires avaient vidé les rues.
Dans cette banlieue chic, à l’Ouest de Lyon,
Les enfants partent au ski, les Alpes à l’horizon.
Même l’église en face, se sent éperdue.

Sukhothaï est loin : oubliés ses trente-deux degrés.
Son hiver tropical a fait place à l’hiver
D’ici, ses froids pluvieux et ses vents de travers,
Qui pétrifient le corps, même emmitouflé.

Dans ce bistro du coin, on refait le monde :
Le sport, la politique, le pouvoir d’achat,
La pandémie bien sûr, et son lot de tracas,
Les élites coupées de la France profonde.

Derrière une bière, un blanc sec de comptoir,
Des amuse-gueules, on existe et on rit.
Modestes ou nantis, on se côtoie sans chichi,
Parole libérée, pour un radiotrottoir.

Dans mon coin attablé, je suis parfois ailleurs.
Trois ans loin d’Écully, j’ai vieilli en Orient.
Mes petites-filles, des ados maintenant,
Prennent leur liberté, envol de jolis cœurs…

Après quelques verres, j’atterris enfin sur terre ;
Oubliés Sukhothaï et les treize heures de vol.
Écully, son clocher, sa mairie, ses écoles
Et ses nombreux bistros : voilà mon univers …