Le président américain termine ce mardi 24 mai sa tournée en Asie. Il s’est rendu en Corée du sud et au Japon sur fond de guerre en Ukraine. Que cherchait-il ? Analyse.
Le président américain s’est rendu au Japon et en Corée du Sud, du 20 au 24 mai. Ces visites étaient l’occasion de renforcer les liens avec ses alliés et de remettre la Chine au cœur de ses priorités géopolitiques.
En politique étrangère, la ligne d’horizon de l’administration Biden était claire : elle se focaliserait sur l’Asie et sur sa rivalité avec la Chine. Pourtant, il a fallu attendre seize mois pour que le président américain entreprenne son premier déplacement dans la région, entre les 20 et 24 mai. Une semaine après la tenue, à Washington, d’un sommet avec les pays d’Asie du Sud-Est, Joe Biden nie tout changement de priorité dû à la guerre entreprise par le Kremlin. « En réalité, nous ne voyons pas cela comme une tension (…), mais comme deux choses se renforçant mutuellement », a expliqué le conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, mercredi 18 mai, employant même le mot « symbiose ». Le président américain veut afficher l’intensité des relations avec le Japon et la Corée du Sud, deux alliés essentiels dans l’Indo-Pacifique, qui ont d’ailleurs également soutenu l’Ukraine. Il compte aussi répondre aux inquiétudes sur les essais balistiques de la Corée du Nord et, surtout, à un possible coup de force militaire chinois contre Taïwan.
Nouveau concept stratégique
De l’Europe à l’Asie, selon Washington, l’enjeu essentiel est la cohésion du bloc des démocraties libérales face aux régimes autoritaires. En février, la Maison Blanche a publié un document sur sa stratégie dans la région. « Notre objectif n’est pas de changer la République populaire de Chine, y était-il écrit, mais de modeler l’environnement stratégique dans lequel elle évolue, de bâtir un équilibre d’influence dans le monde qui soit le plus favorable possible aux Etats-Unis, à ses alliés et partenaires, et aux intérêts et valeurs que nous partageons. »
Fin juin, l’OTAN doit adopter, lors du sommet de Madrid, un nouveau concept stratégique, un document important rappelant ses principes et ses priorités. Selon nos informations, les Etats-Unis mettent de nouveau la pression pour que la Chine entre dans le viseur de l’Alliance, ce qui n’est pas sa vocation, selon Paris. Dans le communiqué final publié à l’issue du sommet de juin 2021, les membres de l’OTAN avaient déjà noté : « Les ambitions déclarées de la Chine et son comportement déterminé représentent des défis systémiques pour l’ordre international fondé sur des règles et dans des domaines revêtant de l’importance pour la sécurité de l’Alliance. » Mais Emmanuel Macron avait alors mis en avant la géographie et l’éloignement de la Chine par rapport à l’espace transatlantique. « Il est très important de ne pas nous disperser », avait souligné le président français.
Aujourd’hui, alors que les échanges se multiplient entre les capitales, Washington veut tracer plus nettement une sorte de lien de complicité entre Moscou et Pékin sur fond de guerre en Ukraine, pour expliquer que la Chine a facilité l’entreprise russe.
Révision de l’aide à Taïwan
Pour l’administration Biden, les leçons de la guerre en Ukraine sont d’ordre opérationnel et politique. Sur le plan militaire, l’aide apportée à Taïwan fait l’objet d’une révision. La presse américaine rapporte que Washington jugerait dorénavant bien plus utile de préparer l’île à un conflit asymétrique, plutôt que conventionnel, avec la Chine. Cela implique des armements plus légers et mobiles, de haute précision. De ce point de vue, la guerre en Ukraine démontre l’efficacité redoutable des drones, des systèmes Stinger contre les avions et hélicoptères volant à basse altitude et des Javelin contre les tanks. Nul doute que désormais, les livraisons d’armes à Taïwan vont tenir compte de ces leçons ukrainiennes !