Les festivités d’avril marquant Songkran, le nouvel an thaï, sont fortement alcoolisées. Pour éviter les nombreux accidents qui en découlent, les autorités thaïlandaises envisagent d’interdire la vente et la consommation d’alcool pendant cette période.
Mais qu’en est-il dans les campagnes où chacun est un bouilleur de cru en puissance ?
Les citadins l’ignorent souvent, mais dans les campagnes thaïlandaises, les alambics tournent à plein, et le vin et l’alcool de riz local coulent à flots. Chaque célébration, mariage, funérailles, anniversaire, retraite bouddhiste des jeunes et moins jeunes, sont l’occasion d’arroser l’événement lors de « Tamboons » festifs et bruyants, qui peuvent durer plusieurs jours.
L’alcool de riz, le « Lao Khao », qui titre 80 degrés, vient de la distillation du vin de riz, -appelé « Lao Hai » ou « Sato » selon les régions-, obtenu par fermentation du riz gluant.
Le riz gluant est stocké dans des jarres, souvent en plastique, mélangé à une levure (100 gr de levure pour 3 kg de riz) et du sucre pendant trois jours. Pour la levure, chacun a sa recette : chez Pa Tong, distillerie artisanale agréée de Sukhothai, la levure est obtenue à partir de poudre de riz gluant, mélangée à du poivre, du piment séché, de l’ail, et de quelques épices
On y ajoute ensuite 20 litres d’eau. Le mélange poursuit sa fermentation pendant sept jours environ. Une fois le liquide filtré, on obtient 18 litres de ce fameux vin de riz de couleur blanche opaque, légèrement sucré. A Sukhothai, il est appelé « Nam Khao ». Ce dernier peut être vendu en l’état ou prendre le chemin d’un alambic, où il est distillé pendant six heures. Ici, les alambics sont chauffés par des fours à bois. Il faut 180 litres de vin de riz pour obtenir 30 litres d’eau-de-vie.
Pa Tong, qui a quatre alambics, simples et rustiques, peut produire 200 litres de « Lao Khao » quotidiens. Mis en bouteilles d’un demi-litre ou en sachets plastiques (idem), il est vendu 35 bahts à la demande et en boutique. Le vin de riz coûte 40 bahts le litre.
Vous en saurez plus en lisant cette Chronique pour laquelle j’ai donné de ma personne… (Sept strophes en Alexandrins, rimes croisées.)
Le bâtiment discret, qui longe le canal,
Abrite des trésors, à l’ombre des rizières.
Peu connus des urbains, mais ici, c’est banal,
Des alambics distillent l’alcool des chaumières.
Les paysans, habiles, sont tous bouilleurs de cru :
La plupart clandestins, d’autres autorisés.
Vin et alcool de riz, sont si répandus,
Qu’on les boit entre amis, comme du petit lait…
Produits en continu, ou bien pour l’occasion,
Ces joyeux nectars sont de toutes les fêtes.
Meilleure qualité, large consommation,
Les alambics planqués, sortent de leur cachette…
Les coopératives, ici « communautés »,
Des villes et villages, ont leurs distilleries,
Rustiques et sommaires. L’alcool de riz patenté,
Titre quatre-vingts degrés : divine eau-de-vie…
Chez Pa Tong, l’un des distillateurs agréés,
Quatre alambics produisent le « Lao Khao »,
A partir du vin de riz gluant fermenté ;
Deux-cents litres par jour : du stock pour les accros !
Le vin de riz, nommé « Lao Hai » ou « Sato »
Selon les régions, fait plus ou moins six degrés.
Facile à faire, peut coûteux, il coule à flots
Ici, où l’on se grise ainsi à peu de frais…
À Sukhothaï comme ailleurs, les distilleries
Sont légion. Les fêtes, pour un oui, pour un non,
Avec famille, voisins, étrangers, amis,
S’arrosent au fil des mois ; nul besoin d’occasion…
Michel Hermann
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