La journaliste Claudia Mo est incarcérée depuis des mois pour son activisme politique anti chinois et pro-démocratie. Le Financial Times lui a récemment rendu hommage. Nous partageons des extraits de ce très beau texte. Total soutien à Claudia Mo !
Le 6 janvier 2021, peu après l’aube, la gouvernante de Claudia Mo entend un coup sec à la porte d’entrée. L’heure matinale et le profil de Claudia Mo en tant qu’éminent politicien de l’opposition rendent la gouvernante méfiante. Elle ouvre un peu la porte, laissant la chaîne de sécurité en place, et voit une troupe de policiers à l’extérieur. La gouvernante s’est précipitée pour réveiller Mo, mais les policiers ont déboulé dans le salon. “C’était juste de la brutalité, de la pure brutalité”, a déclaré une personne ayant connaissance du raid.
Mo, qui était alors âgée de 64 ans, a été arrêtée et emmenée au poste de police d’Aberdeen, dans le sud de l’île de Hong Kong. Son mari, le journaliste et historien britannique Philip Bowring, âgé de 79 ans, a été laissé en état de choc dans le calme soudain de leur maison. Des scènes similaires se sont déroulées dans toute la ville, alors que des centaines de policiers passaient au peigne fin Hong Kong et arrêtaient plus de 50 défenseurs de la démocratie – universitaires, militants et hommes politiques.
Quelques jours plus tard, rentrée chez elle sous caution, Mo a posté sur Instagram une photo de sa porte d’entrée et de sa chaîne de sécurité cassée. “J’ai été un peu absent, principalement derrière les barreaux. Ils ont saisi mon #cellphone et mon #ordinateur… j’ai beaucoup de mal à faire mes trucs habituels en ligne”, a-t-elle écrit.
Si les arrestations ont été un choc, elles n’ont pas vraiment été une surprise. Mo, pour sa part, mettait en garde depuis des années contre l’autoritarisme croissant de la Chine à l’égard du territoire. En 2016, après que Pékin a pris la mesure sans précédent d’interdire à deux politiciens élus de siéger à l’assemblée législative de Hong Kong, elle a écrit que cela pourrait être “le début de la fin…”. Aujourd’hui, Pékin parle d’anti-indépendance, demain il parle d’anti-autodétermination et le jour d’après, il peut parler d’anti-démocratie tout court.
Mo a un sens de l’humour et une honnêteté qui ont fait d’elle une figure appréciée des partisans de la démocratie. Certains l’appellent en cantonais “Tatie Mo”. Pendant sa libération sous caution, parallèlement à des posts Instagram montrant des fleurs, des papillons et des couchers de soleil, Mo a posté une photo d’une bouteille de bière Citibrew. L’étiquette montrait une femme tenant un parapluie, un symbole du mouvement démocratique ici. La bière s’appelait “Tough Ladies IPA”.
La photo la plus récente sur sa page Instagram montre quelques livres cartonnés poussiéreux, dont l’un porte l’empreinte d’Oxford University Press, aux côtés de petits objets gris en papier. “Mes nids de guêpes apparents année après année d’une étagère de livres non nettoyée depuis longtemps”, a-t-elle écrit, en ajoutant un emoji de guêpe. C’était le 25 février 2021. Trois jours plus tard, elle a été arrêtée à nouveau. Depuis ce jour, il y a 16 mois, elle est en prison, ainsi que 46 autres politiciens et militants démocrates de premier plan. Ils sont connus sous le nom de “Hong Kong 47”. Tous ont été accusés de “conspiration en vue de commettre un acte de subversion” en vertu d’une nouvelle loi draconienne sur la sécurité nationale imposée par la Chine en 2020.
Le procès devrait commencer dans le courant de l’année. Ce moment charnière dans l’histoire de la ville et de sa relation troublée avec la Chine coïncide avec une autre étape importante : La visite du président Xi Jinping le 1er juillet pour commémorer le 25e anniversaire de la restitution de Hong Kong à la Chine par la Grande-Bretagne. C’est la moitié des 50 ans d’autonomie “un pays, deux systèmes” que Pékin a garantis au territoire en 1997.
S’ils sont condamnés à la peine maximale prévue, les 47 Hongkongais pourraient mourir en prison. Selon leurs détracteurs, leur parcours dans le système juridique de la ville montre que la Chine exploite le vernis de respectabilité qu’offrent les tribunaux, notamment un personnel composé de juges et d’avocats formés au Royaume-Uni, pour imposer sa volonté. Ce faisant, elle pourrait détruire la dernière garantie de Hong Kong qui distinguait cette ville autrefois libre de l’autoritarisme oppressant de la Chine continentale.
Les parents de Claudia Mo sont arrivés à Hong Kong en 1950 en tant que réfugiés de Ningbo, près de Shanghai, dans le cadre de l’exode qui a accueilli la prise de pouvoir par les communistes en Chine. Mo est née en 1957, la plus jeune de quatre enfants, “le bébé de la famille”, comme elle l’a dit un jour à un interviewer. Son père possédait une petite usine et un magasin de décoration intérieure, et elle a fréquenté une école catholique romaine dirigée par des religieuses françaises dans un quartier chic de Hong Kong. Elle réussit à apprendre une bonne partie du français, ce qui déclenche chez elle un intérêt pour les langues qui durera toute sa vie…..
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