Les efforts annoncés par les autorités thaïlandaises pour modifier le «mix» énergétique en faveur des énergies renouvelables ont de la peine à se concrétiser. Un rapport de l’Agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena) pointe les difficultés rencontrées par le Royaume pour faire face à la demande énergétique toujours plus grande. L’Irena estime qu’un programme plus volontariste est indispensable.
On connait les objectifs affichés par les autorités Thaïlandaises: le Royaume ambitionne de porter à 18 % la part de renouvelables dans sa production d’électricité, d’ici 2030 et à 30 % la part de renouvelables en matière de consommation énergétique (électrique et autres), en 2036.
Pour ce faire, le pays s’est engagé à diversifier ses sources d’énergie en développant le solaire, l’éolien, la biomasse et la transformation des déchets.
D’importants investissements sont aussi annoncés dans le domaine des infrastructures de réseaux intelligents et la création de « smart cities », dans le cadre de l’initiative Thailand 4.0.
Exemple: la presse s’est, récemment, fait l’écho du déploiement de 120 000 compteurs électriques intelligents visant à optimiser la consommation d’énergie, chez les particuliers, à Pattaya, par exemple.
À cela s’ajoutent encore les investissements réalisés par le Royaume dans les projets d’interconnexion électrique initiés au sein de l’Association des nations de l’Asie du sud-est dont la Thaïlande assurera la présidence annuelle à partir de janvier.
Attention toutefois aux statistiques et aux annonces trompeuses: Un rapport de l’Irena (Agence internationale pour les énergies renouvelable) indique qu’en 2016, les énergies renouvelables représentaient 10 % de la production d’électricité du Royaume.
Cette dernière reposait à 89 % sur l’utilisation d’énergies fossiles comme le charbon (22 %) et le gaz (67 %).
Le charbon pour faire face à l’urgence
En annonçant vouloir doubler la part des renouvelables, la Thaïlande fait donc preuve d’ambition.
D’une part, car le pays va devoir composer avec une demande en énergie en forte progression, de 78 % entre 2015 et 2036.
D’autre part, car le Royaume doit aussi développer des alternatives au gaz dont il est très dépendant.
Selon l’Irena, la consommation de gaz, qui est importé, va crescendo et la facture pourrait être multipliée par 10 d’ici 2035.
Compte tenu de l’urgence dictée par la demande énergétique exponentielle et la nécessité de gagner en indépendance sur le plan énergétique, l’une des réponses privilégiées par les autorités publiques consiste à augmenter la part du charbon dans la production d’électricité.
En cela la Thaïlande est au diapason des autres pays de l’Asie du sud-est.
Un rapport de l’AIE (Agence internationale de l’énergie), publié en 2017, avance que le charbon pourrait « satisfaire 40 % des besoins complémentaires de cette région, dépassant ainsi le gaz naturel dans le mix de production électrique ».
Mais en misant sur le charbon, non seulement la Thaïlande conforte sa consommation de combustibles fossiles mais elle voit également ses émissions de CO2 exploser (+ 70 % selon un scénario de l’Irena) alors que le Royaume annonce, aussi, vouloir réduire de 20 à 25 % le niveau de ses émissions de gaz à effet de serre, d’ici 2030.
Accélérer sur le renouvelable
Si l’Irena salue les efforts réalisés et les ambitions du Royaume, cette agence spécialisée invite le pays à se montrer plus ambitieux et volontariste en matière de décarbonisation du bilan énergétique.
L’agence recommande à la Thaïlande de porter sa part des renouvelables à 37 % de la consommation d’énergie finale et à 25 % de la production électrique à l’horizon 2036.
Pour ce faire, il importe d’investir considérablement dans des solutions « plus propres » (solaire, éolien, biocombustible…), au cours des deux prochaines décennies.
L’effort est conséquent puisqu’il porte sur 2,6 milliards USD, par an, entre 2015 et 2036.
Les économies, immédiates, liées à la réduction des importations de matières premières mais également au recul des dépenses de santé grâce à la baisse du niveau de pollution, sont également très importantes, argumente l’Irena.
Sans compter, bien entendu, qu’à défaut de prendre des dispositions, le dérèglement climatique entraînera une multiplication de catastrophes climatiques, écologiques, sanitaires et économiques.
Ce qui est préconisé pour la Thaïlande vaut d’ailleurs pour l’ensemble des pays de l’Association des Nations du sud-est asiatique.
Pour atteindre son objectif de 23 % d’énergie primaire d’origine renouvelable, en 2025, l’ASEAN « devrait multiplier ses investissements par 10 par rapport à 2016 et cela pendant les 8 prochaines années, soit un investissement annuel estimé à 27 milliards de dollars », précise l’Agence internationale qui, début novembre, a signé un accord avec l’ASEAN afin de « renforcer l’environnement légal et financier visant à permettre davantage d’investissement et de déploiements dans les énergies renouvelables ».
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Fabrice Barbian.
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