Très intéressante interview de l’Ambassadeur de France Jacques Pellet par nos confrères du Khmer Times. Bravo ! L’histoire honorée au Cambodge.
Pendant la Première Guerre mondiale, entre 1914 et 1918, on estime à 20 000 le nombre de Cambodgiens envoyés combattre aux côtés des Français en Europe.
Parmi eux, 151 ont donné leur vie pour leur pays. Pour leur rendre hommage, ainsi qu’aux 33 Français originaires du Cambodge, un monument a été inauguré par feu le roi Sisowath et le gouverneur général français de l’Indochine de l’époque, Martial Henri Merlin, en 1925.
Cependant, en 1977, les Khmers rouges ont détruit le monument, effaçant la mémoire des âmes courageuses qui ont sacrifié leur vie pour le pays.
Le 14 juillet, ce “Monument aux Morts de la Grande Guerre” ou “Roupi”, une sculpture représentant un soldat cambodgien, un soldat français et quatre éléphants, sera officiellement inauguré après avoir été ressuscité au début de l’année par le gouvernement cambodgien.
Lors d’une conférence de presse conjointe avec le président français Emmanuel Macron à Paris en décembre dernier, le Premier ministre Hun Sen a déclaré que le gouvernement prévoyait de reconstruire le mémorial en face de l’ambassade de France à Phnom Penh.
Les travaux ont commencé le 25 janvier et se sont achevés récemment.
Le “Roupi” se trouvait à l’endroit où se trouvent aujourd’hui les ronds-points des fusils à nœuds, dans le quartier de Daun Penh, devant l’ambassade de France.
KT : Le gouvernement cambodgien a décidé de reconstruire le “Monument aux Morts de la Grande Guerre” devant l’Ambassade de France. Quelle est l’importance de cette reconstruction ?
Jacques Pellet : La décision du gouvernement cambodgien est avant tout un hommage aux Cambodgiens, mais aussi aux Français du Cambodge, dont le courage et souvent le sacrifice ont contribué à l’issue de la Première Guerre mondiale et permis la victoire de 1918.
On estime qu’environ 20 000 Cambodgiens ont participé à ce que nous appelons encore la “Grande Guerre”. Certains ont été envoyés en France pour travailler dans les usines et dans l’administration. D’autres, à partir de 1916, ont rejoint les bataillons de tirailleurs indochinois, auxquels il faut ajouter les infirmières et les chauffeurs de voitures.
Ces troupes ont combattu sur le front occidental à partir de 1916, au Chemin des Dames en 1917 et dans les Vosges en 1918. C’est en mémoire des soldats tombés pendant la Grande Guerre que ce monument, sculpté par l’artiste français Paul Ducuing, a été érigé en 1925. Sur une plaque apposée sur le monument, sont inscrits 184 soldats : 33 Français et 151 Cambodgiens, morts pour la France en provenance du Cambodge.
Le “Roupi” a été reconstruit près de 50 ans après sa destruction par le Kampuchéa démocratique des Khmers rouges en 1977.
KT : Que symbolise-t-il aujourd’hui ?
Jacques Pellet : En 1925, avec la construction de ce mémorial, le Cambodge a rejoint les 36 000 villes et villages de France qui ont érigé des mémoriaux dans les années qui ont suivi l’armistice du 11 novembre 1918. Il est important de rappeler que le but premier de ces monuments n’est pas de célébrer la victoire sur l’ennemi, mais d’honorer la mémoire des 1 400 000 soldats français morts.
N’oublions pas qu’au total, 18 millions de personnes ont perdu la vie au cours de la Première Guerre mondiale : 10 millions de soldats et 8 millions de civils. C’est le symbole que portent encore aujourd’hui ces mémoriaux : rendre hommage à ceux qui ont sacrifié leur vie sur le champ de bataille, au-delà même de la Première Guerre mondiale.
Aujourd’hui, alors que le Cambodge se prépare à célébrer le 70e anniversaire de son indépendance en novembre, cette reconstruction est un nouveau témoignage que cette date n’a pas marqué la fin, mais le début d’une amitié riche et profonde entre nos deux pays, fondée sur un passé commun et tournée vers l’avenir.
A lire en intégralité sur le site du Khmer Times
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