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Il faut réécouter la conférence de presse donnée, dimanche 3 décembre, par le procureur du parquet antiterroriste français, Jean-François Ricard. Tout était dit, en peu de mots, sur cette implacable réalité : avec six millions de musulmans sur son territoire, la France est sans doute le pays d’Europe le plus exposé aux flammes de la haine venues du Proche-Orient.
C’est un fait. Tout comme l’est, à la lumière de la biographie du terroriste présumé brossée par le magistrat, l’impossibilité pour l’administration française de « gérer » les 20 000 fichés S pour radicalisation islamique. Avant de faire un mort et deux blessés à l’ombre de la Tour Eiffel samedi 2 décembre, Armand M. avait, selon les médias français, juré « ne plus être musulman », après plusieurs années passées derrière les barreaux pour un projet d’attentat, en 2016, dans le quartier parisien des affaires de la Défense. Il faisait partie des 340 détenus radicalisés libérés depuis 2018 (une trentaine d’autres doivent l’être en 2024). Dissimulation ? Ou rechute due à un vent de folie meurtrière ravivé par les images de la tragédie de Gaza, depuis l’assaut terroriste du Hamas contre Israël, le 7 octobre ?
Le récit du procureur est, comme toujours, celui d’une dérive contre laquelle tous – police, juges, geôliers, psychiatres et surtout les parents – se sont avérés impuissants. Né en 1997 à Neuilly-sur-Seine, banlieue loin d’être un bastion de l’exclusion sociale, Armand M., iranien d’origine, a comme tant d’autres basculé sans retour lorsqu’un sergent-recruteur de la terreur lui a mis la main dessus via internet. Maximilien T. gravitait au sein des « cavaliers de la fierté » (Forsane Alizza), groupuscule islamiste radical dissous en 2012 après avoir fait piétiner le Code Pénal par ses disciples, prôné l’instauration de la charia et défendu la transformation de la République en califat.
Le reste est affaire de circonstances. Une fois planté, alimenté par les images du Yémen, de Syrie, d’Afghanistan et aujourd’hui de Gaza, le virus de la haine peut prospérer. L’emprise sur des adolescents perdus, diagnostiqués malades psychiatriques et remis en liberté, n’a plus qu’à conduire au pire. Le combustible de la terreur a, malheureusement, de quoi brûler encore longtemps.
A lire, en pensant au drame des enfants soldats.
(Pour débattre : richard.werly@ringier.ch)
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Le cas de A (Armand/Iman) du pont Bir-Hakeim semble être un cas d’école. Après avoir passé 4 années en prison pour motif de préparation à commettre un acte terroriste A a déclaré, pendant cette période, s’être “dé-radicalisé” au point de s’être affranchi de l’idée même de Dieu. Ce parcours peut apparaitre comme hors norme, la radicalisation s’effectuant plutôt en milieu carcéral. La suite des évènements et son geste meurtrier ultérieur éclaire la tactique de la dissimulation (Taqîya) dans l’entreprise terroriste islamiste. Le narratif psychiatrique que peuvent attester des phases délirantes bien répertoriées par la psychiatrie pourrait apparaître, à postériori, comme participant de la taqîya. Cette approche ne parait pas avoir été envisagée. L’analyse des faits est alors déplacée sur un terrain qui n’est pas le vrai terrain des intentions réelles et des actes projetés. Il n’ y aurait pas de “ratage psychiatrique”, c’est l’approche psychiatrique qui rate sa cible. Les déclarations récentes de A , après son arrestation, révèlent un discours organisé, construit, charpenté, ciselé. Ce cas montre que la déradicalisation, dans son cas du moins, est une entreprise vaine. La comparaison avec les phénomènes de conversion religieuse doit être fait. Saint Augustin, Charles de Foucault ou Claudel ont témoigné d’une conversion radicale. On pourrait sans doute parler de conversion au communisme. R. Garaudy en expérimenta plusieurs, une politique, une religieuse. La radicalisation politique peut être plus facilement combattue, non sans dommages ni massacres, sur le terrain du combat politique ( ex. le nazisme) , la radicalisation religieuse est plus difficile à combattre. Dans le cas du catholicisme, la sécularisation des sociétés occidentales dans lequel il s’est déployé en a atténué si ce n’est dévitalisé la tentation sectaire. Les phénomènes sectaires divers relèvent des mêmes processus. Mais dans le cas de la conversion islamique dans sa version salafiste, radicale, c’est à dire prônant une lecture littérale du Coran le situation apparait comme très différente. Le Coran est un texte incrée et donc, dans cette approche, ne pouvant supporter la moindre interprétation sous peine d’apostasie. Il est par conséquent pour un musulman, tenant de cette orientation, impossible d’abandonner un “credo” basé sur une l’interprétation radicale de certaines sourates hostiles aux mécréants vus comme des créatures infernales. L’impossibilité vaut d’abord pour lui-même et pour tous ceux qui partagent les mêmes vues à commencer par l’entourage dans le cadre duquel il s’est progressivement radicalisé. Dans le cas de A, la figure du mécréant est le juif, Israël étant stigmatisé comme étant à l’origine du malheur musulman. La cible fût, dans ce cas, un ressortissant allemand originaire des philippines, dont le rapport aux évènements du moyen-orient n’avait pas d’autre lien que le lieu ou l’acte meurtrier à été perpétré : Paris, capitale de la France jugée complice d’Israël, sur un pont de hasard faute d’avoir pu le faire dans le jardin mémorial des enfants du Vel’ d’hiv’. La victime aurait pu, tout aussi bien, être une personne de religion musulmane. Au regard de ces réflexions, si elles sont pertinentes, de nombreuses craintes peuvent surgir : en 2023, 486 musulmans radicalisés sont sortis de prison et 391 doivent sortir en 2024. Quels sont les dispositifs permettant d’éviter la répétition du geste de A ?
Par ailleurs, cet épisode vérifie une fois de plus la stratégie terroriste mise en œuvre. Une mise en scène sur un lieu touristique identifiable ( Paris identifié à la tour Eiffel) et qui sera diffusée dans le monde entier. L’auteur de cet acte sait parfaitement calculer l’impact de son geste dont il sait qu’il sera diffusé par les médias, il est par conséquent consciemment intégré dans la stratégie djihadiste. La diffusion des images des raids du Hamas du 7 octobre participe de cette stratégie. Le Hamas n’ignorant en rien la réplique d’Israël l’a parfaitement intégrée afin que les morts et les destructions causés par l’armée israélienne qui seront la riposte, recouvriront les actes du 7 octobre et les mèneront à l’oubli et à un océan de soutiens et de conversions. Cela semble plutôt avoir réussi … La publicité ainsi faite est intégrée dans une stratégie réfléchie d’une part afin de répandre la peur et l’intimidation et d’autre part de susciter l’engouement et les vocations. C’est l’ “effet Werther “ou “copycat”. Cette stratégie qui ne provoque qu’un nombre plutôt “limité” de victimes, en France, 300 depuis 2015 (on peut remonter à Khaled Kelkal en 1994) et qui ne mobilise qu’ une logistique réduite, se révèle au total avoir un coût-bénéfice très positif. Il conduit à une efficacité maximum en termes de vocations suscitées : un océan de conversions suivies ou non des cheminements qui peuvent conduire au pire. La stratégie menée compte également sur la puissance des médias et des commentaires auquel nous participons pour relayer la publicité de ces actes, c’est l’effet tambour, au point de se faire, d’une certaine manière , complices …
Les faits rappelés par notre éditorialiste sont bien réels et attestés. Du côté du pont de Bir-Hakeim un assassinat dont le ressort est aussitôt rapporté à la folie de son auteur (le narratif avait été tenu dans une affaire similaire se déroulant à Annecy) et dont la responsabilité incomberait aux psychiatres dédouanant ainsi les responsabilités politiques des autorités à qui incombe la sécurité des citoyens. Avec cette circonstance aggravante que l’analyse du radicalisme islamiste bien repéré et d’ailleurs revendiqué est analysé sous l’angle du “trouble psychiatrique” manque sa cible et donc les politiques qui s’imposent. Il faut incidemment noter un certain cynisme à accabler un secteur de la santé dont on sait qu’il a été démantelé depuis des lustres. Du côté Crépol les analyses qui défraient la chronique depuis 3 semaines, du jamais vu dans un scénario digne de l’affaire Dreyfus. Un meurtre ou un assassinat (la qualification est en cours) décrit comme rixe banale entre “jeunes” comme il en existerait de toute éternité qu’exacerberait la présence féminine. L’alcool et les mots de trop déclencheraient les pulsions juvéniles et, par dérapage émotionnel, le geste meurtrier ; rien que de plus “normal” dans les bals populaires. Une directrice de recherches du CNRS y a même vu une réactivation du drame shakespearien… Les Capulets et les Montaigu .. Circulez, il n’y a rien à voir, la messe est dite. De l’autre côté du spectre interprétatif le narratif est tout autre : un “raid” meurtrier de jeunes issus de l’immigration venu “planter des blancs”(aux dires de 9 témoins) avec un couteau de chasse dont l’usage envisagé n’était probablement pas de couper des tranches de saucisson. A l’heure actuelle on ne peut dire si le port d’une telle arme était envisagé pour tuer ou non. La présence d’une arme est attestée et ne fait pas débat. Deux versions qui se sont succédé, l’une supplantant l’autre, dans une lutte interprétative dans un contexte d’instrumentalisations politiques polarisées chauffées à blanc par les médias et de silence du procureur. Une attaque à laquelle aurait répondu, quelques jours plus tard, une “ratonnade” menaçante de nervis extrême-droitisés. Les deux camps se font face et à ce jour les deux grilles de lecture fracturent l’opinion, les partis politiques et les médias. La révélation des motifs officiels des inculpations et le procès qui suivra trancheront t-ils le débat ? Rien n’est moins sur… Le coup de grâce parait avoir été donné par la Première ministre dans un tout récent entretien au Figaro. Réaffirmant la volonté inébranlable de l’État dans la poursuite de sa politique de sécurité, elle déplore néanmoins que les Français, ceux des villes moyennes et des campagnes dit-elle, cèdent au sentiment que la violence augmenterait. Ce dont ont été probablement victimes le touriste du pont de Birakeim et le jeune Thomas de Crépol. La messe avait déjà été dite par le Garde des sceaux spécialiste en sentiment d’insécurité…
Neuilly et plus largement le triangle Auteuil, Neuilly, Passy peut tout aussi bien être vu comme le triangle des Bermudes de l’exclusion sociale, aujourd’hui nommée, dans la novlangue, “séparatisme”. Deux sociologues et experts des beaux quartiers ont scruté pendant plus de 20 ans les us et coutumes des “beaux quartiers”; Ils ont publié une quinzaine de livres. Le triangle est le point nodal de gestation et de reproduction des dynasties dirigeantes et dominantes : celle de de l’argent et celle de la politique. Cette dernière fût crée par un certain Charles, l’un des anciens tenancier de la place Beauvau, issu de chez Ricard et du SAC. Est-ce celui si vénéré par notre commentateur ? Il donna naissance à un autre résident de Neuilly qui de la place Beauvau conquit l’Élysée… La sociologie de Neuilly mêle l’aristocratie traditionnelle, les vielles familles (les châteaux, chasse à courre, les tableaux, les mariages arrangés et si possible socialement consanguins, etc.) à laquelle s’est plus ou moins greffée une grande bourgeoisie affairiste et plus ou moins corrompue à laquelle s’accroche le monde des médias et du show-biz. Sarkozy fût l’icône de cette ascension même s’il était négativement perçu car trop vulgaire comme le sont les “nouveaux riches” du moins pour cette aristocratie surtout quand elle est désargentée. Nouveaux riches parmi les riches, les “vrais”, mais pauvres parmi les riches : “chez les grands bourgeois, nous étions assis, mais en bout de table” se lamentait Guillaume, le frère du Président, avec un ressentiment à peine dissimulé. La grande bourgeoise traditionnelle hait la lumière dont se repait le nouveau riche décomplexé, figure de l’avènement du capitalisme débridé. Elle préfère l’ombre de ses châteaux et de ses hôtels particuliers et la pénombre des églises et des confessionnaux. La Présidence Mitterrand a pu constituer un tournant dans ce processus, la “social-démocratie” ayant décidé de jeter ses oripeaux populaires et égalitaires aux orties. L’avènement des “années fric” décomplexées par la “social-démocratie” aux manettes, une extension des “années fric” évoquées par R Werly dans son édito précédent.
Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon : “Grandes fortunes, dynasties familiales et formes de richesse en France”, édition Petite Bibliothèque Payot, 2006 et “Les ghettos du gotha. Comment la bourgeoisie défend ses espaces”, édition du Seuil, 2006
Et comme en France tout finit par des chansons : Auteuil, Neuilly, Passy, année 1991 …
Hé mec, je me présente : je m’appelle Charles-Henri Du Pré
J’habite à Neuilly dans un quartier mais alors paumé !
Je suis fils unique dans un hôtel particulier
C’est la croix, la bannière pour me sustenter
Pas un Arabe du coin ni un Euromarché
Auteuil, Neuilly, Passy : tel est notre ghetto
Hé mec, mon nom à moi, c’est
Hubert-Valéry, duc de Montmorency
A 5 ans et demi, j’avais déjà ma Ferrari
j’pouvais pas la conduire bien sûr :
j’étais trop petit
As tu saisi mon pote,
Notre envie de révolte ?
J’ai envie de crier
“Zut, flûte, crotte”
Y en a marre du Fauchon
du Hédiard, du saumon, du caviar…
En France le terrorisme islamique est une histoire de fous (sérieux et sans jeu de mots)
énergumènes neutralisés au tazer quand celui-ci ne s’emmêle pas dans ses fils des lors qu’au usa ou en Israël la police utilise le 357 mg ou le 44 plus efficace et évite les procès onéreux pour les contribuables
A paris le touriste est loin du sawadée et du sourire mais va t’en comprendre Charles ??????