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THAÏLANDE – FRANCE : En 2022, la nouvelle porte-parole du gouvernement s’exprimait dans Gavroche

Date de publication : 12/01/2024
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Priska Thevenot

 

Belle coïncidence : la nouvelle porte-parole du gouvernement français connait la Thaïlande et Gavroche. Nous avions interviewé Prisca Thévenot en 2022 lors de son passage à Pattaya. Nous republions cet entretien.

 

Prisca Thevenot est porte-parole de La République en marche depuis novembre 2020. Elle a été élue députée dans la 8e circonscription des Hauts-de-Seine lors des élections législatives de 2022. Elle représentait la France à la récente Conférence internationale sur la planification familiale qui s’est tenue à Pattaya. Interview

 

Quel était l’agenda du congrès mondial sur la santé des femmes à Bangkok ?

 

Tous les deux ans depuis 2009, la Conférence internationale sur la planification familiale réunit les communautés de la planification familiale et de la santé sexuelle et reproductive pour partager les meilleures pratiques, célébrer les succès et tracer la voie vers l’accès universel à la planification familiale.

 

Cette année, la Fondation Bill & Melinda Gates a organisé la 6e Conférence internationale sur le planning familial (ICFP 2022) à Pattaya du 14 au 17 novembre. Environ 15 000 personnes de 150 pays ont participé à la réunion au Pattaya Exhibition and Convention Hall du Royal Cliff Beach Hotel.

 

C’est la première fois que le plus grand rassemblement mondial d’experts en planification familiale et en santé sexuelle et reproductive sera organisé en personne à Pattaya, ainsi que virtuellement dans le monde entier, ce qui fera de la conférence ICFP 2022 la plus grande, la plus inclusive et la plus accessible à ce jour !

 

En tant que députée, engagée sur les sujets de santé des femmes, j’ai été invitée à y représenter la France pour y partager nos actions sur le sujet mais aussi pour échanger sur ce qui peut être fait ailleurs dans le monde.

 

Quel message avez vous porté au nom de la France ?

 

Notre combat pour l’égalité réelle ne pourra se faire sans prendre en compte l’enjeu de santé publique que représente le parcours de santé dégradé que vivent nos concitoyennes aujourd’hui en France. Ce quinquennat est l’occasion de réaliser un véritable plan de refondation, une véritable stratégie nationale du parcours de santé des femmes pour un parcours global, facilité et ce dès l’adolescence. Parce que la santé des femmes, c’est la santé de notre nation aujourd’hui et de notre nation demain.

 

Engagée depuis des années sur ces enjeux, j’ai pu développer un réseau élargi de professionnels de santé : gynécologues experts sur la fertilité, sage-femmes, collectif et associations… Mon travail approfondi avec ces acteurs m’a amené à réaliser une liste de priorités, le tout étant à inclure évidemment la nécessité absolue de créer un parcours de santé globale de la femme.

 

Nous avons un besoin d’information, de formation et de prévention articulé autour d’une stratégie nationale de santé de la femme.

 

– Dès l’adolescence, des différences biologiques existent et ne peuvent être gommées. Or, trop de jeunes filles ont une connaissance plus qu’incomplète de leur corps. Une très grande majorité d’entre elles ne consultent pour la première fois un gynécologue que pour obtenir un moyen de contraception. Elles n’ont alors qu’une connaissance partielle des implications de ce choix de contraception sur leur vie future, sur leur parcours de maternité et de fertilité. A ce stade de leur vie, peu de ces jeunes filles ont connaissance de maladies comme l’endométriose ou le syndrome des ovaires polykystiques.

 

– Par ailleurs, nos professionnels de santé ne commencent qu’à peine à être formés aux maladies spécifiquement féminines comme l’endométriose. Nous devons accélérer notre action sur la formation des médecins, infirmiers et professionnels de santé déjà en exercice.

 

– Plus tard dans leur vie, nombreuses sont les jeunes femmes et les femmes qui ignorent que la première cause de mort prématurée chez les femmes sont les maladies cardiovasculaires. Pire encore, peu de femmes connaissent les symptômes associés à l’infarctus féminin. La recherche médicale et la prévention de nos pouvoirs publics à ce sujet présente un retard conséquent. Combien de femmes atteintes d’endométriose savent qu’elles sont à haut risque d’AVC et d’infarctus à 50 ans ? Combien savent que l’endométriose ne s’arrête pas au traitement de l’infertilité et qu’il est parfois nécessaire d’être suivi par un cardiologue ? La réponse est une infime partie.

 

– Alors que la fertilité française est en pleine décroissance, notre population possède une connaissance inexacte de la réalité de la fertilité, du parcours d’AMP et de la difficulté d’un parcours de PMA. Il s’agirait ici à inciter les femmes et les hommes à réaliser des bilans de fertilité.

 

– Par ailleurs, trop de femmes renoncent aujourd’hui à un parcours de soin adapté et à un suivi gynécologique régulier. Ce renoncement à de nombreuses causes : charge mentale et précarité peuvent en être les explications.

 

Que peuvent faire les parlementaires, quelles lois prioritaires ?

 

Tout d’abord, il convient de rappeler ce qui a déjà été fait : 

 

⁃ pilule contraceptive gratuite pour toutes les femmes, jeunes filles jusqu’à l’age de 26 ans

⁃ pilule du lendemain rendue gratuite et accessible dans l’anonymat pour toutes

⁃ fin du tabou sur la précarité menstruelle en mettant à disposition des étudiantes des distributeurs de protections hygiéniques gratuites

⁃ augmentation du congé paternité pour tous les hommes, pour que maternité ne rime pas avec dépendance économique, etc.

 

Ensuite il convient de continuer à agir pour lever les tabous et de dire les choses. Je propose ainsi que la France s’inscrive dans cette voie en mettant en place une véritable stratégie nationale de la santé de la femme sur l’exemple du gouvernement britannique en commençant par lancer une enquête publique ouverte à toutes les personnes âgées de plus de 16 ans en France.

 

Le gouvernement britannique a annoncé en août dernier sa toute première stratégie nationale de santé de la femme. En effet partant du constat que : « Les femmes vivent en moyenne plus longtemps que les hommes, elles passent une proportion beaucoup plus importante de leur vie en mauvaise santé et en situation de handicap que les hommes. L’accent n’est pas suffisamment mis sur les problèmes spécifiques aux femmes, comme les fausses couches ou la ménopause, et les femmes sont sous-représentées lors des essais cliniques importants. Cela signifie que l’on ne connaît pas suffisamment les maladies qui ne touchent que les femmes, ni la façon dont les maladies qui touchent les hommes et les femmes les affectent de manière différente. ». Nous pourrions réaliser le même constat sur notre système de santé français. 

 

En termes de lois, nous avons commencé à agir dès le début de cette nouvelle législature. Rapporteur pour avis au nom de la Délégation aux Droits des Femmes, j’ai proposé d’instaurer, dans le cadre du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS), un suivi aux âges clés de la vie de la femme. Ce suivi a pour objectif principal de créer le réflexe de la consultation gynécologique, et de mieux informer et prévenir. 

 

Le bilan de santé aux âges clés de la vie, promesse de campagne du Président de la République pourrait être adapté spécifiquement à la santé des femmesIl s’agira de mener des actions d’information et de prévention aux âges clés de la vie de la femme (on peut penser à 16, 30 et 45 ans par exemple) pour que les femmes aient une pleine connaissance de leur corps, de l’impact de certains choix comme du moyen de contraception sur leur vie future, de détecter des facteurs de risques ou des maladies comme l’endométriose mais aussi d’informer les femmes sur leur fertilité ou sur la ménopause. Ces sujets restent encore tabous dans notre société tant pour les femmes que pour leur entourage. Les femmes françaises ne doivent plus vivre seule ces étapes clés de leur vie.

 

Pensez vous que sur ce sujet, des progrès majeurs sont en vue ?

 

De nombreux pas importants restent à faire en la matière. Le premier étant celui de changer de paradigme et accepter qu’il existe des sujets qui ne peuvent souffrir de querelles partisanes. La santé des femmes est un de ces sujets.

 

Consensus politique, non partisan.

 

Le cancer du col de l’utérus est évitable. Aucune femme ne devrait en mourir. 1 femme tous les trois jours meure du cancer du col de l’utérus.

 

La vaccination contre le papillomavirus connu sous le nom du HPV, disponible depuis plus de 15 ans nous donne aujourd’hui le moyen d’éradiquer un cancer. Pour la première fois, nous touchons de près notre rêve collectif d’éliminer un cancer, de le battre une bonne fois pour toutes, nous en avons les moyens et nous ne nous en saisissons qu’à moitié.

 

Nous pouvons et nous devons le faire.

 

Alors que le cancer se développe généralement par des changements ou des mutations dans les cellules du corps, le cancer du col de l’utérus est une exception. Puisque 70% des cas sont causés par le papillomavirus humain. Ce virus contagieux est aujourd’hui maitrisable par la vaccination qui pourrait éviter plus de 6300 cancers par an.

 

Vous me savez engagée sur la mise en place d’une véritable politique de santé dédiée aux femmes. Cela n’implique en aucun cas que les hommes ne seraient pas pleinement concernés par cette démarche. La contamination au HPV peut entrainer plusieurs cancers masculins, ORL ou de l’anus, plus tard dans la vie. Or, la vaccination contre le HPV est aujourd’hui quasi-exclusivement associé dans l’esprit collectif à la prévention du cancer du col de l’utérus. Les hommes vivent à cet égard une véritable rupture d’égalité.

 

Malgré l’objectif atteignable d’une éradication de ce cancer, notre couverture vaccinale est bien en deçà des objectifs avec 37,4% des jeunes filles nées en 2005 vaccinées et à peine 6% des garçons.

 

Ces chiffres placent la France dans les retardataires, en Europe et au niveau mondial. Bien derrière le Royaume Uni avec 75% de la population cible vaccinée, derrière le Rwanda avec 95% de la population cible vaccinée ou encore derrière l’Espagne, le Portugal et le Mexique.  L’Australie avec ses 80% de couverture vaccinale chez les femmes comme chez les hommes n’enregistre pratiquement plus de lésions à HPV et pourra bientôt dire que les cancers liés au HPV ne sont qu’un lointain souvenir.

 

Si des craintes ont été exprimées dans la dernière décennie, nous disposons aujourd’hui d’assez d’éléments pour affirmer l’extrême sécurité de ce vaccin. Il n’y a plus de retenue à avoir. Nous devons aujourd’hui redoubler nos efforts de communication et de pédagogie tant auprès des parents que des professionnels de santé.

 

Il est certain que le coût de l’inaction est plus élevée que n’importe quel politique d’éradication du cancer, non seulement en termes de vies perdues, mais aussi en ce qui concerne la pression financière exercée par l’augmentation exponentielle de ces types de cancers sur les systèmes de santé publique. On estime aujourd’hui à 250 millions d’euros de dépenses le coût du traitement des lésions HPV et des cancers qui s’en suivent pour l’Assurance maladie.

 

Je pourrais également vous parler du travail fait par mes collègues parlementaires  particulièrement engagés sur le sujet des femmes : Aurore Bergé, Marie-Pierre Rixain, Sandrine Josso, Julie Delpech, Amelia  Lakrafi, Guillaume Gouffier ou encore Céline Calvez.

 

Meilleure prise en compte des fausses-couches, mise en place de budget fléché ou encore sur l’IVG que nous allons proposer d’inscrire dans la Constitution afin de protéger, de sécuriser ce droit pour toutes les femmes en France. Si la France est un pays moteur sur l’ensemble des sujets liés aux femmes et à l’égalité, nous devons continuer à agir pour nous mais aussi pour les femmes du monde entier dans un rapport de partenariat fort et profondément respectueux.

 

Ou sont les points noirs en termes de santé des femmes dans le monde ?

 

L’égalité en droit, pour laquelle notre majorité se bat depuis 2017, ne doit pas être synonyme d’effacement des différences en particulier sur le plan médical. Au contraire, elle doit permettre la prise en compte pleine et entière de celles-ci pour un parcours de santé égal.

 

Nous devons admettre que pendant des générations, les femmes ont vécu avec un système de santé conçu par les hommes et pensé pour les hommes. Alors qu’elles représentent 52% de la population française, les femmes restent sous-représentées dans la recherche médicale. Nous en savons ainsi bien moins sur leurs problèmes de santé spécifiques et donc sur les différences de prévention, de traitement ou de suivi à leur apporter (maladies cardiovasculaires, tabagisme, pratiques contraceptives etc.).

 

Si beaucoup a été fait au cours du précédent quinquennat (PMA, maternité, endométriose, etc.), beaucoup de tabous restent encore à lever (abandon de suivi gynécologique, chance perdue d’avoir un enfant quand il est pourtant souhaité, choix du type de contraception subi et non concerté, étape de la ménopause encore trop banalisée car peu évoqué en amont, etc.)

 

D’autres pays se sont saisis du sujet en Europe : en août dernier, le gouvernement britannique a annoncé sa toute première stratégie nationale de santé de la femme qui repose sur plusieurs constat établis par les autorités publiques du pays :

 

– Les femmes vivent en moyenne plus longtemps que les hommes et passent une proportion beaucoup plus importante de leur vie en mauvaise santé et en situation de handicap ;

 

– L’accent n’est pas suffisamment mis sur les problèmes spécifiques aux femmes, comme les fausses couches, les contraintes liées à la menstruation, la ménopause ;

 

– Les femmes sont sous-représentées lors des essais cliniques importants

 

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