GAVROCHE HEBDO – ÉDITORIAL : La justice Thaïlandaise, arme politique fatale
Vous connaissez l’expression « le gouvernement des juges ». Il désigne en général une situation où le pouvoir judiciaire interfère dans le processus démocratique. En Thaïlande, la situation est à la fois analogue et inverse. Les juges interfèrent bien dans le processus politique, mais ils le font sur ordre, en condamnant lourdement les activistes opposés au délit de lèse majesté, et en exonérant de toute charges les manifestants qui, voici quelques années, avaient pris d’assaut les aéroports de Suvanarbhumi et Don Muang, ouvrant alors la voie au verrouillage du royaume par les militaires.
Le gouvernement des juges thaïlandais n’est donc pas une anomalie. Il s’agit d’une méthode, éprouvée de longue date à Singapour pour consolider la main mise du parti au pouvoir : se retrancher derrière la loi et des peines très lourdes, pour éviter l’affrontement direct avec l’opposition et déjouer le résultat des urnes. La justice ne libère pas de l’oppression, comme elle le devrait en théorie. Elle assiste le pouvoir. Les magistrats sont des supplétifs.
Cette arme politique fatale doit bien sûr être replacée dans le contexte thaïlandais. L’indépendance judiciaire à l’occidentale est un concept qui mérite débat. Mais une justice muselée n’est pas bonne pour le pays. Elle mine la confiance dans les magistrats et dans la capacité de ces derniers à juger et à punir sur la base de faits, et non sur ordre. Les Thaïlandais, et surtout la jeunesse thaïlandaise, méritent mieux que des tribunaux transformés en chambres d’enregistrement.