Joko Widodo s’apprête à quitter ses fonctions à l’issue de l’élection présidentielle du 14 février. Normal : à l’issue de deux mandats présidentiels, la constitution de l’archipel interdit au chef de l’État indonésien de se représenter. N’empêche : ce président populaire, parvenu au pouvoir par les urnes, a respecté la règle. Il n’a pas cherché à tordre les institutions. Plus symbolique encore de l’accalmie démocratique indonésienne, le voici engagé aux côtés de celui qu’il avait réussi à battre deux fois : son ministre de la défense Prabowo Subianto, dont le colistier vice-président n’est autre…que le fils de celui que tout le monde, en Indonésie, surnomme « Jokowi ».
Vous me suivez ? Peut être pas et c’est bien normal. Car ce retournement, pour tout dire, est juste incroyable. L’ex général Prabowo, qui fut le gendre de l’ancien dictateur défunt Suharto, incarne tout ce que Joko Widodo a combattu : à savoir l’ordre militaire et la tentation autoritaire. Seulement voilà : dans un mouvement très javanais de cache-cache politique, le chef de l’État sortant a réussi l’incroyable manœuvre de lancer la carrière politique nationale de son fils via son ex adversaire. Pas sûr que les électeurs s’y retrouvent…
La réussite de Jokowi n’en reste pas moins incontestable. A la tête d’un pays immense et volcanique à tous égards (terre de séismes et d’extrémisme islamique), Joko Widodo a réussi à personnifier un État au service de ses citoyens, et à se tenir à l’écart des scandales récurrents de corruption. Aujourd’hui, sa volonté de défendre à tout prix sa famille ternit ce bilan démocratique. Mais dans un monde en convulsions permanentes, l’actuelle stabilité de l’Indonésie est une (trop rare) bonne nouvelle. Gavroche souhaite un bon vote aux 204 millions d’électeurs indonésiens.
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