Dans un entretien accordé à Gavroche, la députée réélue des Français de l’étranger donne les grandes lignes de son prochain mandat.

Vous êtes nettement réélue, un soulagement ?

C’est avant tout une immense fierté et un honneur. Depuis 2017, je suis profondément engagée dans le mandat qui m’a été confié, et il reste encore beaucoup à accomplir. Plusieurs de mes projets en cours ont été interrompus par la dissolution, et il est crucial de les reprendre. Se présenter devant les électeurs n’est jamais une démarche anodine ; cela demande courage et humilité. Je tiens à saluer tous les candidats qui ont défendu leurs convictions avec passion. Maintenant, retour à l’Assemblée nationale, où de nombreux combats sont à mener.

Le RN est battu, pourquoi selon vous ?

Le RN a été défait parce qu’il incarne davantage la colère que les solutions. Son projet manque de clarté et de crédibilité, même pour ses propres candidats. La perspective d’un Jordan Bardella Premier ministre a en réalité révélé à la France entière que le RN n’était pas prêt à gouverner. En témoignent les multiples renoncements programmatiques de ses dirigeants qui n’ont fait qu’accentuer cette perception.

Personne ne comprend ce qu’ils proposent réellement pour la France et l’Europe. Le RN est un parti qui ne travaille pas sérieusement, et cela se voit aussi bien à l’Assemblée nationale qu’au Parlement européen : ils naviguent à vue et finalement n’ont qu’une seule obsession : la préférence nationale. Par ailleurs, il faut noter que de nombreux candidats du RN n’étaient pas à la hauteur de la fonction : propos racistes ou discriminatoires, incompétence, incapacité intellectuelle documentée, implication dans des scandales ont certainement effrayés des électeurs.

Mais surtout, les valeurs du RN ne reflètent pas celles qui unissent et mobilisent les Français. Le RN se heurte à un front républicain qui est beaucoup plus solide que beaucoup ne le pensaient et c’est tant mieux.

Cela dit, il ne faut pas ignorer que leurs électeurs pointent de véritables problèmes, notamment en matière de sécurité, de pouvoir d’achat et d’accès aux services publics. Les partis de gouvernement peinent à apporter des réponses efficaces depuis 30 ans. Nous l’avons fait pour résoudre le chômage de masse dont plus personne ne parle mais j’observe que c’est insuffisant. Nos compatriotes qui choisissent le RN veulent un retour de l’ordre et de l’autorité républicaine partout, ils veulent que le travail paie, enfin ils veulent que les leaders politiques leur montrent un chemin d’espoir. C’est à cela qu’il faut nous atteler en priorité dans les mois à venir.

L’image de la France va sortir renforcée de ces législatives ?

J’ai reçu au lendemain de la dissolution des messages d’inquiétude de représentants de pays de ma circonscription. Mais nous venons de démontrer qu’en France, le pire n’est jamais certain. La vitalité de notre démocratie et notre attachement aux valeurs républicaines en sont la preuve. Cependant, la fragmentation de la scène politique et la montée des extrêmes, à droite comme à gauche, montrent que notre pays traverse une période difficile.

Les campagnes ont été marquées par une dureté et une agressivité inédites. Le RN et la France Insoumise incarnent une période “trumpienne” faite de démagogie et de fake news. Derrière cette situation se cachent des “ingénieurs du chaos” qui ont pour unique objectif de déstabiliser notre démocratie qui au fond, les dérange profondément. Il est crucial que les forces républicaines réagissent en formant une coalition gouvernementale basée sur le consensus plutôt que sur le rapport de forces, avec un programme crédible.

Le Nouveau Front Populaire ne répondra à cette exigence que lorsque ses responsables auront coupé les ponts avec la France Insoumise. Aujourd’hui, le parti de Jean-Luc Mélenchon cannibalise toute la gauche. Le projet de la NFP est absolument chimérique dans un contexte de durcissement de la compétition mondiale et d’une situation financière dégradée. D’ailleurs, nos partenaires européens s’inquiètent que nous puissions prendre cette voie, qui pour répondre directement à votre question, dégraderait inévitablement l’image de la France et nos relations à l’international, à commencer par les pays de la zone euro. Regardez le programme du Labour de Keir Starmer au Royaume-Uni, on est très très loin de l’utopie du NFP et c’est pourtant un programme de gauche !

En revanche, je crois que si les femmes et les hommes de bonne volonté parviennent à s’unir au-delà des clivages partisans et à répondre aux urgences des Français, alors oui, nous pourrons renforcer l’image de la France. Nous pourrons montrer au monde que notre démocratie est mature et inspirante.

Gabriel Attal chef de la majorité, cela va durer ?

Actuellement, nous sommes à la recherche d’une nouvelle majorité car aucun des trois blocs politiques ne l’a obtenue. Votre question soulève deux points essentiels. Premièrement, Gabriel Attal peut-il être le leader du bloc central ? Je le crois fermement et le soutiens activement. Il possède toutes les qualités nécessaires et jouit d’une grande popularité auprès des Français. Son rôle pendant la campagne a été remarquable, permettant au bloc central de faire bien plus que résister.

Deuxièmement, peut-il devenir le chef d’une nouvelle majorité ? Cela semble plus complexe. Avec 158 députés, le bloc central est essentiel pour gouverner, mais la logique politique voudrait que le nouveau Premier Ministre ne soit pas issu de nos rangs. En attendant, les Français peuvent compter sur Gabriel Attal pour gérer les affaires courantes, notamment pendant la période des Jeux Olympiques, si une nouvelle majorité n’est pas trouvée d’ici là.

Quand allez-vous revenir à Bangkok après cette victoire ?

J’aimerais pouvoir vous donner une date précise, mais le calendrier parlementaire reste encore incertain. Dans les 49 pays de la circonscription, cette question m’est posée. Je suis venue en Thaïlande en janvier 2024, et étant la deuxième communauté de notre circonscription, je peux dire avec confiance que je reviendrai au plus tard en 2025. Cette fois-ci, j’aimerais avoir l’opportunité de me rendre dans d’autres régions que Bangkok et de réaliser une véritable tournée en Thaïlande, un projet que j’ai depuis plusieurs années. Cependant, il ne faut pas oublier que les parlementaires doivent aussi être très présents à Paris, où les décisions pour les Français de l’étranger continuent de se jouer dans la capitale.

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