Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
La junte militaire birmane semble déterminée à organiser une élection l’année prochaine, malgré le scepticisme généralisé quant à la possibilité d’un scrutin libre et équitable sous un régime militaire. Cette volonté s’est manifestée par la visite de l’ambassadeur indien au responsable des élections birmanes, l’entretien de l’ancien ambassadeur chinois avec le chef de la junte à ce sujet, et la visite officielle du numéro 2 de la junte en Chine où il a évoqué les préparatifs du scrutin.
Le bras droit de la junte birmane, Soe Win, s’est rendu en Chine pour discuter des préparatifs des prochaines élections et de la sécurité à la frontière. C’était sa première visite officielle en Chine depuis le coup d’État de 2021. Il a rencontré des responsables chinois, dont la vice-présidente de la Commission de bon voisinage, d’amitié et de coopération de l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS). Selon les médias, les discussions ont porté sur la stabilité des frontières, la sécurité des investissements chinois en Birmanie, la lutte contre les escroqueries en ligne, la promotion du commerce et la proposition d’organiser des élections l’année prochaine. La Chine a offert son aide pour la tenue du scrutin.
Le chef de la marine birmane, le vice-amiral Zwe Win Myint, a démissionné à peine six mois après sa nomination. Les raisons de sa démission restent floues. Un officier de la marine a rapporté qu’elle est survenue début juillet et n’a pas encore été officialisée par la junte. Des problèmes de santé semblent peu probables selon la même source. Cette démission intervient dans un contexte difficile pour la marine birmane. Engagée aux côtés de l’armée de terre et de l’armée de l’air dans des bombardements contre des groupes rebelles, notamment dans l’État de Rakhine, la marine n’a pas réussi à inverser le cours de la guerre.
Économie
Le 6 juillet 2024, un protocole d’entente a été signé entre la société locale CAG Engineering Co Ltd, un producteur d’électricité indépendant (IPP) appartenant au groupe de sociétés CAG, et plusieurs sociétés d’experts techniques du secteur électrique thaïlandais, notamment PEA Encom, I Power, R & J, Mega Prime Group et Z Carbon. Cet accord a pour objectif l’exploration et le développement de sources d’énergie renouvelables, incluant le solaire, l’éolien, l’hydroélectricité et le gaz naturel. Il envisage également la production future d’énergie géothermique. CAG se concentre principalement sur le développement de l’énergie solaire, dirigeant actuellement cinq projets solaires d’une capacité combinée de 210 MW. Le premier de ces projets, d’une capacité de 90 MW, a déjà été mis en œuvre dans la zone de Nay Pyi Taw. Des projets futurs sont prévus dans les régions d’Ayeyawaddy (delta), de Mandalay et de Magway (centre du pays), ainsi que dans le sud de l’État Shan (nord-est du pays).
Selon les statistiques du ministère du Commerce, les échanges commerciaux pour le premier trimestre de l’année fiscale 2024-25 (avril-juin) ont diminué de 18% pour atteindre 6,8 milliards USD, avec un excédent commercial de 255 millions USD (3,5 milliards USD d’exportations et 3,3 milliards USD d’importations). Les exportations ont reculé de 6% à 3,5 milliards USD. Les importations ont également diminué de 28%, s’établissant à 3,3 milliards USD. La Thaïlande reste le principal partenaire pour les échanges transfrontaliers avec 737 millions USD, soit une baisse de 57% par rapport à l’année dernière, suivie de la Chine avec 586 millions USD, une baisse de 39%.
Cette semaine, le SAC a convoqué les dirigeants et les directeurs de toutes les banques privées du pays à Naypyitaw, la capitale, pour une réunion destinée à discuter des problèmes bancaires. Le président de la Banque centrale birmane, ainsi que des hauts responsables de la junte et le ministre de l’Intérieur, y participeront également. Cette convocation intervient alors que la Birmanie est frappée par une inflation galopante. La junte a déjà accusé les banques de déloyauté et de ne pas avoir contribué à contrôler la crise économique. Récemment, des cadres de sept banques privées ont fait l’objet de sanctions administratives, et certains ont même été arrêtés. Depuis, les clients des banques signalent des limitations sur les retraits d’argent.
Société/Répression/Conflit
L’armée Arakan (AA) a annoncé la capture de la dernière base de la junte militaire dans la station balnéaire de Ngapali, dans l’État de Rakhine. L’AA a déclaré que des poches de résistance existent toujours parmi les troupes du régime. L’AA affirme avoir capturé le 9 juillet matin le quartier général du 55ème bataillon d’infanterie à Ngapali, s’emparant d’armes et de munitions. Depuis le début de son offensive contre la junte en novembre dernier, l’AA a lancé des assauts sur la ville de Thandwe et revendique la prise de 15 bases et avant-postes du régime, la mort de plus de 400 soldats et sa propre résistance face à de lourdes frappes aériennes. Cependant, les médias Rakhine rapportent des dommages collatéraux sur deux lycées et de nombreuses habitations.
Lors d’une cérémonie organisée par le SAC, un porte-parole du régime a remis des récompenses à des comédiens populaires. Cet événement a été vu par les opposants comme un rapprochement entre la junte et des célébrités complaisantes. En effet, contrairement à d’autres artistes birmans qui se sont opposés au coup d’État militaire de 2021, la plupart des célébrités présentes étaient des sympathisants de la junte. Le célèbre chanteur de rock birman Lay Phyu en est le dernier exemple. Lors d’un spectacle à Naypyidaw, il a plaisanté en disant que “BC” ne signifiait rien pour lui car il ne lisait pas l’anglais. “BC” fait référence au boycott populaire contre le régime, et ses fans lui reprochent de ne pas respecter ce mouvement en se produisant dans la capitale de la junte.
Le régime militaire birman a déclaré le Nouvel An chinois comme jour férié national, alors que les combats reprenaient dans la région nord-est, à la frontière chinoise. Cette décision intervient après des visites récentes à Pékin de l’ancien président Thein Sein et du chef adjoint de la junte, Soe Win. C’est la première fois dans l’histoire de la Birmanie qu’une fête étrangère est officiellement reconnue comme jour férié national, en dehors des fêtes mondiales comme Noël, l’Aïd et le Nouvel An. Auparavant, les jours fériés en Birmanie ne marquaient que des anniversaires religieux ou nationaux, et le Nouvel An traditionnel karen. Les dirigeants successifs de la junte, de Ne Win à Than Shwe, n’ont pas ajouté le Nouvel An chinois au calendrier malgré leurs liens étroits avec Pékin. Le régime a officiellement justifié sa décision en expliquant que le Nouvel An chinois est un jour férié chez les voisins de l’ASEAN et dans de nombreux autres pays du monde.
L’armée de l’État Wa (UWSA) a déployé des troupes dans la ville de Tangyan, dans le nord de l’État Shan, pour empêcher les combats entre le régime birman et l’Alliance de la Fraternité de s’étendre à la ville. Cette décision fait suite aux appels des habitants de Tangyan qui craignent d’être pris au piège des combats entre l’armée birmane et les groupes armés ethniques alliés dans la région. L’UWSA, qui jouit d’une large autonomie vis-à-vis du régime birman depuis un cessez-le-feu conclu en 1989, a négocié son déploiement à Tangyan avec la junte. L’arrivée de l’UWSA à Tangyan intervient alors que l’Alliance de la Fraternité, composée de plusieurs groupes ethniques armés dont l’Armée nationale de libération Ta’ang (TNLA), a intensifié ses attaques contre le régime dans le nord de l’État Shan. L’UWSA avait déjà pris le contrôle de deux villes de la région plus tôt cette année, suite à une offensive de l’Alliance de la Fraternité.
Une centaine de soldats et gardes-frontières birmans ont fui au Bangladesh le 11 juillet dernier après avoir été défaits par l’armée Arakan dans l’État de Rakhine. Les autorités bangladaises ont pris en charge ces militaires birmans. Ce n’est pas la première fois que des soldats birmans fuient au Bangladesh. Depuis février, plus de 750 militaires et leurs familles ont traversé la frontière. Le Bangladesh a demandé à plusieurs reprises à la junte birmane de prendre des mesures pour empêcher ces arrivées. Cependant, le Bangladesh a empêché l’arrivée de civils Rohingyas fuyant les violences au même moment. Le rapporteur spécial des Nations Unies sur les droits humains en Birmanie a soulevé des inquiétudes concernant ces refoulements présumés et le rapatriement des réfugiés Rohingyas vers la Birmanie.
Tourisme, Culture
Bagan, la ville des temples birmans, est un îlot de sérénité au milieu de la guerre civile qui sévit dans le pays. Cependant, le manque de touristes dû au conflit plonge la population locale dans la difficulté. Cette ville inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO était devenue une destination touristique prisée après la fin de plusieurs décennies de régime militaire en 2011. La Birmanie avait alors attiré des voyageurs en quête d’une destination alternative aux sentiers battus de l’Asie du Sud-Est. Mais la pandémie de coronavirus a porté un coup dur à l’industrie touristique, puis le coup d’État militaire de février 2021 a déclenché des conflits dans de nombreuses régions du pays. Le nombre de visiteurs internationaux a chuté drastiquement. On en dénombrait 3,4 millions en 2016, contre seulement 200 000 en 2022 selon le ministère du tourisme. De nombreux hôtels et restaurants sont fermés, et les guides et vendeurs se retrouvent sans emploi. La situation est d’autant plus inquiétante que des combats sporadiques ont lieu de l’autre côté de la rivière Irrawaddy, semant la peur parmi la population.
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