Par Ioan Voicu, ancien Ambassadeur de Roumanie en Thaïlande
Les lecteurs du magazine Gavroche ont la possibilité d’obtenir une image détaillée de l’ASEAN en consultant un livre récent intitulé Indonesia’s International Economic Strategies signé par Kiki Verico du Département d’économie de l’Université d’Indonésie Depok. Cet ouvrage compte 314 pages et est paru en 2024 sous la maison d’édition Palgrave Macmillan à Singapour.
Kiki Verico est également l’auteur du livre The Future of The ASEAN Economic Integration, publié par Palgrave Macmillan au Royaume-Uni en 2017.
Le volume en cours d’examen intitulé Indonesia’s International Economic Strategies comporte 10 chapitres bien documentés, des bibliographies et un index détaillé.
Les chapitres traitent des sujets suivants : le chapitre 1 contient une introduction générale ; le chapitre 2 traite des effets cicatriciels de la pandémie mondiale et de l’économie indonésienne ; le chapitre 3 est intitulé Ouverture économique pour la transformation économique ; Le chapitre 4 porte sur l’analyse du réseau bilatéral de commerce et d’investissement de l’Indonésie ; le chapitre 5 est consacré à l’analyse des impacts de l’accord de partenariat économique global bilatéral (CEPA) ; le chapitre 6 traite de l’optimisation des avantages du CEPA bilatéral : l’Indonésie avec l’Australie et la République de Corée ; le chapitre 7 traite des principes d’intégration économique de l’ASEAN : ouvert, inclusif et convergent ; le chapitre 8 est intitulé Maintenir la paix et la prospérité de l’Indo-Pacifique ; le chapitre 9 porte sur le choix de la bonne coopération économique mégarégionale. Enfin, le chapitre 10 contient la conclusion générale.
L’Indonésie est le plus grand membre de l’ASEAN et sa population actuelle est de 283 963 320 au mardi 17 septembre 2024, selon l’élaboration par Worldometer des dernières données des Nations Unies. La population indonésienne équivaut à 3,47 % de la population mondiale totale.
La population actuelle de l’Asie du Sud-Est est de 696 189 126 habitants selon les dernières estimations des Nations Unies, ce qui équivaut à 8,52 % de la population mondiale totale.
Une institution régionale prometteuse
Pour des raisons d’espace, cette brève chronique se concentrera sur l’ASEAN mentionnée dans tout le volume 682 fois dans les contextes les plus divers.
Les premières références substantielles à l’ASEAN sont contenues dans l’introduction générale dans laquelle l’auteur explique clairement la forte relation entre l’Indonésie et l’ASEAN à laquelle elle fournit un siège général à Jakarta. Il est rappelé que le premier et nécessaire fondement de l’ASEAN, appelé Traité d’amitié et de coopération (1976), est né au cours du sommet de l’ASEAN à Bali et connu sous le nom de Bali Concord I.
Ce fondement garantit le principe de libre coopération économique des États membres de l’ASEAN avec tous les pays sans discrimination. Les deuxième et troisième principes sont classés comme conditions suffisantes d’ouverture et de convergence. Le principe d’ouverture devient le fondement de base de la communauté économique, et la convergence est la base du Marché commun de l’ASEAN. Les principes d’ouverture et de convergence sont tous deux nés au cours de la présidence de l’ASEAN par l’Indonésie en 2003 et 2011, connus respectivement sous les noms de Bali Concord II et Bali Concord III. (p. xvii)
L’ASEAN est décrite comme étant actuellement en train de se transformer structurellement, passant de la libre circulation des échanges à la libre circulation des investissements. Avec ses principes souples et ouverts, elle est apte à s’adapter à la communauté économique. L’Indonésie soutient l’ASEAN avec son esprit de centralité pour adopter un autre principe nécessaire intitulé le principe inclusif. Ce principe contribue à garantir la stabilité économique dans un contexte d’incertitude géopolitique. Ce principe inclusif met l’accent sur l’ASEAN en tant que région inclusive et est libre de choisir la coopération économique avec n’importe quel partenaire, quel que soit son système politique. (p.185)
L’Indonésie a assuré la présidence de l’ASEAN en 2023, juste après avoir assuré la présidence du G20 en 2022. Il est souligné que, historiquement, l’Indonésie a contribué à l’ASEAN. L’ASEAN détient un régionalisme souple et ouvert qui correspond aux principes de neutralité du mouvement de non-alignement , qui a été initié par les pays sous-colonisés d’Asie et d’Afrique. Ce régionalisme ouvert a permis à l’ASEAN d’élargir sa coopération régionale avec les non-membres de la Chine, du Japon, de la République de Corée, de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et de l’Inde. L’Indonésie a laissé un héritage historique à chaque fois qu’elle a présidé l’ASEAN. (p. 186)
Le principe de régionalisme ouvert de l’ASEAN repose sur son esprit de centralité qui permet à l’ASEAN de se présenter comme une seule identité avec un objectif convergent. (p. 187)
L’Indonésie a eu le bon moment pour proposer le principe inclusif de la stabilité géopolitique et du développement de l’économie numérique lors de sa présidence de l’ASEAN en 2023. Le principe inclusif et totalement ouvert est nécessaire, la convergence économique étant suffisante. (p. 188)
L’auteur du livre a des attentes optimistes. Il écrit : « Pour que l’Asie du Sud-Est devienne une région solide, le capital humain est nécessaire pour établir un environnement technologiquement favorable, soutenant l’engagement de l’ASEAN envers le développement durable et les actions de croissance axées sur l’environnement. Cette productivité humaine et l’orientation de la croissance axée sur l’environnement sont essentielles pour la transition énergétique de l’Asie du Sud-Est d’une énergie non renouvelable à une énergie renouvelable et respectueuse de l’environnement.
Le bloc de l’ASEAN doit être prudent dans le choix de ses principes… des principes souples, ouverts et inclusifs sont nécessaires avec la convergence économique comme condition suffisante. “L’ASEAN adopte une approche pragmatique améliorant son économie du commerce intrarégional à l’investissement intrarégional. L’ASEAN, avec son ASEAN Way, encourage les optimistes à avoir une intégration économique régionale solide et à aller de l’avant pour parvenir à une coopération économique régionale globale. » (p. 206)
Le dernier paragraphe du dixième chapitre de conclusion du livre mérite d’être reproduit expressis verbis car il clarifie la conception globale du livre. Il dit : « Du point de vue de l’ASEAN, un régionalisme ouvert et souple est nécessaire, et la convergence économique et la centralité sont suffisantes. Ces principes doivent fonctionner ensemble car un régionalisme ouvert et souple sans centralité de convergence économique peut conduire à une divergence économique et à une intégration économique fragile.
En revanche, la convergence-centralité sans régionalisme ouvert-doux peut entraver l’intégration économique et restreindre les progrès commerciaux intra-ASEAN”.
La nature hautement technique de ce livre brièvement commenté en fait un ouvrage intéressant pour une revue spécialisée qui saura mettre en lumière l’originalité d’une analyse inspirée de la doctrine indonésienne de coopération régionale qui pourrait avoir la chance d’influencer la pensée économique des neuf autres membres de l’ASEAN qui, pour des raisons politiques, peuvent avoir des nuances importantes à ajouter au tableau général de l’ASEAN et de son avenir tel que proposé par Kiki Verico.
En conclusion générale après avoir lu l’ouvrage de Kiki Verico, on peut affirmer que l’ASEAN est un modèle remarquable de coopération régionale, favorisant la paix, la stabilité et la croissance économique entre ses dix États membres. Sa force collective réside dans sa capacité à promouvoir la solidarité, à maintenir un dialogue diplomatique permanent, à gérer les différends et à pratiquer un ordre régional équilibré au milieu des changements de pouvoir mondiaux.
En ce qui concerne l’avenir, le potentiel de l’ASEAN à renforcer l’intégration régionale réussie, à adopter la transformation numérique et à mener l’action climatique est prometteur. Avec une population jeune et des économies en croissance, l’ASEAN est bien placée pour consolider sa position d’acteur clé du commerce mondial et de la géopolitique, façonnant un avenir résilient et dynamique pour l’Asie du Sud-Est.
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