Une chronique siamoise de Patrick Chesneau
Grandiose, grandiloquente, somptueuse. En ce dernier dimanche du mois d’octobre, l’atmosphère était à l’hyperbole dans le récit officiel. Bénéficiant d’un temps clément, pas une seule goutte de pluie, la procession des Barges Royales a tenu toutes ses promesses.
Sur l’imposant fleuve Chao Phraya, irriguant une histoire épique depuis la période Ayutthaya, cinquante deux embarcations tout droit sorties des tréfonds de la mythologie thaïe ont entamé un pèlerinage haut en couleurs. A bord de la plus prestigieuse des embarcations, la barge Supannahong, le Roi de Thaïlande, accompagné de la Reine, a conféré d’emblée un lustre d’exception à un événement aussi somptueux.
Faste digne des grands épisodes de l’épopée nationale
Cérémonie rehaussée par des chants et des psalmodies enrobant l’ensemble du quartier Rattanakosin, berceau historique de la capitale. De part et d’autre du ruban liquide traversant la Cité des Anges, l’air s’est chargé de mélopées instinctivement signifiantes pour tous les sujets du Royaume. Accents pourtant ésotériques aux oreilles du profane. Litanie ritualisée, codifiée, à l’ordonnancement millimétré, empreinte d’une solennité dont la vertu immédiate était de galvaniser les deux mille rameurs à la manœuvre. Effort titanesque.
Encouragés par une foule venue nombreuse tout au long du parcours. Des milliers de fidèles se sont massés sur les gradins disposés sur les deux rives. Beaucoup, entièrement vêtus de jaune, acclamaient Sa Majesté Rama X tandis que son épouse repoussait les assauts d’une chaleur moite à l’aide d’un éventail.
Les monarques se sont rendus au Wat Arun Ratchawararam pour la cérémonie Kathin, occasion d’accomplir un mérite royal. Le rituel, correspondant à la quintessence de la tradition bouddhiste, consiste à offrir aux bonzes de nouvelles robes.
Spectacle pittoresque aux allures de voyage dans le temps. La force collective des Thaïlandais est de faire exister le passé dans le présent. De fait, des pans entiers d’une culture ancestrale sont maintenus extraordinairement vivaces. On est bien au-delà de la magnificence. Cette perpétuation de coutumes séculaires subjugue toutes les rétines. D’ici et d’ailleurs. Bien au-delà de la contemplation de tant de splendeurs rassemblées, les Thaïlandais ont participé à la glorification d’un passé magistralement recomposé.
Patrick Chesneau
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