En Australie, les saveurs des plats laotiens, une chronique culinaire et sociétale de Francois Guilbert
Comme bien des ouvrages consacrés à la cuisine du Cambodge, du Laos et du Vietnam, l’autrice est issue de l’émigration indochinoise du dernier quart du XXème siècle. Après avoir trouvé refuge en Australie, à Albury (New South Wales) d’abord, en Tasmanie ensuite, la famille s’est installée in fine à dans l’État de Victoria.
Diplôme d’architecture en poche, Sam Sempill s’est lancée à vingt ans en 2001 dans l’aventure de la restauration à Fitzroy, la banlieue bohème de Melbourne. Là, elle mène plusieurs vies professionnelles dont celle de cheffe et propriétaire de son établissement. Une histoire de famille toutefois. Elle cuisinait alors avec sa mère et sa grand-mère. Elles y voyaient ensemble un moyen d’entretenir leurs racines mais aussi une source de partage, une expression de leur affection à leur pays d’adoption via la clientèle chaleureusement accueillie.
N’ayant pas de formation cuisinière autre que celle prodiguée par ses aînées, l’aventure de restauratrice dura cinq ans et demi. Jonglant avec les horaires et plusieurs métiers, elle décida voici une dizaine d’années de se consacrer pleinement au travail auquel sa formation dans l’enseignement supérieur la destinait : l’architecture d’intérieur. Celui-ci ne lui fit d’ailleurs pas totalement abandonner ses liens avec le Laos tant Mme Sempill est littéralement fascinée par les textiles de son pays d’origine. Cette passion on la retrouve d’ailleurs, aujourd’hui, dans ce livre de recettes.
Mis en bonne place sur des murs, les tissus illustrent quelques-unes des pages du manuscrit. Ils donnent, comme plusieurs crayonnés et clichés familiaux, des couleurs chaudes, intimistes même au récit de vie et au parcours culinaires proposé à la réalisation. Ce livre est une ode au passé, celui de la jeunesse de l’autrice, mais plus encore de son amour pour ses ascendants, celui qu’ils ont transmis au travers de leurs bons petits plats voire de leur emploi immodéré de l’aneth. Cet ouvrage est, pour tout dire, inspiré. Il plonge ses racines dans le riche patrimoine lao et celui de la famille de la narratrice. Cette dernière n’en prend pas moins soin à expliquer chacun de ses choix de recettes : des toasts à la française (Koa Chee Falung) à la soupe au jarret de porc Hmong (Geang Kar Moo), en passant par la fabrication des saucisses de porc de Luang Prabang.
En neuf chapitres (réalisations de base, sauces, plats fumés, bouillis, sautés, grillés, à la vapeur, salades, desserts), Sam Sempill décrit la méthode de réalisation d’une cinquantaine de plats. Un judicieux index par produits a été ajouté. Et, c’est un vrai plus. Avec une centaine d’entrées, il permet d’aller directement à la recette lorsqu’un produit vous tente tout particulièrement. Cette construction éditoriale s’avère bien pratique pour se faire plaisir sur un coup de tête et ainsi réaliser et découvrir un plat jusqu’ici (peu) connu.
Sam Sempill : Eat Lao, Recipes from Lao Kitchen, M Melbourne Books, Melbourne Books, 2023, 231 p, 41,5 €
François Guilbert
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