Chaque semaine, notre ami Richard Werly, conseiller éditorial de la rédaction de Gavroche, partage sa vision de la France sur le site d’actualités helvétique Blick. Vous pouvez vous abonner ou consulter sa lettre d’information Republick.
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La semaine prochaine, c’est depuis la France que j’écrirai cet édito de Republick. Mais pour le moment, c’est de Brownsville, au Texas, que je regarde Paris avant de retraverser l’Atlantique en fin de semaine. Si Brownsville ne vous dit rien, regardez sur une carte. Coincée entre le golfe du Mexique et le Rio Grande, le fameux fleuve frontière, c’est là que le conquérant déclaré de la planète Mars, à savoir Elon Musk, a décidé d’implanter Starbase, la plateforme de lancement de ses fusées Starship. Elon Musk, ou la marque des États-Unis de 2024 derrière Donald Trump. Du génie. Une détestation insupportable et redoutable de l’État. Une avalanche de dollars qui redonne au pays le plus puissant du monde l’ambition folle de coloniser d’autres planètes. Dangereux Musk ? Évidemment. Mais quel allié de poids pour Trump !
Pourquoi penser, alors, à la mine chaque jour plus défaite de Michel Barnier, ce Premier ministre chargé d’une mission impossible, tant l’équation parlementaire du budget 2025 semble sans solution ? Parce que la force de Trump est d’avoir trouvé en Elon Musk un accélérateur d’ambition sans pareil. Qui sait si leur partenariat sera durable ? Mais en forgeant ce tandem avec l’homme le plus riche du monde, le président élu des États-Unis a, pour l’heure, touché le jackpot. Imaginez la même chose en France. Imaginez Michel Barnier, le Savoyard patient, épaulé par un nouveau Jules Verne. Du rêve. De l’aventure. De l’impossible qui deviendrait possible. Vous connaissez la formule d’un western fameux: « Si la légende est mieux que la réalité, imprimez la légende. » Le premier de cordée Barnier, ces temps-ci, a sacrément besoin d’une légende pour réécrire l’histoire.
Bonne lecture, sans oublier la face sombre de la Lune!
(Pour débattre : richard.werly@ringier.ch)
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Notre éditorialiste aurai-il été conquis, converti plutôt, à la nouvelle religion muskienne à Mar Lago ? La souhaiter pour M. Barnier ? Dieu ne plaise ! Mais comme les répliques venues des Amériques se manifestent en France avec quelques décalages horaires on peut craindre une propagation du miracle et bien au delà de l’hexagone ; une sili-conisation du monde annoncée et programmée et l’avènement de l’anti-humanisme.
Les gesticulations faustiennes muskiennes nous annoncent la subversion des technologies de l’exponentiel” vouées à racheter toutes nos insuffisances humaines, lestées qu’elles sont par le péché originel. L’intelligence artificielle et ses béquilles technologiques, l’homme augmenté sont en voie de préparation d’un monde, et pas seulement terrestre, ,réduit à une cible continuellement marchande instantanée , assaillie par les offres automatisées et hyper personnalisées de l’humanisme radical c’est à dire de l’anti-humanisme. L’avènement d’une société hygiéniste, “parfaite” et sans défaut ; Une humanité perpétuelle d’au delà de la mort, une humanité hors du temps et de l’espace.
Musk et Trump, le jeune allié avec le vieux dans un couple du futur qui aurait dépassé les frontières des âges, nous montrent un horizon que l’on a quelque peine a qualifier d’avenir,. Un futur sur le mode hyper-décomplexé, illustré par les acrobaties communicationnelles et puériles, duquel tous les intermédiaires auraient disparu. Une apologie de la transparence intégrale.
En fidèle “agrarien”, nommé à une mission centrale, visant à éradiquer la bureaucratie et promouvoir l'”efficacité des affaires publiques” au dessus des secrétariats d’État traditionnels, l’objectif Trump/Musk est de se débarrasser de tous les facteurs d’inertie que le marché pourrait encore comporter. Au diable les régulations, au diable l’État fédéral, feu sur Washington, et les institutions…pour résumer l'”État profond” et ses “élites” au profit d’un lien direct instantané avec le “peuple” enfin retrouvé, l’Amérique” éternelle. Une décontamination “à la “hache” ou la “tronçonneuse” façon Javier Millei.
Comme dans les récits kafkaiens, ne sachant plus ou se trouvent les interlocuteurs , le spectre de l’hyperbureaucratie affolée et radicalisée risque de se manifester dans ses formes les plus absurdes et les plus inhumaines. Au contraire d’une fluidité généralisée des choses que les technologies muskiennes seraient censées instaurer, les nécroses ne manqueront pas d’apparaitre facilitées dans leur prolifération, par l’intelligence artificielle. L’avènement de la “technocratie algorithmique”? Un monde glacial, sans corps après avoir été vidé de son corps…
Un horizon que semble appeler de ses vœux notre éditorialiste peut-être converti et nouveau coreligionnaire à force de boire les eaux de Mar Lago ?
La lecture de quelques ouvrages de E. Sadin nous éclaire : “La siliconisation du monde ( 2016) ; “L’ère de l’individu Tyran” (2020) ; “La vie spectrale” 2023)