Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
Face à la dégradation de la situation sécuritaire en Birmanie, la Chine a décidé de s’impliquer plus directement en soutenant le régime militaire. Cette implication, notamment à travers la création d’une co-entreprise sino-birmane, suscite de nombreuses interrogations. Alors que Pékin justifie cette intervention par des raisons de sécurité, les observateurs craignent que la Chine ne cherche en réalité à protéger ses intérêts économiques, notamment en matière d’exploitation des ressources naturelles. Cette posture agressive risque d’alimenter les tensions avec la société civile birmane et d’inquiéter les pays voisins. En soutenant sans réserve le régime militaire, la Chine pourrait à terme compromettre ses intérêts à long terme en Birmanie et dans la région.
Le vice-président de la Douma d’État russe, Sholban Kara-Ool, s’est rendu à Naypyidaw pour exprimer le soutien de la Russie à la “transition politique” de la Birmanie et discuter des préparatifs électoraux, y compris l’invitation d’observateurs russes. Un protocole d’accord a été signé entre les commissions électorales des deux pays. Parallèlement, Kara-Ool a rencontré Khin Yi, président du parti Union Solidarité et Développement (USDP), un parti fantoche de la junte. Ils ont discuté de la promotion des relations entre la Russie et la Birmanie ainsi que de la coopération entre l’USDP et le parti Russie Unie.
Depuis février 2022, plus de 1 800 personnes ont été arrêtées pour avoir exprimé leur opposition au régime et soutenu le mouvement de résistance. Les autorités militaires ont mis en place des mesures de surveillance strictes, notamment en bloquant l’accès aux réseaux sociaux et en surveillant les activités en ligne. Les personnes arrêtées sont souvent accusées d’incitation, de propagande ou de trahison. Ces arrestations et la surveillance accrue ont créé un climat de peur et d’autocensure parmi la population. De nombreux citoyens ont dû fuir leur domicile ou prendre des mesures extrêmes pour protéger leur identité en ligne.
L’Armée nationale démocratique birmane (MNDAA) a annoncé un cessez-le-feu unilatéral avec le régime militaire, tout en exprimant son engagement à participer aux négociations de paix supervisées par la Chine. Cette décision fait suite à l’arrestation de son chef, Peng Daren, par les autorités chinoises. La MNDAA a également exigé l’arrêt des attaques aériennes et des offensives du régime, tout en précisant qu’elle se réserve le droit de se défendre militairement durant les négociations. Cette initiative est influencée par la pression de la Chine, désireuse de stabiliser la région frontalière et de protéger ses intérêts économiques.
Économie
En novembre 2024, l’indice PMI de S&P Global a enregistré une légère amélioration, atteignant 49,8 contre 48,4 en octobre, bien qu’il reste inférieur à 50 pour le cinquième mois consécutif. Les nouvelles commandes ont augmenté pour la première fois en cinq mois, stimulant ainsi la production. Toutefois, l’activité d’achat a continué de se contracter pour le 17e mois, bien que la baisse ait été la plus faible observée depuis six mois. Les suppressions d’emplois se poursuivent pour le 18e mois, avec une accélération depuis août. Les retards dans les carnets de commandes restent élevés mais ont ralenti, atteignant leur niveau le plus bas depuis 15 mois. Les fournisseurs ont rencontré des difficultés en raison de pénuries de matériaux et de problèmes d’importation. Enfin, la baisse du taux de change du kyat par rapport au dollar américain a contribué à atténuer l’augmentation des coûts des matières premières et du transport.
Lors de la réunion du budget supplémentaire pour l’exercice 2024-25 (avril-mars), la Birmanie a approuvé des dépenses supplémentaires atteignant plus de 2000 milliards de MMK (environ 1 milliard USD), portant le total des dépenses à plus de 41 000 milliards de MMK (20 milliards USD). Les recettes estimées pour cette période s’élèvent à plus de 35 000 milliards de MMK (17 milliards USD), entraînant un déficit budgétaire d’environ 7 000 milliards de MMK (3 milliards USD). Les dépenses pour cet exercice connaîtront une augmentation significative de 37 % par rapport à l’exercice précédent. Les fonds supplémentaires seront principalement alloués à la défense et à la sécurité, tandis que les dépenses pour l’éducation et la santé seront réduites. La défense représente plus de 30 % du budget total, en raison notamment du recrutement de conscrits, de l’augmentation de la production d’équipements militaires et de l’achat de pièces détachées pour les avions et hélicoptères.
Société/Répression/Conflit
Le régime militaire birman a affirmé que son attaque contre une flottille de pêche thaïlandaise dans la mer d’Andaman était justifiée car les bateaux thaïlandais auraient enfreint ses eaux territoriales. Cependant, la Thaïlande conteste cette version des faits, affirmant que ses bateaux de pêche n’ont pas pénétré illégalement dans les eaux birmanes. L’incident a entraîné la mort d’un pêcheur thaïlandais et des blessures à deux autres. La Thaïlande a exigé une enquête approfondie de la part de la Birmanie et la libération des marins thaïlandais détenus. Le gouvernement thaïlandais a également appelé à une résolution pacifique du conflit et à la prévention de futurs incidents similaires.
Le régime militaire birmane a renforcé les mesures de sécurité autour des cérémonies de remise de diplômes à l’Académie des services de défense (DSA) et à l’Académie technologique des services de défense (DSTA) de Pyin Oo Lwin. Le général Ko Ko Oo, commandant des opérations spéciales de la junte, supervise personnellement ces mesures. Des sources locales rapportent que des checkpoints ont été installés autour de la ville, et que des drones et des hélicoptères patrouillent la zone. Ces mesures de sécurité accrues sont liées aux attaques récentes contre des cibles militaires, notamment une attaque à la roquette contre un convoi transportant Min Aung Hlaing.
La Birmanie cherche à renforcer ses alliances et à stimuler son économie en relançant de grands projets d’infrastructure chinois, suspendus après le coup d’État. Lors d’une récente visite en Chine, Min Aung Hlaing a évoqué la reprise de projets majeurs, dont la ligne ferroviaire Muse-Mandalay et la Nouvelle Ville de Rangoun. Ce projet, soutenu par des entreprises chinoises, soulève des préoccupations concernant les investissements colossaux nécessaires, l’impact environnemental d’une zone inondable et l’aggravation de la dette extérieure, déjà affectée par les sanctions internationales. De plus, il pourrait accroître l’influence de la Chine en Birmanie, au détriment d’autres puissances régionales. Malgré ces enjeux, le régime semble déterminé à poursuivre, percevant ces projets comme un moyen de légitimer son pouvoir et de redynamiser l’économie.
L’Armée Arakan (AA) a annoncé avoir pris le contrôle de plusieurs positions militaires du régime birman dans l’État de Rakhine, notamment des bases et des postes de commandement importants. Les combats se sont intensifiés dans plusieurs régions de l’État, notamment dans les townships d’Ann, Taungup, Gwa et Maungdaw. L’AA a infligé des pertes à l’armée birmane, tuant des dizaines de soldats et capturant de nombreux équipements militaires. Le groupe armé a également réussi à couper les lignes d’approvisionnement du régime.
La ville de Kyaukphyu, dans l’État de Rakhine, est confrontée à une grave pénurie de nourriture et de médicaments en raison du blocus imposé par la junte militaire birmane. Cette situation est exacerbée par les affrontements entre l’armée birmane et l’Armée Arakan (AA), qui se rapproche de la ville. La junte militaire cherche à protéger les intérêts chinois dans la région, notamment le projet de la Zone économique spéciale de Kyaukphyu, un important point de passage pour les pipelines de gaz et de pétrole reliant la Birmanie à la Chine.
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