La politique est l’art du pouvoir. C’est surtout l’art des rapports de force. Les rumeurs de plus en plus insistantes à Bangkok sur un possible retour au pays de l’ancien premier ministre et milliardaire Thaksin Shinawatra, en exil depuis la fin 2008 méritent d’être étudiées dans ce contexte. Âgé de 71 ans, ce dernier peut bien sûr toujours rêver de reprendre les commandes du pays. Mais vu la main mise actuelle de l’armée, cela parait presque impossible. D’où l’hypothèse d’un compromis: un retour de Thaksin avant tout destiné à faire diversion à l’heure du mouvement étudiant pro-démocratie…
Résumons: le septuagénaire Thaksin Shinawatra n’a plus les moyens, à priori, de reprendre le pouvoir à Bangkok. Mais il continue de contrôler une large partie du personnel politique, notamment le parti d’opposition Pheu Thai aujourd’hui bousculé par l’ex «parti de l’avenir» (Future Forward) et les manifestations de la jeunesse pro-démocratie.
Quoi de mieux, dès lors, pour le pouvoir en place, dominé par les militaires thaïlandais, qu’une remise en selle de cet homme capable de rallier les masses populaires mais encore à la tête de très importants intérêts financiers dans le royaume ? Le calcul peut paraitre byzantin, voire machiavélique. Mais l’histoire thaïlandaise est riche en pareils rebondissements.
Et si Thaksin devenait, demain, le meilleur allié de l’establishment politico-militaire avant tout soucieux d’endiguer la colère d’une jeunesse urbaine difficile à contrôler, tout en donnant des gages démocratiques via de possibles amendements de la constitution. Place à la négociation. En surface et en coulisses. Évidemment sous le regard du Palais Royal.
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