Alors que la banque américaine Goldman Sachs a décidé le 22 octobre de plaider coupable dans ses agissements en Malaisie et de verser d’énormes indemnités aux autorités malaisiennes, Gavroche reproduit ici le témoignage du banquier en fuite Jho Low, cerveau présumé du scandale de corruption de plusieurs milliards de dollars qui a secoué son pays. Il avait été interviewé début 2020 par le Straits Times de Singapour.
Dans une interview accordée au Straits Times, de Singapour, le financier Jho Low avait alors minimisé son rôle dans le scandale 1Malaysia Development Berhad (1MDB), se décrivant comme un “intermédiaire” recherché pour ses “bonnes relations avec des hommes d’affaires et des décideurs étrangers influents”.
“Les gens et les entreprises agissent tout le temps comme des introducteurs ou des intermédiaires. Ce n’est pas une situation unique”, expliquait il. La localisation exacte de Low, dont le nom complet est Low Taek Jho, reste inconnue. Il a réalisé l’interview avec le Straits Times par e-mail.
Une caisse noire
Les procureurs américains ont allégué que Low et d’autres ont utilisé la 1MDB comme une caisse noire, au lieu de son but prévu qui était d’aider à développer l’économie de la Malaisie et…ils ont fini par conclure un accord avec lui pour incriminer Goldman Sachs. Les procureurs et les représentants affirment que des milliards de dollars ont été détournés dans l’escroquerie mondiale, avec des millions qui auraient été dépensés en sacs à main et bijoux de luxe, un film à succès, un appartement chic à New York, un yacht de 250 millions de dollars, un Picasso, et des fêtes et cadeaux pour les amis célèbres de Low.
Low, 38 ans, a déclaré dans l’interview qu’il est “une cible facile” par rapport aux institutions financières, aux entreprises et aux conseillers mondiaux liés au système. Ces institutions, a-t-il dit, portent la responsabilité ultime de toutes les transactions liées au scandale de la 1MDB.
En août dernier, la Malaisie a porté plainte contre 17 employés actuels et anciens de Goldman Sachs (GS), dont le plus haut dirigeant international de la banque. Le gouvernement malaisien a accusé Goldman Sachs et certains de ses banquiers d’avoir trompé les investisseurs au sujet de trois ventes d’obligations pour 1MDB et d’avoir détourné frauduleusement des milliards de dollars du produit de ces ventes. Goldman Sachs a accepté le 22 octobre de payer plusieurs centaines de millions de dollars de pénalités.
Goldman trompée par des employés malhonnêtes
La banque avait jusque-là nié à plusieurs reprises avoir commis des méfaits et avait affirmé avoir été trompée par des employés malhonnêtes qui ont intentionnellement trompé ses équipes juridiques et de conformité.
Tim Leissner, l’ancien président de Goldman pour l’Asie du Sud-Est, avait en revanche plaidé coupable en 2018 de conspiration pour voler l’argent du fonds d’investissement d’État. Il a blâmé une “culture” chez Goldman qui, selon lui, encourageait les cadres à contourner l’équipe juridique pour marquer des points.
En octobre dernier, M. Low a conclu un accord de 700 millions de dollars avec le gouvernement américain pour mettre fin à une procédure judiciaire contre lui. L’accord, qui couvre des actifs situés aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Suisse, représentait la plus grande confiscation civile jamais obtenue par le ministère, et le plus grand recouvrement à ce jour dans le cadre de la Kleptocracy Asset Recovery Initiative.
Pas d’aveu de culpabilité
Dans une déclaration faite par l’intermédiaire de ses avocats à l’époque, M. Low a déclaré que “l’accord ne constitue pas un aveu de culpabilité, de responsabilité ou de toute autre forme d’acte répréhensible de ma part ou de celle des propriétaires des actifs”.
Low fait toujours face à des accusations criminelles en Malaisie, ainsi qu’à des accusations fédérales à New York pour conspiration de blanchiment de milliards de dollars détournés de la 1MDB et pour conspiration de violation de la loi sur les pratiques de corruption à l’étranger en versant des pots-de-vin à divers fonctionnaires malaisiens et d’Abu Dhabi.
Le scandale de la 1MDB a également contribué à faire tomber l’ancien Premier ministre malaisien Najib Razak, qui a été frappé par des dizaines d’accusations de corruption dans cette affaire. Son procès en Malaisie est en cours, et il a plaidé non coupable.
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