Selon l’organisation de défense des droits de l’homme Amnesty International, les autorités cambodgiennes doivent redoubler d’efforts pour enquêter de manière approfondie, indépendante et impartiale sur la disparition du dissident thaïlandais Wanchalearm Satsaksit et déterminer son sort et le lieu où il se trouve.
Le militant thaïlandais de 37 ans a été enlevé par des inconnus devant un immeuble d’habitation à Phnom Penh le 4 juin dernier. Il était auparavant recherché par les autorités thaïlandaises pour avoir exprimé des critiques à l’égard du gouvernement thaïlandais.
Sitanun Satsaksit, la soeur de Wanchalearm, est interrogée par un juge d’instruction au tribunal municipal de Phnom Penh aujourd’hui dans le cadre de l’enquête en cours des autorités cambodgiennes sur cette affaire.
Progrès négligeables
Plus de six mois après sa disparition, les autorités cambodgiennes n’ont fait que des progrès négligeables dans l’enquête, malgré les preuves importantes qui ont été rendues publiques dans les mois qui ont suivi. À ce jour, le sort de Wanchalearm et le lieu où il se trouve restent inconnus.
“Jusqu’à présent, les insuffisances flagrantes de cette enquête tournent en dérision les obligations du Cambodge de mener une enquête approfondie, impartiale et indépendante”, a déclaré Yamini Mishra, directrice régionale d’Amnesty International pour l’Asie et le Pacifique.
A pas de tortue
“L’enquête a avancé à pas de tortue et des preuves essentielles semblent avoir été ignorées. Les autorités cambodgiennes doivent montrer qu’elles mènent une enquête crédible, faute de quoi des questions sérieuses seront posées sur leur bonne foi”, a déclaré Yamini Mishra, directrice régionale d’Amnesty International pour l’Asie et le Pacifique.
Amnesty International demande aux autorités cambodgiennes de remédier d’urgence aux échecs apparents de l’enquête à ce jour, de divulguer immédiatement toute information qu’elles pourraient avoir sur le sort de Wanchalearm et sur l’endroit où il se trouve, et de garantir la vérité, la justice et des réparations pour Wanchalearm et sa famille.
Le fait que les autorités cambodgiennes n’aient pas suffisamment progressé dans l’enquête remet en question leur respect de la Convention sur les disparitions forcées (CED), à laquelle le Cambodge est partie.
Une enquête qui avance lentement
L’absence de progrès dans l’enquête six mois après la disparition forcée suggère que les autorités cambodgiennes manquent à l’obligation qui leur incombe en vertu de la CED de déterminer le sort des personnes disparues de force et le lieu où elles se trouvent et de mener des enquêtes rapides, approfondies, impartiales et indépendantes en vue de traduire en justice, dans le cadre de procès équitables, toutes les personnes soupçonnées de responsabilité pénale.
“Les autorités cambodgiennes doivent faire preuve d’une transparence totale sur les progrès de l’enquête concernant la famille de Wanchalearm. Leurs réponses aux Nations unies suggèrent qu’elles n’ont peut-être pas parlé à des témoins potentiellement clés visibles sur les images de télévision en circuit fermé qui ont capturé le moment où Wanchalearm a été enlevé. Ils doivent prendre toutes les mesures appropriées de protection des témoins pour s’assurer qu’ils ne subissent aucune représailles”, a déclaré Yamini Mishra.
Le rythme de l’enquête a été une source d’inquiétude particulière pour la famille et les organisations de la société civile. Six mois après la disparition, peu ou pas de progrès ont été signalés par les autorités pour déterminer qui était derrière la disparition et où se trouve Wanchalearm.
Obligations du Cambodge
Le procureur du tribunal municipal de Phnom Penh n’a envoyé sa demande d’enquête au tribunal qu’en septembre 2020 – plus de trois mois après la disparition de Wanchalearm – bien que la plainte à la base de l’enquête de Sitanun Satsaksit ait été déposée auprès du procureur depuis juillet. Ces retards sont incompatibles avec l’obligation du Cambodge d’assurer une enquête rapide sur les allégations de disparition forcée.
En outre, les réponses antérieures des autorités cambodgiennes aux demandes de l’ONU concernant l’enquête suggèrent une approche peu brillante et inadéquate de l’enquête. Le 19 juin, le gouvernement cambodgien a déclaré qu’il n’avait “ni connaissance ni aucune piste concernant l’enlèvement présumé de M. Wanchalearm”.
Trois témoins
Le 12 août, le gouvernement cambodgien a indiqué qu’il avait interrogé trois “témoins” qui auraient “confirmé” qu’il n’y avait “aucun rapport d’enlèvement” dans le lieu concerné, et qu’ils avaient “essayé de trouver des preuves par le biais des caméras de sécurité là où l’incident aurait eu lieu”, mais n’avaient trouvé “aucun indice”.
Cependant, la publication de preuves pertinentes dans les médias semble contredire les affirmations selon lesquelles les images de la CCTV n’ont fourni “aucun indice” et souligne le fait que les autorités pourraient faire beaucoup plus pour enquêter de manière approfondie sur l’affaire. Les images de CCTV qui ont été partagées par diverses sources médiatiques montrent au moins deux témoins oculaires masculins qui semblent avoir observé l’enlèvement de Wanchalearm. Les autorités cambodgiennes devraient développer une stratégie d’enquête qui garantisse la capture et l’analyse systématique de tous les éléments pertinents, y compris les images de vidéosurveillance.
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