Les indicateurs conjoncturels témoignent d’abord des tempêtes économiques immédiates. Dans le cas de la Thaïlande, pays exportateur de biens manufacturés et destination touristique majeure, dépendante des importations énergétiques, l’année 2020 s’annonce par conséquent compliquée. A l’accalmie de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine pourrait en effet succéder, dans les prochains mois, des tensions majeures sur le marché pétrolier, susceptibles d’affecter la croissance de toute l’Asie émergente. Des tensions accrues, dans le cas thaïlandais, par la forte appréciation du baht en 2019, devenu une forme de monnaie refuge en Asie du sud-est. Que faut il en déduire ? Nos pronostics à l’orée de cette nouvelle décennie, avec le soutien de Thai Property Promotion.
La force de l’économie thaïlandaise tient en un mot qu’il faut bien avoir en tête, à la veille d’analyser le potentiel du royaume en 2020: la résilience. L’histoire récente a montré avec éloquence que malgré les crises politiques à répétition, le couronnement d’un nouveau monarque et les contraintes extérieures commerciales de plus en plus fortes, la royaume continue d’attirer les touristes et les investissements étrangers. La conséquence de ce double afflux est connu: le renforcement du baht, la monnaie locale, devenu en 2019 une forme de monnaie refuge en Asie du sud-est. Mais cette résilience avérée, en période de turbulences, reste un énorme atout pour les investisseurs soucieux de diversifier leur portefeuille et leur patrimoine. Parier sur un dévissage de l’économie de la Thaïlande en 2020 nous parait donc exagéré. L’important est plutôt de revoir vos plans d’investissement dans l’intérêt de votre épargne. Voici quelques conseils et directions.
– Un marché immobilier toujours courtisé
C’est un fait: l’immobilier en Thaïlande continue de trouver preneur. Le spectre de l’éclatement d’une «bulle immobilière spéculative», souvent brandi, ne s’est toujours pas matérialisé. Et ceux pour deux raisons simples: la première est l’afflux constant de capitaux internationaux dans le royaume; la seconde est la finalisation de nouvelles infrastructures de transport de nature à valoriser des zones jusque là périphériques. Prenons un seul exemple: la réalisation, désormais programmée, du futur TGV destiné à relier les trois aéroports de Don Muang (nord de Bangkok), Suvanarbhumi (sud de Bangkok) et U-Tapao (à proximité de Pattaya, cœur du poumon économique et industriel du sud est du pays). Sans surprise, ce corridor va voir le mètre carré continuer de s’apprécier, tandis que les condominiums ou autres projets immobilier vont continuer de trouver preneurs. Même chose à Bangkok, où la demande reste forte, dans cette capitale de plus de 15 millions d’habitants, pour deux types de biens: les appartements de luxe, réservés à une clientèle fortunée étrangère et thaïlandaise, et les appartements pour les jeunes générations professionnelles de la classe moyennes, soucieux de commodité sur le plan des transports. Ces deux constats n’enlèvent rien au défi urbain majeur que constitue, pour Bangkok, la question du réchauffement climatique et de ses conséquences. Mais à court terme, pour l’année 2020, les nuages sombres ne sont toujours pas à l’horizon.
. Une capacité exportatrice résiliente
La hausse du baht thaïlandais complique évidemment les exportations, mais il ne faut pas en exagérer la portée car, simultanément, les devises des autres pays exportateurs se sont également appréciées en 2019. Notons ainsi que la Chine s’est engagée, pour calmer le jeu sur le plan commercial avec les États-Unis, à ne pas maintenir un Yuan sous-évalué, ce qui affecte évidemment le prix des biens produits dans cet immense «usine du monde». Autre fait: tous les pays exportateurs d’Asie du sud-est vont se retrouver confrontés, en 2020, au même risque de renchérissement de leurs approvisionnements en pétrole si la crise s’aggrave entre Washington et Téhéran.
Les faits sont en revanche limpide: 2020 sera une année de concurrence et de compétition accrue pour les exportateurs thaïlandais. Selon la dernière analyse trimestrielle de la Bangkok Bank, la faiblesse du commerce mondial a entraîné une baisse plus marquée des exportations et des importations pour les 11 premiers mois de 2019. Les exportations ont chuté de 7,4% en glissement annuel tandis que les importations ont continué de baisser de 13,8% en glissement annuel. La contraction des exportations est principalement due aux baisses des produits pétroliers (-27,2% sur un an) et des voitures et pièces (-15,6% sur un an). Le compte courant s’est établi à 3,4 milliards de dollars américains pour novembre et à 33,2 milliards de dollars américains pour 11 mois. Corollaire: l’indice de la production manufacturière (IPM) en novembre a baissé pendant six mois consécutifs de 8,3% en glissement annuel. Une baisse principalement attribuable à la contraction de la production dans les industries suivantes; automobile (-21,0% sur un an), produits pétroliers (-18,5% sur un an), caoutchoucs et vêtements (-15,0% sur un an). L’utilisation des capacités a légèrement augmenté pour atteindre 63,2 en novembre, contre 63,0 en octobre, mais reste bien en deçà de la moyenne quinquennale de 68,0.
. Un secteur touristique solide
Les arrivées de touristes ont continué de progresser en 2019, tirées par une forte augmentation des touristes en provenance de Chine (+ 18,3% en glissement annuel) et d’Inde (+ 22,6% en glissement annuel). Le rebond global des arrivées de touristes peut, dans une large mesure, être le résultat des facilités accordées désormais pour l’obtention des visas à l’arrivée. Les recettes touristiques ont augmenté de 3,0% en glissement annuel, entraînant un excédent de 1,4 milliard de dollars US pour le compte des services nets, des revenus et des transferts.
Cet afflux touristique, à moduler selon les nationalités, ne nous parait pas devoir subir de revers majeurs en 2020. Au contraire: si la crise internationale s’amplifie, et si le Moyen orient devait s’enflammer, la classe moyenne chinoise et indienne renoncera en priorité à ses voyages… en Europe. L’Asie du sud-est, bien plus facile à rejoindre en avion, et bien moins onéreuse, s’imposera encore plus comme la destination privilégiée de ces deux grands bassins pourvoyeurs de touristes en Thaïlande. Ajoutons à cela une comparaison intra-régionale: le concurrent direct le mieux placé de la Thaïlande est sans doute le Vietnam. Mais ni les infrastructures, ni l’offre touristique vietnamienne ne paraissent être de nature à priver la Thaïlande de sa clientèle asiatique. N’oublions pas aussi le Japon et la Corée du sud. 2020 ne devrait pas réserver de surprise majeure sur le plan de l’afflux de touristes dans le royaume. Mieux: le potentiel de dépenses de ces derniers pourrait se retrouver augmenté s’ils renoncent à se rendre en Europe…
. Une consommation intérieure soutenue par la relance budgétaire
Selon la dernière étude de la Bangkok Bank, la consommation privée en Thaïlande a légèrement augmenté en 2019, quoique avec un soutien limité des stimuli budgétaires. L’indice de la consommation privée (PCI) en novembre a augmenté de 2,4% en glissement annuel, contre 2,1% en glissement mensuel. Les biens durables ont continué de baisser pendant six mois consécutifs (-9,1% sur un an en novembre), sur fond de repli des ventes de voitures en novembre (-16,2% sur un an). La croissance des revenus agricoles a atteint une croissance 2,6% en glissement annuel contre 0,8% en glissement annuel en octobre, principalement en raison de la hausse des prix du riz gluant et des ananas. La longue période d’inflation prolongée a incité la Banque de Thaïlande à passer à un nouvel objectif d’inflation de 1% à 3%, contre 2,5% ± 1,5% auparavant. ce qui est plutôt une bonne nouvelle car ce taux d’inflation réduit le coût de l’endettement des ménages. La banque centrale insiste par ailleurs, dans l’une de ses dernières études, sur plusieurs facteurs structurels à l’origine des bas prix: les progrès technologiques dans la production, le commerce électronique et le vieillissement de la population.
Il nous parait clair qu’une forme de ralentissement de la consommation peut s’installer, surtout si les difficultés économiques internationales se précisent. Mais dans ce cas, l’épargne augmentera et les dépenses privées seront en partie relayées par l’augmentation des dépenses publiques, permises par un endettement limité de l’État thaïlandais (moins de 50% du PIB) et par l’existence de 200 milliards de dollars de réserves de change.
. Un marché régional qui continue de se consolider
La perspective de croissance de l’économie thaïlandaise pour 2020 est à l’arrêt, à 3% en 2020 pour 2,9% en 2019 si les chiffres actuels se confirment. Cette croissance à priori limitée ne doit toutefois pas faire oublier deux facteurs: l’existence actuelle du plein emploi dans le pays, et la consolidation du marché régional de l’Asean. En clair: une croissance plus soutenue imposerait d’ouvrir les portes du royaume à davantage de travailleurs étrangers, ce que ne souhaite pas nécessairement le gouvernement conservateur, soutenu par l’armée. La consolidation du marché de l’Asean, dont l’objectif affiché reste la création d’une zone commerciale intégrée, sera par ailleurs le sujet à suivre en 2020, sous présidence du Vietnam
À l’avenir, l’optimisme commercial et les politiques de soutien devraient donc probablement soutenir une légère reprise mondiale pour 2020, améliorant ainsi la demande extérieure et bénéficiant aux perspectives d’exportation thaïlandaises. «On peut s’attendre à ce que le Partenariat économique régional global (RCEP) soit au centre des préoccupations, voire aboutisse en 2020» pronostiquait récemment le site bien informé The Diplomat. 2020, année de l’Asean ?