Notre ami Jacques Bekaert, vétéran de la presse francophone en Asie su sud-est et expert des pays du Mékong, vient de publier sur le site asialyst une recension du livre de Thierry Falise, journaliste basé de longue date en Thaïlande. «Pris au Piège» (Ed. Florent Massot) raconte le roman-vrai de la grotte de Tham Luang. Nous en avions parlé lors de sa sortie en librairie. Rappelons la qualité des analyses et commentaires du site Asialyst dont nous vous recommandons chaudement la lecture. Il suffit de cliquer ici.
Le 23 juin 2018, douze enfants âgés de 11 à 16 ans et leur coach de 25 ans, membres de l’équipe de football des Sangliers, une formation provinciale du nord de la Thaïlande, disparaissent dans la grotte de Tham Luang.
Une opération de sauvetage sans précédent impliquant 10 000 volontaires venus du pays et du monde entier va permettre dix jours plus tard de retrouver vivants les 13 Sangliers, qui s’étaient réfugiés dans une cavité à trois kilomètres de l’entrée.
Il faudra huit jours supplémentaires pour que des plongeurs étrangers considérés comme les plus expérimentés au monde, les fassent sortir.
Dans Pris au piège (Massot, 2018) Thierry Falise, nous fait revivre intensément ce sauvetage hors du commun.
Vous me direz : mais on connaît l’histoire.
Et sa fin heureuse.
Mais ce n’est pas le vrai sujet de ce livre exceptionnel.
Il relate les péripéties souvent dramatiques qui, au bout de 18 jours, vont sauver les 12 « Sangliers Sauvages » et leur coach d’une grotte de la province de Chiang Rai brusquement envahie par les eaux.
Et pas n’importe quelle grotte : celle de Tham Luang, l’une des plus profondes, les plus mystérieuses de la Thaïlande, sur laquelle veille la princesse.
Son nom est depuis longtemps oublié, mais elle serait née en Chine, dans le Yunnan, avant que le roi Mangrai en fasse un royaume en 1263. Pénétrer dans une telle grotte n’est pas uniquement l’affaire de spéléologie, pas seulement en tout cas.
C’est entrer dans un autre monde.
Celui des légendes et des rumeurs, et d’incomparables difficultés.
L’auteur, journaliste, photographe et dessinateur de talent, vit depuis 30 ans dans cette Thaïlande qu’il a exploré les moindres recoins. Comme ceux de la Birmanie voisine.
Ce n’est pas son premier ouvrage : Thierry Falise a déjà publié notamment «Le Châtiment des Rois», un livre exemplaire sur les conséquences du cyclone Nargis en Birmanie (Massot 2009), et le roman «Les petits généraux de Yadana» (Anne Carriere, 2005).
Le coach des sangliers
Revenons dans la grotte de Tham Luang.
Ake, le coach des Sangliers, est un apatride.
Comme trois des jeunes footballeurs, Mark, Tee et Adul. Leur présence est tolérée en Thaïlande.
Ils possèdent un document qui leur permet, enfants, d’aller à l’école, sans se faire arrêter par la police.
Très vite des plongeurs venus d’un peu partout, de Grande-Bretagne, des États-Unis, de Belgique ou d’Israël arrivent sur les lieux.
Et les Français ?
Ils seront les grands absents, victimes innocentes de ce ce « phénomène bureaucratique » déjà dénoncé par des sociologues comme Alain Touraine.
Ce sont les plongeurs britanniques qui finissent par s’imposer comme les « fers de lance de l’opération ».
On avait un moment songé à laisser les Sangliers dans leur grotte durant les mois de mousson.
Trois ou quatre mois !
Avec le risque que les jeunes meurent, noyés ou asphyxiés par manque d’oxygène.
Narongsak, gouverneur démis de Chiang Rai, est un fonctionnaire respecté par la population.
Mais mal vu par les autorités.
N’a-t-il pas refusé de signer des « projets jugés inutiles ou dispendieux, voire entachés de corruption » ?
Il restera cependant responsable des opérations de secours et porte-parole des thaïlandais auprès des journalistes de plus en plus nombreux.
Si les Sangliers ont si bien tenu le coup, c’est qu’ils sont jeunes, en bonne santé, sportifs ayant l’esprit d’équipe et faisant confiance à leur entraîneur.
Les plongeurs sortiront les enfants et leur coach, un a un.
Chaque enfant est préalablement anesthésié, tandis que le plongeur le porte d’un bras et, de l’autre main, suit une « ligne de vie » le guidant jusqu’à la sortie.
Après quelques jours passés à l’hôpital et à retrouver leurs parents, les jeunes footballeurs de confession bouddhiste rejoignent un monastère, comme moinillons.
Les chrétiens feront retraite de leur côté.
Les Sangliers sont désormais célèbres dans le monde entier, invités par les plus grands clubs de football.
Et bientôt, ils se verront même à la télévision.
Mais ce seront des acteurs, car les vrais vont sagement continuer leurs études tout en jouant au ballon rond.