Sam Rainsy a enfourché, depuis le début de l’épidémie, une nouvelle bataille politique. Objectif: obtenir la création d’un «Passeport immunitaire» indispensable selon l’opposant cambodgien en exil pour démarrer le déconfinement des populations dans de bonnes conditions. Voici son raisonnement et ses propositions. A débattre bien sur !
Nous reproduisons ici un article de Sam Rainsy, opposant cambodgien en exil en France
Comme je l’ai écrit précédemment dans The Geopolitics, “one immediate solution is for health authorities to possibly establish a protocol allowing for two serological tests to be carried out at intervals to confirm that immunity exists and that it can be relied on for an acceptable and workable period” (1). Avec l’application de deux tests sérologiques consécutifs sur une même personne, la marge d’erreur serait réduite mathématiquement de 5% à 0,25%, ce qui deviendrait beaucoup plus acceptable.
Pour mieux garantir encore la fiabilité du passeport immunitaire, je suggère un protocole pour sa délivrance qui combine un test PCR déjà largement utilisé jusqu’à maintenant pour la détection du coronavirus au moyen d’un prélèvement dans le nez ou dans la gorge, et un test sérologique destiné à détecter les anticorps présents dans le sang à la suite d’une infection par le coronavirus.
La première étape du protocole consiste à soumettre d’abord la personne candidate au passeport à un test virologique PCR. Alors, de deux choses l’une:
– Ou bien le test est positif (cas 1), ce qui indique que la personne est actuellement infectée/malade, et on lui refuse le passeport sans besoin de lui faire subir un test sérologique;
– Ou bien le résultat est négatif (cas 2 à 5), et on continue d’examiner la personne en lui préconisant un test sérologique pour détecter les anticorps qui sont, pour simplifier, au nombre de deux: les IgM indiquant une infection récente ou en cours, et les IgG indiquant une infection ancienne et une immunité présente à la maladie.
Plusieurs cas peuvent alors se présenter:
– Cas 2:Les anticorps IgM et IgG sont tous les deux négatifs: la personne n’a pas été au contact du coronavirus et son système immunitaire ne connaît pas encore ce virus. La personne reste vulnérable, pouvant être infectée et devenir contagieuse à tout moment. On lui refusera le passeport immunitaire.
– Cas 3:L’anticorps IgM est positif mais l’anticorps IgG est négatif: la personne a été récemment infectée ou reste toujours infectée mais son système immunitaire a réagi avec plus ou moins de succès, menant à un début de guérison qui doit être confirmée. Le passeport immunitaire ne pourra être remis qu’après un deuxième test sérologique pour mesurer l’évolution (présence et quantité) des anticorps IgM et IgG.
– Cas 4:Les deux anticorps IgM et IgG sont positifs, ce qui indique une guérison bien établie. Le passeport immunitaire pourra être remis.
– Cas 5:L’anticorps IgM peut disparaître ou ne subsister qu’en très petites quantités au bout de quelques semaines ou mois, mais l’anticorps IgG reste bien présent, ce qui indique que le sujet a acquis l’immunité recherchée. Le passeport immunitaire pourra être remis.
Devant cette nouvelle maladie avec des caractéristiques inédites qu’est le COVID-19, il reste encore beaucoup d’inconnues, d’incertitudes et d’interrogations concernant notamment la fiabilité des tests de dépistage du coronavirus ainsi que la nature, l’intensité et la durée des réponses immunitaires à une infection par le coronavirus. La recherche d’un vaccin et d’un traitement contre ce coronavirus fait également l’objet d’interrogations multiples. Mais, devant les enjeux pour l’humanité face à la pandémie actuelle, il est certain que des progrès décisifs seront accomplis rapidement. Le Figaro a cité la semaine dernière la directrice de l’INSERM, un centre de recherche des plus prestigieux en France, Dominique Costagliola qui a dit: “Concernant le traitement contre le COVID-19, je n’ai jamais vu la recherche clinique avancer aussi vite”. Il en est certainement de même pour ce qui est des tests de dépistage aussi bien pour détecter le virus que pour mesurer les réponses immunitaires.
Centres de recherche
Chaque jour on annonce que des centres de recherche, des laboratoires et des sociétés pharmaceutiques dans de nombreux pays ont développé de nouveaux tests de plus en plus fiables et de plus en plus performants et qu’ils reçoivent des commandes de plus en plus colossales d’autorités nationales qui se préparent à déconfiner leurs populations.
Il devient de plus en plus évident que les tests sérologiques seront associés plus ou moins étroitement aux opérations de déconfinement et que, dans cette lutte pour circonscrire le COVID-19, liberté de circulation et statut immunitaire iront de pair, ce qui correspond bien à la notion du passeport immunitaire, même si on ne l’appelle pas par ce nom.
Tests sérologiques
Il n’est pas étonnant alors que le marché des tests sérologiques présente d’immenses perspectives de développement. Alors que l’article ci-dessus du Figaro met en doute la fiabilité actuelle de ces tests sérologiques pour exclure leur usage dans la délivrance d’un quelconque passeport immunitaire, un autre article paru le même jour (12 avril) dans le même Figaro (3) rapporte que “la qualité des tests proposés progresse de jour en jour” selon Stéphane Eimer, PDG de Biogroup, numéro un français des laboratoires privés d’analyse médicale. Il rapporte aussi que le Ministre de la santé, Olivier Véran “table sur des tests sérologiques qui se révèleront cruciaux pour la sortie du confinement” et précise que “les commandes de la France (de ces tests) interviennent dans un marché hyper-concurrentiel, la demande de tests étant massive et mondiale”, à tel point que “le gouvernement français a commandé ses premiers tests sérologiques à l’américain Abbott, qui, à ce stade, n’a pas encore obtenu d’agrément en France”. Tout le monde se presse donc pour se procurer des tests sérologiques qui sont à la base du passeport immunitaire.
Une autre utilité du passeport immunitaire serait de permettre immédiatement — sans risque pour qui que ce soit — des déconfinements individuels ou collectifs pour d’innombrables personnes ou groupes de personnes incluant des professionnels de tous les secteurs d’activité avant tout déconfinement sur une plus grande échelle
J’espère que ma proposition d’un passeport immunitaire aidera les États à mieux affiner leur stratégie pour mettre un terme à cette aberration que devient le confinement général et indiscriminé qui est appliqué jusqu’à maintenant quel que soit l’état immunologique de chacun. Dans tous les cas, le coût d’un passeport immunitaire est insignifiant par rapport aux bénéfices de tous ordres qu’il rapporte à son détenteur et à la société.
Sam Rainsy
Chef de l’opposition cambodgienne en exil à Paris
Ancien Ministre des finances