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ASIE DU SUD-EST- GÉOPOLITIQUE : Taïwan, brasier asiatique ou incendie isolé ?

Date de publication : 16/07/2023
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Crise Chine Taïwan

 

Benoit de Tréglodé était en poste à Bangkok dans le passé à la tête de l’IRASEC. Il vient de publier un article sur la région et Taïwan dans la revue « Défense nationale ».

 

Nous en reproduisons un extrait. Intégralité sur le site de la revue Défense Nationale ici.

 

Il est frappant de constater que la montée des tensions dans le détroit de Taiwan est un facteur de réorganisation des relations sécuritaires et des interdépendances entre les États d’Asie du Sud-Est (1). Les chefs d’état-major américains estiment qu’en 2027 les capacités militaires de la Chine seront suffisantes pour qu’une offensive contre Taïwan devienne une hypothèse crédible (2). Parallèlement, le président chinois Xi Jinping a déclaré que son armée achèvera sa modernisation en 2035, une date avant laquelle tout déploiement militaire offensif semble improbable. D’ici là, la volonté de Pékin est de faire peser une incertitude sur sa politique à l’égard de la navigation dans le détroit, et sur son interprétation de son statut en droit international. Comment se positionnent les États d’Asie du Sud-Est face à l’éventualité d’un conflit armé dans le détroit de Taïwan ? Quels sont les défis auxquels ces pays s’exposent dans ce contexte dans leur relation avec la Chine et les États-Unis ?

 

Taïwan, « la Chine unique » et la mer de Chine méridionale

 

Les revendications de Taïwan en mer de Chine méridionale se heurtent à celles du Vietnam, des Philippines, de la Malaisie et du sultanat du Brunei, quatre États membres de l’ASEAN (Association of Southeast Asian Nations(3). L’ambiguïté stratégique de Taïwan dans les mers d’Asie du Sud-Est est ancienne. Taïwan a été le premier État à envoyer des troupes dans les Spratleys après la fin de la Seconde Guerre mondiale, établissant dès 1956 une base militaire permanente à Itu Aba (Taiping Dao), l’île principale de l’archipel ; sept ans auparavant, Taiwan avait déjà construit un phare aux Pratas (Dongsha Qundao). Taipei entendait alors tirer profit de la localisation géographique de ces îles pour surveiller les actions militaires de la Chine. Les Pratas et Itu Aba abritent des stations météorologiques, des radars, des postes d’écoute et des unités de patrouille permettant, depuis les premières, de se renseigner sur les activités de certaines bases de l’Armée populaire de libération (APL, l’armée chinoise) à partir desquelles pourraient être lancées des attaques contre l’île de Taïwan et, depuis la seconde, d’observer les mouvements de l’APL dans les Spratleys. Outre les deux points clés que constituent l’atoll des Pratas et Itu Aba, Taïwan contrôle également le petit récif de Jhongjhou (Zhongzhou jiao). Situé à quelques encablures d’Itu Aba, Jhongjhou est cependant moins sensible car il n’abrite ni d’infrastructure, ni population permanente. Officiellement, les revendications territoriales de Taipei sont encore circonscrites par la « ligne en onze traits » tracée pour la première fois sur une carte en 1947.

 

Cependant, depuis la reprise des tensions entre les deux rives du détroit au tournant des années 2010, les autorités taïwanaises ont fait le choix de renforcer leurs liens avec l’Asie du Sud-Est, et notamment avec les Philippines (4). Lancée en 2016, la New Southbound Policy (NSP) du gouvernement taïwanais poursuivait cet objectif avec l’ensemble des pays de l’ASEAN (5). Fin 2015, la signature d’un accord sur les pêcheries entre les représentants du Bureau économique et culturel de Taipei aux Philippines, et du Bureau économique et culturel de Manille à Taïwan a en effet ouvert la voie au règlement de leurs différends en mer de Chine méridionale. L’objectif pour Taïwan était de faire du chevauchement des Zones économiques exclusives (ZEE) revendiquées non pas un motif d’usage de la force, mais une opportunité de coopération bilatérale avec ses voisins d’Asie du Sud-Est.

 

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