Le déplacement du centre de gravité du monde vers l’Indo-Pacifique a commencé il y a des années, mais la pandémie l’accélère. L’UE doit examiner les conséquences en termes géopolitiques et géoéconomiques et définir notre approche de l’Indo-Pacifique. Sa stratégie asiatique vient d’être réaffirmée par son Haut représentant Josep Borrell
Nous reproduisons ici un discours de Josep Borrell, Haut représentant de l’UE
Premièrement, nous rééquilibrons nos relations avec la Chine sur la base d’une stratégie qui consiste à traiter la Chine comme un “partenaire, un concurrent et un rival”. Parallèlement, nous investissons davantage dans le développement de nos relations avec le reste de l’Asie, notamment avec des partenaires partageant les mêmes idées.
Des travaux sont en cours sur ces deux axes. Avec la Chine, nous avons un programme complexe et exigeant, qui associe la coopération sur des questions mondiales à des mesures de rétorsion lorsque cela est nécessaire, et qui met l’accent sur la réciprocité et le renforcement de la résilience de l’UE. Nous devons nous engager auprès de la Chine car il est insensé d’ignorer cette grande puissance.
Toutefois, nous devons nous engager tout en gardant les yeux grands ouverts. Fondamentalement, notre stratégie à l’égard de la Chine consiste à nous engager dans des questions d’intérêt mondial, à défendre nos intérêts et nos valeurs, tout en reconnaissant que nous devons accroître notre propre influence et réduire certaines vulnérabilités. En fin de compte, les choix que Pékin fera influenceront la nature et la profondeur de nos relations.
Grande et diverse
Mais l’Asie est grande et diverse et ne doit pas être réduite à regarder uniquement la Chine, bien au contraire. Ces dernières années, nous avons renforcé et diversifié nos liens avec le Japon, l’Inde, la Corée du Sud, l’ASEAN, l’Australie et la Nouvelle-Zélande, en complétant nos solides relations économiques traditionnelles par une coopération accrue en matière de politique étrangère et de sécurité.
Avec le Japon, nous avons signé un accord de partenariat stratégique et un accord de partenariat économique. À ce jour, l’accord UE-Japon est le plus important accord de libre-échange (ALE) en termes d’impact sur la libéralisation économique. Nous avons également conclu des accords de libre-échange ambitieux avec la Corée du Sud, le Vietnam et Singapour, et nous progressons rapidement avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande.
En mai 2018, les ministres des Affaires étrangères de l’UE se sont engagés à étendre l’engagement de l’UE en matière de sécurité dans et avec les partenaires asiatiques. Nous avons depuis créé un projet “Renforcer la coopération en matière de sécurité en et avec l’Asie” (ESIWA), pour mettre en œuvre cette ambition, en travaillant concrètement avec des partenaires tels que l’Inde, l’Indonésie, le Japon, Singapour, la Corée du Sud et le Vietnam sur la sécurité maritime et la cybersécurité, le contre-terrorisme et la lutte contre l’extrémisme violent, ou encore la formation au maintien de la paix.
Nous avons adopté une stratégie de l’UE en matière de connectivité pour faire avancer notre vision du développement d’une connectivité durable, globale et fondée sur des règles. Une définition de la connectivité durable a été approuvée par 53 partenaires asiatiques et européens lors du sommet ASEM12, accueilli par l’UE en octobre 2018.
En décembre dernier, point culminant de nombreuses années d’intensification de notre travail avec l’ASEAN, nous avons fait évoluer nos relations vers un partenariat stratégique.
Il est important que cette année, nous nous appuyions sur ces progrès et intensifions notre travail. Il faut définir une approche européenne de la région indo-pacifique car à bien des égards, l’Indo-Pacifique représente désormais le centre de gravité économique et stratégique du monde. C’était déjà le cas avant la pandémie et c’est encore plus vrai aujourd’hui. La confluence des océans Indien et Pacifique, qui s’étend de l’Afrique de l’Est au Pacifique occidental, constitue une région stratégique intégrée.
