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ASIE – GÉOPOLITIQUE : Allons nous vers un monde à trois pôles ? (1/2)

Date de publication : 17/03/2025
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Xi-Jinping Poutine Trump

 

Notre ami Arnaud Leveau, consultant international reconnu, collabore régulièrement pour l’Institut de recherche Asia Centre et la lettre Veille. Il vient de publier une longue analyse sur les bouleversements du monde à l’ère Trump, vu d’Asie.

 

Nous reproduisons ici la première partie.

 

Le désengagement américain d’Europe : vers un monde à trois pôles ? (Partie 1/2)

 

Le discours du Vice-Président américain J.D. Vance à Munich le 15 février dernier a marqué un tournant dans la perception du rôle des États-Unis sur la scène internationale. Le désengagement progressif de Washington en Europe ne doit pas être perçu comme un simple ajustement stratégique, mais comme un indicateur d’un basculement profond dans l’ordre mondial. Ce retrait pose des questions fondamentales sur la pérennité du leadership américain et les conséquences pour ses alliés, en Europe comme en Asie.

 

Ce repositionnement n’est pas un accident, mais une évolution structurelle de la politique étrangère américaine. À mesure que les États-Unis réorientent leurs priorités vers l’Indo-Pacifique, où la rivalité avec la Chine domine leur agenda, l’Europe doit s’interroger : peut-elle continuer à dépendre des États-Unis ou doit-elle se réorganiser pour affirmer son autonomie stratégique ?

 

Les États-Unis : d’une puissance mondiale à une puissance régionale

 

Depuis 1945, les États-Unis se sont définis comme une puissance à la fois atlantique et pacifique, capable d’agir simultanément sur plusieurs théâtres d’opérations. Ce n’est plus le cas. Des signaux avant-coureurs d’un désengagement étaient déjà visibles depuis plus d’une décennie. L’absence de réaction face au franchissement des lignes rouges en Syrie sous Barack Obama, le retrait chaotique d’Afghanistan sous Joe Biden et, aujourd’hui, l’incapacité de États-Unis à s’engager durablement dans un soutien à l’Ukraine montrent une tendance lourde : les États-Unis ne sont plus disposés – ni peut-être même capables – de garantir la sécurité de l’Europe.

 

Ce qui se joue aujourd’hui n’est pas un simple rééquilibrage géopolitique, mais un changement fondamental du statut des États-Unis sur la scène mondiale. De facto, les États-Unis abandonnent leur ambition d’être une puissance globale pour se recentrer sur une seule région, l’Indo-Pacifique. Ce basculement ne signifie pas pour autant un désengagement total du monde, mais il consacre une redéfinition de la hiérarchie des priorités américaines. La Chine devient l’unique rival stratégique, l’Europe n’est plus qu’un théâtre secondaire et le reste du monde n’aura aucune voix au chapitre.

 

Il est frappant de constater que les États-Unis, avec leurs ressources colossales, ne parviennent plus à maintenir une présence équilibrée entre l’Atlantique et le Pacifique. En d’autres termes, ils ne sont plus en mesure d’être une puissance globale et nous informent qu’ils ne sont plus aujourd’hui qu’une puissance régionale.

 

L’ère des Trois Royaumes : quel rôle pour l’Europe et les démocraties libérales ?

 

Dans cette recomposition géopolitique, le monde semble évoluer, comme nous le rappellent régulièrement nos partenaires chinois, vers une dynamique rappelant l’ère des Trois Royaumes en Chine (220-280 après J.-C.), une période où trois grandes puissances se disputaient l’hégémonie, chacune cherchant à absorber ou à neutraliser l’autre.

 

Dans la configuration actuelle, on pourrait voir :

 

1. La Chine et son bloc d’influence (Russie, BRICS, alliés régionaux) ;

2. Les États-Unis recentrés sur l’Indo-Pacifique, mais avec une crédibilité érodée ;

3. Un troisième pôle – l’Europe et les démocraties libérales – encore indécis sur son rôle.

 

Le risque pour l’Europe et les démocraties asiatiques serait de se retrouver reléguées à un royaume faible, condamné à la découpe et à la vassalisation par les deux autres blocs. Si elles ne s’unissent pas, elles seront dépecées progressivement par les grandes puissances, ne conservant qu’une souveraineté illusoire sur des sujets secondaires. L’Europe et les démocraties libérales doivent donc se positionner comme un véritable troisième royaume puissant, capable de peser dans l’équilibre mondial plutôt que d’être un simple terrain de jeu pour la compétition sino-américaine.

 

Un paradoxe : l’engagement croisé entre l’Europe et l’Asie

 

Le paradoxe de cette situation réside dans le fait que, au moment où les États-Unis réduisent leur engagement en Europe, les Européens renforcent leur présence en Indo-Pacifique. La France, l’Allemagne, l’Italie et d’autres nations européennes mènent des opérations pour défendre la liberté de navigation, renforcer le droit maritime international et approfondir leurs partenariats de sécurité dans la région.

 

Mais l’engagement ne va pas dans un seul sens : l’Asie est également de plus en plus présente en Europe sur le plan sécuritaire. L’exemple le plus marquant est celui de la Corée du Sud, qui fournit désormais des équipements militaires à plusieurs pays européens, en particulier la Pologne, qui a acquis des chars K2, des obusiers K9 et des avions FA-50. D’autres États européens suivent de près cette coopération, séduits par la rapidité de production et le savoir-faire technologique sud-coréen.

 

De même, le partenariat entre le Japon, le Royaume-Uni et l’Italie pour développer un nouvel avion de combat illustre la montée en puissance de la coopération stratégique entre l’Europe et l’Asie. Ce projet, qui vise à concevoir un chasseur de sixième génération d’ici 2035, montre que les alliances en matière de défense ne sont plus exclusivement transatlantiques.

 

Dans cette dynamique, pourquoi ne pas envisager une coopération plus étroite avec la Corée du Sud ? Si l’intégration de la Corée du Sud au programme SCAF (Système de Combat Aérien du Futur), actuellement menée par la France, l’Allemagne et l’Espagne, semble difficile à ce stade, d’autres opportunités existent. La Corée du Sud, avec son expertise croissante dans les systèmes d’armement avancés, pourrait être un partenaire pertinent pour de futurs projets conjoints en matière de drones de combat, de défense antimissile voire de motorisation aéronautique. De même, une réponse coordonnée entre la France et la Corée du Sud à des appels d’offres relatifs au nucléaire civil en Asie permettrait de renforcer leur compétitivité face aux propositions américaines, russes et chinoises. Une telle coopération offrirait à chacun des deux pays l’opportunité de capter une part significative du marché, tout en évitant d’être marginalisés par la dynamique prédatrice des grandes puissances.

 

Des accords stratégiques entre l’Union européenne et les démocraties asiatiques sur les chaînes d’approvisionnement en matière de défense pourraient renforcer leur autonomie collective.

 

L’ombre chinoise et nord-coréenne sur la sécurité européenne

 

De manière plus inquiétante, la Corée du Nord s’impose également comme un acteur influent dans l’équilibre des forces sur le continent européen en s’engageant aux côtés de la Russie dans la guerre que cette dernière mène contre l’Ukraine. Pyongyang fournit des armes et des munitions à Moscou, renforçant ainsi l’effort de guerre russe et prolongeant le conflit. Ce soutien militaire nord-coréen illustre l’émergence d’un axe Moscou-Pékin-Pyongyang qui pourrait également tenter de remodeler durablement la sécurité européenne.

 

Et si la Russie acceptait des troupes asiatiques en Ukraine ?

 

Si la guerre en Ukraine venait à évoluer vers un cessez-le-feu négocié, la question du maintien de la paix et de la surveillance des lignes de front se poserait inévitablement. Or, la Russie a toujours refusé la présence de troupes originaires d’un pays européen membre de l’OTAN sur le territoire de l’Ukraine.

 

Toutefois, Moscou pourrait être plus encline à accepter une présence militaire non européenne, notamment en provenance de Chine ou d’Inde. Pékin, qui joue déjà un rôle central dans le soutien économique et diplomatique à la Russie, pourrait voir dans une telle initiative un moyen d’accroître son influence sur les équilibres européens. De même, l’Inde, qui entretient une relation historique avec la Russie et cherche à se positionner comme une puissance médiatrice, pourrait être un acteur clé dans un tel scénario.

 

L’hypothèse d’une présence militaire asiatique en Europe soulève une question fondamentale : l’Europe est-elle prête à voir émerger de nouvelles puissances influentes sur son propre territoire ? Une telle évolution remettrait en cause le rôle traditionnel de l’OTAN et accélérerait la nécessité pour l’Europe de renforcer ses capacités militaires et diplomatiques autonomes.

 

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