Par Ioan Voicu
La plénière de l’Assemblée générale des Nations Unies a adopté le 2 mai 2024 une résolution sur la santé présentée par le groupe central de l’Initiative de politique étrangère et de santé mondiale composé du Brésil, de la France, de l’Indonésie, de la Norvège, du Sénégal, de la Thaïlande et de l’Afrique du Sud.
La résolution vise à relever les défis de la santé mondiale dans le domaine de la politique étrangère et a eu l’avantage d’être finalisée avec l’expertise de l’Organisation mondiale de la santé. Ce document diplomatique vise à répondre à un certain nombre de préoccupations d’actualité liées à la coopération internationale destinée à renforcer la santé mondiale. Il existe une reconnaissance naturelle de la nécessité de garantir l’approvisionnement en produits de santé et l’accès aux technologies appropriées pour tous les pays, dans l’intérêt vital de la préservation de l’humanité
La création de l’Académie de l’OMS en 2024 sera un élément clé de ces efforts. L’on appelle à un accès rapide, équitable et sans entrave à des médicaments, des vaccins, des produits diagnostiques et thérapeutiques et à d’autres produits de santé sûrs, abordables, efficaces et de qualité, en particulier en période d’urgence sanitaire.
Le Président de l’Assemblée générale organisera, en 2025, un dialogue interactif de haut niveau d’une journée sur la prise en compte des déterminants sociaux, économiques et environnementaux de la santé. Tous ces efforts contribueront davantage à la réalisation des objectifs de développement durable des Nations Unies.
Contexte délicat
La résolution Santé mondiale et politique étrangère : relever les défis de la santé mondiale dans le domaine de la politique étrangère comporte un long préambule dont nous ne mentionnons que les paragraphes les plus importants.
Tout d’abord, il est reconnu que la couverture sanitaire universelle est fondamentale pour atteindre les objectifs de développement durable liés non seulement à la santé et au bien-être, mais aussi pour éradiquer la pauvreté sous toutes ses formes et dimensions, garantir une éducation de qualité, parvenir à l’égalité des sexes et à la l’autonomisation de toutes les femmes et des filles, en fournissant un travail décent et une croissance économique, ainsi que l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles, en réduisant les inégalités, en garantissant des sociétés justes, pacifiques et inclusives et en établissant et favorisant des partenariats.
Dans le préambule, il est également clairement reconnu la relation étroite entre la politique étrangère et la santé mondiale ainsi que leur interdépendance, notant également que la politique étrangère peut contribuer à maintenir la dynamique politique, à faire progresser la coopération internationale et à trouver des solutions à la santé et à d’autres défis interdépendants, fondées sur les principes de solidarité et équité mondiales.
Ce document prend soin de souligner la responsabilité première des États de promouvoir une couverture sanitaire universelle qui comprend un accès universel et équitable à des services de santé de qualité et garantit une prestation de services abordables et de qualité, notamment par le biais des soins de santé primaires et des mécanismes de protection sociale, avec le soutien de la communauté internationale et en vue de fournir un accès aux services de santé à tous, en particulier aux femmes, aux enfants et à ceux qui se trouvent en situation de vulnérabilité ou marginalisés.
Une question d’actualité abordée dans le préambule fait référence à l’impact négatif de la désinformation et de la stigmatisation sur la préparation et la réponse aux urgences sanitaires, ainsi que sur la santé physique et mentale des personnes.
L’Assemblée générale a salué le lancement du Fonds de lutte contre la pandémie en novembre 2022 comme l’un des mécanismes permettant de financer des investissements essentiels pour renforcer les capacités nationales, régionales et mondiales de prévention, de préparation et de réponse aux pandémies, en mettant l’accent sur les pays en développement, et a rappelé qu’un financement efficace aux niveaux national, la préparation aux urgences sanitaires régionales et mondiales nécessitera environ 30 milliards de dollars par an, dont un déficit estimé à 10 milliards de dollars, en nouveaux financements extérieurs par an, en dehors des niveaux actuels de l’aide publique au développement.
L’Assemblée générale a également noté que des défis en matière de santé mondiale subsistent et exigent une attention constante et que cela nécessite d’urgence le respect des engagements visant à renforcer le partenariat mondial pour le développement, et souligne à nouveau en particulier la coopération Nord-Sud, l’importance de la coopération Sud-Sud et la coopération triangulaire et l’échange de meilleures pratiques, ainsi que le renforcement des capacités, la recherche et le développement et le transfert de technologie selon des conditions mutuellement convenues pour lutter contre les inégalités en matière de santé dans le contexte de l’éradication de la pauvreté et du développement durable, conformément aux priorités nationales.
Qu’y a-t-il à faire ?
Les 33 paragraphes du dispositif de la résolution à l’examen proposent des recommandations pratiques à cet égard. Nous reproduisons de manière sélective les plus importantes.
Les États membres sont :
– exhortés à continuer de prendre en compte les questions de santé dans la formulation de la politique étrangère ;
– encouragés à renforcer la coopération régionale et internationale, le multilatéralisme, la solidarité mondiale, la coordination et la gouvernance de la santé, en vue de la réalisation progressive du droit à la jouissance du meilleur état de santé physique et mentale susceptible d’être atteint pour tous, sans distinction d’aucune sorte ;
– appelés à continuer de contribuer activement au Groupe de négociation intergouvernemental chargé de rédiger et de négocier une convention, un accord ou un autre instrument international juridiquement contraignant de l’Organisation mondiale de la santé sur la prévention, la préparation et la réponse aux pandémies, ainsi que les amendements au Règlement sanitaire international (2005) ;
– exhortés à coopérer, notamment par un soutien technique et financier au renforcement des capacités et à l’accès à la technologie, en tenant compte de leurs différents niveaux de développement et de leurs capacités, pour garantir que tous les États, en particulier les pays en développement, puissent mettre en œuvre efficacement des mesures pour prévenir et se préparer aux et répondre aux pandémies et autres urgences sanitaires, conformément au Règlement sanitaire international (2005) ;
– exhortés à s’engager à renforcer la participation pleine, efficace et significative des femmes aux processus de leadership et de prise de décision en cas de pandémie et d’autres urgences sanitaires à tous les niveaux, et à intégrer une perspective de genre dans toutes les politiques et programmes, y compris dans les réponses budgétaires ;
– appelés, le cas échéant, à établir des capacités régionales plus fortes en matière de recherche et développement, de fabrication, de réglementation et d’achat des outils nécessaires à un accès équitable et efficace aux vaccins, aux traitements, aux produits de diagnostic et aux fournitures essentielles, ainsi qu’aux essais cliniques, et à accroître approvisionnement mondial, notamment en facilitant le transfert de technologie dans le cadre des accords multilatéraux pertinents, tout en renforçant leur leadership, leur engagement et leur soutien dans la promotion de l’établissement et du renforcement d’une production locale durable et de qualité de médicaments et d’autres technologies de la santé qui respectent les bonnes pratiques de fabrication ;
-exhortés, le cas échéant, en fonction du contexte national, à appliquer une approche globale pour renforcer la production locale et régionale en envisageant, par exemple, de promouvoir la recherche et le développement, la transparence des marchés des médicaments et autres produits et technologies de santé, le renforcement des systèmes de réglementation , l’accès à un financement durable et abordable, le développement de ressources humaines qualifiées, l’accès au transfert de technologie à des conditions mutuellement convenues pour la production et l’innovation basées sur les besoins, l’agrégation de la demande nationale et régionale et des incitations appropriées pour l’investissement du secteur privé .
L’Assemblée générale appelle à un accès durable, abordable, juste, équitable, efficace, efficient et rapide aux contre-mesures médicales, notamment aux vaccins, aux produits thérapeutiques, aux produits de diagnostic et à d’autres produits de santé, et appelle l’Organisation mondiale de la santé à coordonner cela avec les partenaires concernés, en garantissant la cohérence aux discussions en cours au sein de l’Organe intergouvernemental de négociation et du Groupe de travail sur les amendements au Règlement sanitaire international (2005) à Genève.
L’Assemblée générale appelle les États membres à :
– supprimer les barrières commerciales, renforcer les chaînes d’approvisionnement, faciliter la circulation des biens médicaux et de santé publique et diversifier les capacités de fabrication entre les régions, en particulier pendant les pandémies et autres urgences sanitaires entre et au sein des pays ;
– donner la priorité, en augmentant ou en maintenant, selon le cas, au financement national et international de la santé, pour contribuer au financement durable du système multilatéral, y compris de l’Organisation mondiale de la santé, conformément aux décisions de l’Assemblée mondiale de la santé, et continuer à soutenir la planification d’un cycle d’investissement de l’Organisation mondiale de la santé dans le cadre d’une Organisation financée de manière plus prévisible et plus durable ;
– soutenir le Fonds contre la pandémie et mobiliser des ressources externes supplémentaires pour la prévention, la préparation et la réponse aux pandémies, y compris auprès de nouveaux donateurs, et aider les pays à devenir plus résilients face aux futures pandémies et autres urgences sanitaires ;
– accélérer l’action pour remédier à la pénurie mondiale de personnels de santé et de soins et encourager l’élaboration de plans nationaux en matière de personnels de santé, conformément à la Stratégie mondiale sur les ressources humaines pour la santé : Main-d’œuvre 2030 ;
– renforcer les efforts nationaux, la coopération internationale et la solidarité mondiale pour accélérer la réalisation d’une couverture sanitaire universelle d’ici 2030, avec les soins de santé primaires comme pierre angulaire, et ne laisser personne de côté pour garantir une vie saine et promouvoir le bien-être de tous tout au long de la vie, tout en réduisant les dépenses de santé catastrophiques et en éliminant l’appauvrissement dû aux dépenses liées à la santé d’ici 2030 ;
L’Assemblée générale exhorte également à un accès rapide, équitable et sans entrave à des médicaments, des vaccins, des produits diagnostiques et thérapeutiques et à d’autres produits et technologies de santé sûrs, abordables, efficaces et de qualité, comme l’un des éléments fondamentaux de la pleine réalisation du droit de chacun à la jouissance du meilleur état de santé physique et mentale possible et les objectifs correspondants de couverture sanitaire universelle et de santé pour tous, sans discrimination, en veillant tout particulièrement à atteindre en priorité les plus défavorisés.
Les États Membres sont invités à garantir, d’ici 2030, l’accès universel aux services de soins de santé sexuelle et reproductive, y compris pour la planification familiale, l’information et l’éducation et l’intégration de la santé reproductive dans les stratégies et programmes nationaux.
Une invitation spéciale est adressée à l’Organisation mondiale de la santé à continuer de fournir des orientations normatives et un soutien technique de qualité et efficacement diffusés aux États Membres, à leur demande, afin de renforcer les capacités, les systèmes de santé et la prévention, la préparation et la réponse aux urgences sanitaires, pour promouvoir la formation, le recrutement, le développement et la rétention des ressources humaines pour les systèmes de santé et le transfert de technologie selon des conditions mutuellement convenues, avec un accent particulier sur les pays en développement.
Conclusion
Le Président de l’Assemblée générale est prié d’organiser, en 2025, un dialogue interactif de haut niveau d’une journée sur les déterminants sociaux, économiques et environnementaux de la santé et de rédiger et diffuser un résumé de la réunion.
À son tour, le Secrétaire général de l’ONU, en étroite collaboration avec le Directeur général de l’Organisation mondiale de la santé, ainsi qu’avec les organisations internationales compétentes, est prié de faire rapport à l’Assemblée générale lors de sa soixante-dix-neuvième session, en 2025, sous le point intitulé « Santé mondiale et politique étrangère », sur l’amélioration de la coopération internationale et des efforts multilatéraux pour relever les défis sanitaires mondiaux et promouvoir l’équité en matière de santé pour la réalisation du Programme 2030.
Comme indiqué lors de son introduction officielle, cette résolution mérite sa pleine mise en œuvre. Il s’agit d’un texte équilibré et, en son cœur, se trouve l’élément fondamental nécessaire à la pleine réalisation et à la jouissance du droit de chacun au meilleur état de santé physique et mentale qu’on est capable d’atteindre, ainsi que les objectifs correspondants de couverture sanitaire universelle et de santé pour tous sans discrimination.
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Comment peut-on être à la pointe du combat sanitaire mondial sans que que dans les pays sus mentionnés, il n’existe aucune sécurité sociale garantissant les soins et la prise en charge médicale grave pas plus que l’assurance retraite. Certes, sans doute une condition pour la concurrence mondialisée au bénéfice de qui ? Je note bien le souci pour les prévisions généreuses futures… Merci pour la réponse