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BANGKOK – CHRONIQUE : Le crépuscule de la cité des anges

Date de publication : 05/02/2024
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Bangkok coucher de soleil
Une chronique thaïlandaise de Patrick Chesneau

 

En plein cœur de Bangkok, un interstice de quiétude pour clore les journées invariablement trépidantes. Dans la mégapole insatiable, agitée en permanence par les migrations pendulaires de ses douze millions d’habitants, un banal moment de légèreté revêt une valeur inestimable.

 

C’est à l’approche du crépuscule.

 

Bientôt la nuit va s’appesantir sur la Cité des Anges. Rompre avec la frénésie du chaudron géant. Sorte de ballet insolite, les cieux vont se draper dans les replis d’un dôme scintillant. Des centaines d’étoiles iriseront les prunelles des foules trop fourbues pour résister à l’offensive d’un sommeil conquérant. Avant de regagner son logis, en chacun s’instaure un moment de méditation.

 

Au premier plan, un Wat imposant, lieu dédié à la spiritualité. En second lieu, les frondaisons entre les habitations éparses laissent deviner une vie qui subrepticement adopte un rythme plus ralenti. Le sentiment d’une appréciable sérénité est conforté par la présence silencieuse du fleuve aux reflets mordorés. Quelques esquifs sillonnent encore la Menam Chao Phraya, incrustant leur sillage dans le ruban liquide. Image alanguie, propice aux confidences attendries que les amants bientôt noctambules se chuchotent en catimini.

 

Par delà les faubourgs de la capitale, se lèvent les premiers contreforts d’un relief urbain tentaculaire.

 

Immeubles et tours disséminés en bosquets. Inamovible, le Bouddha géant de Wat Paknam veille sans désemparer. Il distribue grâce et félicité à ses ouailles recueillies. A l’avant-poste de la ligne d’horizon, la silhouette du géant bienfaiteur capte les regards mais il n’y a là rien de grandiloquent. Juste l’amorce d’une autre temporalité. Un ralenti de l’âme bien décidée à prendre son aise.

 

Aux confins de l’image, l’astre brûlant, celui-là même qui a consumé les corps si peu ignifugés, se retire lentement…à petites touches imperceptibles. Il était cramoisi. Il rosit à l’instar d’une créature nubile. Du firmament céleste, il s’en va rejoindre les abysses de l’oubli. Bientôt, la lune va, à son tour, relever le défi qui lui revient depuis l’aube des temps cosmiques : Éclairer la part substantielle de l’Humanité, logée aux antipodes du monde Farang. Précisément celle dont la destinée est inscrite depuis l’origine dans un Orient de légende.

 

A elle seule, Krungthep Maha Nakorn est le lien indispensable entre l’immémorial et l’impérissable.

 

Patrick Chesneau

 

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