Selon les médias thaïlandais et le site Irrawaddy toujours bien informé, la junte birmane a confirmé jeudi la perte d’une ville stratégique à la frontière chinoise, au profit des groupes armés ethniques à l’origine d’attaques qui inquiètent Pékin, appelant à un cessez-le-feu immédiat.
“Le gouvernement, les organisations administratives et les forces de sécurité ne sont plus présentes” à Chinshwehaw, qui borde la province de Yunnan, a indiqué un porte-parole du gouvernement militaire, Zaw Min Tun.
Le responsable a accusé les opposants armés de “faire sauter les sources d’électricité, les ponts, et de détruire les routes de transport”, dans un message audio enregistré mercredi.
Les attaques ont eu lieu dans dix différents endroits du Nord de l’État Shan (nord), lors des six derniers jours, a-t-il assuré, sans autres précisions.
Des combats ont éclaté la semaine dernière dans cette région éloignée mais stratégique, qui abrite des pipelines de gaz et de pétrole alimentant la Chine voisine.
L’accès au compte-gouttes aux moyens de communication, dans une région dominée par la jungle, rendent difficile toute démarche de vérification du nombre de victimes.
Les Nations unies ont indiqué lundi que les affrontements avaient provoqué le déplacement de plus de 6 000 personnes.
L’Armée de libération nationale Taaung (TNLA), l’Armée d’Arakan (AA) et l’Alliance démocratique nationale du Myanmar (MNDAA) ont monté une alliance capable de mobiliser au moins 15 000 hommes, selon des analystes.
Ils ont revendiqué jeudi le contrôle de Chinshwehaw, ainsi que Hpaung Seng, Kyukok, et Hsenwi, où des combats font rage.
Plus tôt dans la semaine, ces opposants de longue date à l’armée avaient annoncé avoir mis la main sur plusieurs positions militaires, ainsi que de routes stratégiques pour les échanges avec la Chine, le principal partenaire commercial de la Birmanie.
La junte a procédé de son côté à des frappes aériennes, selon un porte-parole d’un groupe armé ethnique.
– “Échec cinglant” –
Plus de quart des échanges entre la Birmanie et la Chine entre avril et septembre, évaluées à 1,7 milliard d’euros, a transité par cette petite ville, selon des données officielles relayées en septembre par un journal d’État.
Les trois groupes armés ont évoqué des dizaines de blessés, tués et capturés dans les rangs de la junte.
Les experts ont alerté sur la fiabilité des données issues des camps belligérants, qui pourraient être tentés de les manipuler à la hausse ou à la baisse.
“L’armée n’a pas été confrontée à des assauts de ce niveau d’intensité depuis le coup d’État”, a estimé auprès de l’AFP David Mathieson, un analyste indépendant spécialiste des questions liées à la Birmanie.
“C’est un échec cinglant pour l’armée et les services de renseignements, qui montre à quel point l’armée birmane est à la limite”, a-t-il poursuivi.
L’AFP a tenté de joindre l’Armée de libération nationale Taaung et l’Armée d’Arakan pour un commentaire.
– Pékin réclame un cessez-le-feu –
Ces groupes combattent le pouvoir central depuis plusieurs décennies, autour du contrôle des ressources naturelles et de l’autonomie politique de l’État Shan. Ils participent également à former les groupes armés d’opposants politiques qui ont éclos en réaction au coup d’État de 2021 contre Aung San Suu Kyi.
Les violences inquiètent la Chine voisine, l’un des derniers pays à entretenir des liens soutenus avec une junte birmane, isolée sur la scène internationale, à qui elle fournit des armes.
Pékin “exhorte toutes les parties à cesser immédiatement le feu et les combats”, a déclaré lors d’un point presse régulier Wang Wenbin, un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.
Le représentant souhaite une résolution “par des moyens pacifiques”, a-t-il insisté.
La Chine a maintenu des liens avec certains groupes ethniques armés de la région birmane frontalière, où habitent des communautés ethniques chinoises.
Le ministre chinois de la Sécurité publique a rencontré mardi le chef de la junte Min Aung Hlain dans la capitale Naypyidaw.
Ils ont discuté des attaques d’opposants armées qui constituent des “tentatives pour détériorer la paix et la stabilité dans la région”, selon un journal d’État.
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