Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
Min Aung Hlaing a réaffirmé cette semaine sa détermination à combattre les forces d’opposition et à ne pas céder aux pressions exercées par la violence armée. De leur côté, les groupes rebelles ont intensifié leurs offensives dans plusieurs régions du pays. L’Armée pour l’indépendance Kachin (KIA) a pris le contrôle d’un bataillon de la police frontalière alliée au régime et mené une attaque contre un autre bataillon près de la ville frontalière de Kanpiketi. Parallèlement, la ville de Hsipaw, située dans le nord de l’État Shan, est tombée aux mains de l’Armée de libération nationale Ta’ang. Dans l’État Karen, l’Armée de libération nationale Karen (KNLA) a capturé le quartier général d’un bataillon d’artillerie.
L’organisation birmane Rohingya du Royaume-Uni (BROUK) a accusé l’Armée d’Arakan (AA) d’avoir menacé et agressé des civils rohingyas dans les villages d’Ah Twin Nget They et de Hpon Nyo Leik, situés dans la commune de Buthidaung, le 4 octobre. Elle a également affirmé que l’AA avait enlevé six civils d’autres villages rohingyas de la commune le 2 octobre. « Ces raids et les couvre-feux imposés représentent des violations flagrantes des droits humains fondamentaux et une escalade inquiétante d’une longue série de violences et de persécutions », a déclaré Tun Khin, président de la BROUK. « Les dirigeants de l’AA doivent être avertis que ces atrocités doivent cesser, sinon ils feront face à des conséquences, y compris des sanctions.
Min Aung Hlaing a affirmé cette semaine que la Birmanie est autosuffisante en ressources alimentaires et qu’elle ne craint pas les sanctions économiques occidentales. Cependant, cette déclaration est en contradiction avec le classement de la Birmanie parmi les « points chauds de la faim mondiale » par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
La Chine s’apprête à accueillir prochainement Min Aung Hlaing marquant potentiellement un tournant majeur dans la politique de Pékin à l’égard du régime. Cette visite pourrait également offrir au régime une reconnaissance internationale tant attendue, alors qu’elle fait face à une résistance armée généralisée. Prévue ce mois-ci, la visite est en cours de préparation, selon des sources bien informées. Il est possible que le Premier ministre chinois, Li Qiang, reçoive Min Aung Hlaing, les discussions portant notamment sur les élections que le régime birman prévoit d’organiser en 2025. Si elle se confirme, il s’agira du premier déplacement officiel du chef de la junte en Chine depuis le coup d’État de 2021.
Selon le rapport Freedom on the Net de Freedom House, la Birmanie figure parmi les pays au contrôle numérique le plus sévère, partageant la dernière place avec la Chine. Le rapport constate une diminution de la liberté d’Internet pour la 14e année consécutive à l’échelle mondiale, couvrant 72 pays. Depuis le coup d’État de 2021, le régime birman a renforcé la censure, limitant l’accès aux VPN et intensifiant la répression en ligne. Des milliers de dissidents ont été emprisonnés pour leurs publications.
Économie
La Banque asiatique de développement (ADB) a abaissé ses prévisions de croissance pour la Birmanie, annonçant un taux de 0,8 % en 2024, contre 1,2 % estimé en avril. Pour 2025, la croissance est révisée à 1,7 % (au lieu de 2,2 %). L’inflation, bien qu’en baisse, devrait atteindre 20,7 % en 2024, comparé aux 27 % de 2023, mais reste supérieure à l’estimation précédente de 15,5 %. En 2025, elle devrait se modérer à 15 %. L’ADB attribue cette dégradation à plusieurs facteurs : le conflit persistant, la détérioration de la gouvernance, la dépréciation monétaire et la chute des investissements. Les secteurs clés, comme la confection, sont particulièrement affectés par la hausse des coûts et les retards de livraison. Par ailleurs, l’augmentation de la pauvreté et des déplacements internes pèse lourdement sur les perspectives économiques du pays.
Au cours du premier semestre de l’exercice 2024-2025, débuté le 1er avril, 25 entreprises ont investi plus de 81,7 millions de dollars dans le secteur manufacturier en Birmanie, selon la Direction de l’investissement et de l’administration des entreprises (DICA). Les entreprises chinoises ont été les principaux contributeurs, avec un accent sur les industries à forte intensité de main-d’œuvre pour stimuler l’emploi local. Sur la même période, la Commission d’investissement a approuvé 30 projets étrangers issus de sept pays, pour un total de 223 millions de dollars, incluant l’apport de capitaux supplémentaires par des entreprises existantes. Le secteur des transports et communications a attiré 87,7 millions de dollars, suivi du manufacturier avec 81,2 millions, des services (44 millions), et de l’énergie (8,5 millions). Moins d’un million de dollars ont été investis dans l’agriculture. Singapour reste le principal investisseur étranger avec 87,74 millions de dollars, suivi de la Thaïlande et de la Chine.
Société/Répression/Conflit
Le régime birman poursuit ses efforts de mobilisation avec le début de la formation d’un sixième groupe de conscrits. Les nouvelles recrues ont rejoint les quartiers généraux régionaux de la région d’Ayeyarwady et de l’État de Mon. Depuis avril, la junte militaire organise ces sessions de formation dans le but de reconstituer ses forces armées. À ce jour, cinq groupes ont déjà été formés et déployés directement sur le front.
Le régime birman a annoncé le 13 octobre la prolongation du recensement national jusqu’au 31 octobre, initialement prévu du 1er au 15 octobre, afin de comptabiliser les personnes non recensées. Ce recensement constitue une étape clé en vue des élections prévues l’année prochaine. Toutefois, plusieurs obstacles ont entravé le processus, notamment la guerre civile, des inondations et la conscription forcée. Le régime n’a pas pu accéder à de nombreuses zones contrôlées par des groupes rebelles, compromettant ainsi l’exhaustivité des données. Les listes électorales qui en découleront risquent donc d’être inexactes.
Soe Win a survécu à une double attaque de drones armés de missiles dans la ville de Monywa, capitale de la région de Sagaing. L’attaque a été revendiquée par le groupe de résistance Daung Ta Mann, qui ciblait un hélicoptère chargé de sécuriser la visite d’un haut commandant de l’armée. Des explosions ont été entendues, et deux hélicoptères ont décollé après l’incident, mais les informations sur les dégâts ou les pertes restent inconnues. Le régime a annoncé que Soe Win avait rencontré les responsables régionaux nommés par la junte pour discuter de la stabilité et de la sécurité dans la région. Cette attaque intervient alors que les forces rebelles continuent de progresser sur le terrain, notamment avec la libération de la ville stratégique de Pinlebu dans la région de Sagaing.
Le ministère des Affaires étrangères du Gouvernement d’unité nationale (NUG) a fermement condamné l’attaque survenue vendredi contre le consulat chinois dans la municipalité de Chanmyathazi, à Mandalay. Un porte-parole du Parti démocrate de Mandalay a déclaré aux médias locaux que le groupe n’était pas impliqué dans l’incident. Le régime de Naypyidaw a annoncé l’ouverture d’une enquête sur l’explosion, précisant qu’aucune victime n’avait été signalée.
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