Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.
Politique, Diplomatie
Le régime birman a dépêché des émissaires en Chine pour consolider les relations bilatérales en amont de la visite à Pékin de Min Aung Hlaing. D’anciens officiers du renseignement militaire birman ont ainsi été chargés de rencontrer des think tanks chinois dans le but de préparer cette visite et de renforcer la coopération entre les deux pays. Ces anciens officiers, malgré leur discrétion, jouent un rôle central dans l’orientation de la politique birmane vis-à-vis de la Chine, en particulier sur les questions sensibles concernant les régions ethniques à forte tension. Leur présence à Pékin témoigne de l’importance stratégique que le régime accorde à ses relations avec la Chine.
Aung Myo Myint, Représentant permanent de la Birmanie auprès de l’ASEAN, a assisté au Forum de Jakarta sur les relations ASEAN-Chine, le 1er novembre 2024. Le Secrétaire général de l’ASEAN, l’Ambassadeur de Chine et le Représentant permanent de Malaisie ont prononcé leurs discours d’ouverture. Le Forum, sur le thème « Relier et créer des liens par la connectivité », marque l’Année 2024 comme l’Année ASEAN-Chine des échanges entre les peuples, et vise à promouvoir le rapprochement ASEAN-Chine et le développement inclusif au sein des États membres.
Le ministre de la Santé birman, Dr Thet Khaing Win, a accueilli le 31 octobre au ministère de la Santé, Mme Elena Ajmone Sessera, représentante résidente du Comité international de la Croix-Rouge (CICR). Lors de cette réunion, les participants ont abordé divers sujets relatifs à la coopération entre le ministère de la Santé et le CICR. Les discussions ont notamment porté sur les domaines de la santé, l’assistance technique pour les ateliers de fabrication et d’installation de prothèses, ainsi que le soutien aux centres de réhabilitation. L’accent a également été mis sur l’aide humanitaire et la poursuite des collaborations futures.
Économie
Depuis le début de l’année budgétaire en avril 2024 jusqu’à octobre, la Banque centrale birmane (CBM) aurait injecté 1 milliard USD sur le marché financier, ciblant les importateurs de carburant, d’huile de cuisson, de produits pharmaceutiques et d’équipements médicaux via les plateformes de trading. Le 5 décembre 2023, pour contrer l’instabilité du marché des changes et freiner la dévaluation rapide de la monnaie locale, la CBM avait autorisé les négociants agréés (banques privées) à réaliser des transactions de change en ligne, selon les taux du marché définis par l’offre et la demande. Cette mesure a permis de stabiliser le taux de change autour de 3500 MMK/USD sur cette plateforme bancaire, tandis que les marchés parallèles restent soumis à de fortes fluctuations. Le taux parallèle, ayant atteint un pic de 7500 MMK/USD en août, s’est depuis stabilisé autour de 4500 MMK/USD, en partie grâce aux injections de devises opérées par la CBM.
Le groupe Charoen Pokphand (CP), via Charoen Pokphand Produce (CPP) et Bangkok Produce (BKP), s’est associé à des partenaires birmans des secteurs public et privé pour lancer un système de traçabilité du maïs destiné à l’alimentation animale. Ce système, conçu pour être accessible aux producteurs, partenaires et organisations concernées tout au long de la chaîne d’approvisionnement, représente une avancée importante vers une production durable de maïs en Birmanie. Cette initiative s’inscrit dans le cadre de la stratégie thaïlandaise « Clear Sky », qui vise à lutter contre la pollution transfrontalière, notamment les particules fines PM2,5 issues des feux de forêt et des brûlis agricoles. Elle reflète l’engagement du secteur privé en faveur de la protection de l’environnement et doit contribuer à l’atteinte des Objectifs de développement durable (ODD) dans la région.
Le ministre de l’Électricité birman a participé à la 3e Conférence ministérielle de l’énergie « Belt and Road » à Qingdao, en Chine, les 23 et 24 octobre, avec pour objectif d’attirer des investissements dans le secteur énergétique du pays. La Birmanie traverse une crise énergétique aiguë qui s’est aggravée au cours des trois dernières années. Malgré les défis sécuritaires et les difficultés d’approvisionnement, le régime militaire poursuit ses efforts pour développer les énergies renouvelables et les projets hydroélectriques, en particulier en partenariat avec la Chine. Toutefois, ces initiatives se heurtent aux impacts des conflits sur les infrastructures énergétiques.
Société/Répression/Conflit
Le mercredi 30 octobre, environ 150 soldats du régime au pouvoir, accompagnés de milices, ont incendié les villages de Kyi Su et Kyauk Tai, situés dans la région de Sagaing, déjà ciblée par des attaques précédentes. Avant ces assauts, des drones ont largué des bombes, forçant les habitants à fuir précipitamment. Les soldats ont également pillé les villages et enlevé 31 civils, y compris plusieurs femmes.
L’Armée populaire de libération Bamar (BPLA) prévoit de redéployer ses troupes vers le centre de la Birmanie après avoir combattu aux côtés de groupes armés ethniques alliés dans les États de Karen et du Nord Shan. Le commandant Maung Saungkha a annoncé cette décision lors de la commémoration de l’anniversaire de l’opération 1027. Fondée deux mois après le coup d’État de 2021, la BPLA compte environ 1 200 soldats et projette d’étendre ses opérations militaires aux régions de Sagaing, Magwe et Mandalay. En tant qu’armée représentant l’ethnie Bamar, la BPLA a pour objectif de déloger les forces de la junte militaire de ces zones majoritairement peuplées de Bamar. Elle compte coopérer avec les Forces de défense du peuple (PDF) locales, fidèles au gouvernement d’unité nationale civile (NUG), ainsi qu’avec d’autres groupes de résistance.
L’Armée de l’Arakan (AA) et ses alliés ont mené des attaques d’envergure contre la ville d’Ann, située dans l’État de Rakhine en Birmanie, où est implanté le Commandement Ouest du régime militaire en place. L’AA a pris le contrôle de plusieurs sites stratégiques, parmi lesquels un hôpital militaire, des bataillons d’infanterie légère, d’artillerie et du génie, ainsi qu’un important dépôt d’armes. Le groupe s’est également emparé de l’aéroport d’Ann et des principales voies de communication reliant la ville au reste du pays, contraignant le régime à renforcer ses troupes et à organiser des approvisionnements par voie aérienne. Aux côtés de l’AA, des forces de résistance locales, dont l’Armée de la Force Étudiante et les Forces de défense du peuple, participent activement aux combats dans la région. La perte du Commandement Ouest représenterait un revers majeur pour le régime militaire birman.
Les Forces de défense du Chinland (CDF-Hakha) ont annoncé avoir neutralisé 15 soldats du régime et capturé quatre autres, dont un officier de grade major, lors de la prise de leur avant-poste de Kiamtlan, à 1,6 km de la ville de Hakha, dans l’État Chin. Cette attaque, menée lundi dans le cadre de l’opération Rung, a permis aux forces de la CDF de saisir neuf armes, plusieurs dizaines de chargeurs et des mines terrestres. En réponse, le régime a déployé deux colonnes de troupes pour encercler les combattants Chin : l’une provenant de Hakha, l’autre de la direction opposée. Depuis, les affrontements se poursuivent quotidiennement, notamment aux abords des avant-postes situés le long de la route Hakha-Thantlang. Le régime effectue également des frappes aériennes régulières, et des combats intenses se déroulent autour de Thantlang. Récemment, le régime a repris certaines bases capturées par les groupes de résistance Chin entre Hakha et Thantlang, mais la situation reste volatile. Selon la CDF-Hakha, environ 200 renforts du régime ont rejoint la ville de Thantlang.
Un raid aérien mené par le régime birman dans le canton de Chauk, situé dans la région de Magwe, a entraîné un massacre tragique. Au moins quatorze civils ont perdu la vie, et de nombreux autres ont été blessés lorsque des bombardiers ont pris pour cible un monastère où des réfugiés avaient trouvé refuge. Cette attaque s’inscrit dans une escalade des violences, alors que les affrontements se sont intensifiés entre les forces de résistance et les troupes du régime, qui ont envahi le canton et incendié plusieurs villages. La population locale a été contrainte de fuir massivement pour échapper aux violences grandissantes.
Nicholas Koumjian, chef du Mécanisme d’enquête indépendant pour la Birmanie (IIMM), a déclaré à l’Assemblée générale des Nations Unies que les crimes de guerre en Birmanie ont considérablement augmenté cette année. Il a rapporté que les frappes aériennes de l’armée birmane ont causé la mort de centaines de civils. « Récemment, l’IIMM a documenté des frappes sur un camp de personnes déplacées à Mandalay et dans l’État Karenni, ainsi que sur des marchés, des écoles, un temple dans l’État Shan, une réception de mariage à Sagaing, et plusieurs villages dans l’État de Rakhine », a-t-il indiqué. Il a également souligné l’augmentation des arrestations d’opposants. Nicolas Koumjian a ouvert de nouvelles enquêtes sur les violations des droits de l’homme dans les régions de Sagaing, Magway, Kachin et Shan. Il a alerté sur des cas de torture, de viol et de massacres, notamment contre les Rohingyas, lors des affrontements entre l’armée du régime et l’Armée d’Arakan (AA) dans l’État d’Arakan.
Tourisme
Le vice-ministre birman du tourisme, Phyo Zaw Soe, a exhorté les touristes russes à choisir la Birmanie, leur offrant une année supplémentaire d’exemption de visa. Malgré les conflits armés persistants dans plusieurs régions du pays et les avertissements de nombreux gouvernements concernant les voyages en Birmanie, le régime militaire s’efforce de relancer le secteur du tourisme. Pour ce faire, il met en place de nouvelles liaisons aériennes intérieures et sollicite l’intérêt des opérateurs touristiques russes.
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