Gavroche a sélectionné pour vous quelques nouvelles saillantes en Birmanie durant cette semaine écoulée. Un survol de l’actualité indispensable pour tous ceux qui s’intéressent à ce pays d’Asie du Sud-Est.

Politique, Diplomatie

L’ambassadeur de Birmanie en Chine, Tin Maung Swe, a été désigné « Personnalité exceptionnelle de l’année 2024 » par un prestigieux média chinois. Ce prix, décerné par un jury international, met traditionnellement à l’honneur les diplomates ayant joué un rôle clé dans le renforcement des relations bilatérales entre la Chine et leurs nations respectives. Dans le cas de Tin Maung Swe, c’est son engagement en faveur du Corridor économique Chine-Birmanie qui a été particulièrement salué. Ce projet stratégique, soutenu par le régime militaire birman, vise à consolider les liens économiques entre les deux pays en favorisant le développement des infrastructures et les échanges commerciaux.

Le régime militaire birman a publié un rapport préliminaire sur le recensement de la population mené en octobre, révélant qu’il n’a pu recenser que 145 des 330 townships du pays. Ces chiffres suggèrent que le régime ne contrôle actuellement que moins de la moitié du territoire national. Initialement prévu du 1er au 15 octobre, le recensement a été prolongé jusqu’à la deuxième semaine de décembre en raison des combats persistants à travers le pays. Il s’agit du premier recensement organisé sous le régime de Min Aung Hlaing et il est censé servir de base à la tenue des élections annoncées pour l’année prochaine. Cependant, les résultats partiels obtenus et la méthodologie employée suscitent de vives interrogations quant à la fiabilité des données et, par extension, à la crédibilité des élections projetées.

Le président par intérim du Gouvernement d’unité nationale (NUG), Duwa Lashi La, a annoncé des réformes pour 2025 visant à renforcer le leadership et améliorer les performances des ministères. Il a également invité des personnes qualifiées à rejoindre le gouvernement civil. Dans son discours de début d’année, il a reconnu que les défaillances du leadership et les dysfonctionnements ont causé des torts considérables à la population. Il a souligné les limites des Forces de défense du peuple, de l’Administration populaire et des Forces de sécurité du peuple. Duwa Lashi La a aussi lancé un appel aux membres du régime militaire, les incitant à rejoindre le camp du peuple et à cesser de protéger le régime de Min Aung Hlaing, responsable de violences contre les civils.

L’ambassadeur de Chine en Birmanie, Ma Jia, a rencontré séparément le ministre de l’Énergie, Ko Ko Lwin, et le ministre des Finances et de la Planification, Win Shein, à Naypyidaw les vendredi 3 et samedi 4 janvier. Les discussions ont porté sur le renforcement de la coopération dans les projets pétroliers et gaziers, qu’ils soient existants ou en cours de planification.Parmi les sujets abordés figuraient également les investissements chinois destinés à moderniser les raffineries de pétrole et les usines d’engrais, ainsi qu’à en construire de nouvelles. Les entretiens ont aussi couvert les projets de développement financés par des prêts chinois en Birmanie, selon des médias affiliés au régime militaire.

À l’occasion du 77e anniversaire de l’indépendance de la Birmanie, célébré le 4 janvier, le secrétaire d’État Antony J. Blinken a réaffirmé l’engagement des États-Unis envers le peuple birman. Dans une déclaration publiée le 3 janvier, il a souligné le soutien de son pays à la quête de démocratie, de stabilité, de prospérité économique et de respect des droits humains en Birmanie.M. Blinken a également exhorté le régime militaire à mettre fin aux violences, à libérer les détenus arbitrairement emprisonnés, à autoriser un accès humanitaire sans restriction et à permettre un retour vers une démocratie inclusive.

Économie

La Birmanie fait face à une crise énergétique qui s’aggrave rapidement. Moins de deux semaines après la création, par le régime militaire, de la Commission du développement de l’électricité et de l’énergie, censée « accélérer le développement du secteur énergétique », les coupures de courant ont doublé en durée. À Rangoun, capitale commerciale du pays, les interruptions d’électricité, auparavant limitées à quatre heures par jour, s’étendent désormais jusqu’à la nuit, réduisant l’alimentation électrique des zones résidentielles à environ 10 heures par jour. La population, déjà excédée par les perturbations majeures de la vie quotidienne dues à cette dégradation, a réagi avec incrédulité mercredi. Lors d’un discours prononcé à l’occasion du 150ᵉ anniversaire du chantier naval de Dala à Rangoun, Min Aung Hlaing a suscité la stupeur en appelant à investir dans la recherche sur les navires électriques, un projet perçu comme déconnecté des besoins urgents actuels.

Au cours des neuf premiers mois de l’exercice financier 2024-2025, la Birmanie a importé plus de 1,4 million de tonnes d’engrais, selon le Comité directeur d’achat et de distribution d’engrais à base d’urée. Le ministre de l’Union pour les coopératives et le développement rural, U Hla Moe, a annoncé que le comité continuerait d’évaluer les besoins et de recommander les importations d’engrais et de pesticides restants. L’Association des entrepreneurs en engrais, semences et pesticides de Birmanie (MFSPEA) suivra les entreprises pour garantir qu’elles respectent les volumes d’importation fixés. Les permis d’importation seront attribués uniquement aux entreprises capables de satisfaire ces volumes. Le comité directeur annonce surveiller également les prix des engrais dans les différentes régions du pays pour éviter les surfacturations et les manipulations de marché.

La Banque centrale de Birmanie (CBM) a annoncé avoir procédé à de nouvelles injections de liquidités sur le marché des changes, avec plus de 510 000 yuans injectés le 3 janvier, après des ventes de 25 millions de dollars. Le 2 janvier, la CBM avait déjà injecté plus de 670 000 yuans et 2,45 millions de bahts. En décembre 2024, ces interventions ont totalisé 144 millions de dollars, 321 millions de bahts et plus de 12 millions de yuans, dans un objectif de lutter contre l’instabilité monétaire et la dévaluation de la kyat. La CBM a précisé qu’elle poursuivait ses efforts en prenant des mesures strictes, en coopération avec les forces de l’ordre, pour sanctionner ceux tentant de manipuler le marché des changes. Depuis le 5 décembre 2023, elle autorise les courtiers agréés à réaliser des transactions de change en ligne, selon le taux déterminé par l’offre et la demande.

Société/Répression/Conflit

En 2024, plus de 750 enfants ont perdu la vie lors des frappes aériennes du régime militaire en Birmanie, selon le rapport annuel de l’UNICEF. La guerre civile en cours exacerbe une crise humanitaire majeure, avec environ 6 millions d’enfants nécessitant une aide d’urgence. L’accès aux services essentiels est gravement compromis : plus d’un million d’enfants n’ont pas reçu les vaccins vitaux contre la polio, et plus de 5 millions sont privés d’éducation. L’UNICEF appelle à une action urgente pour répondre à leurs besoins vitaux et garantir leur protection.

Les Nations Unies soupçonnent la Thaïlande de faciliter l’acquisition d’armes par le régime militaire birman. Un rapport de l’ONU révèle que des banques thaïlandaises auraient servi de canal pour le transfert de fonds destinés à l’achat de matériel militaire, permettant ainsi à la junte de poursuivre ses opérations militaires et de réprimer violemment la population civile. En réponse à ces accusations, les autorités thaïlandaises ont ouvert une enquête, mais affirment n’avoir trouvé aucune preuve directe établissant un lien entre les transactions financières identifiées et l’achat d’armes par le régime birman. Tout en niant toute implication directe, la Thaïlande a reconnu la nécessité de renforcer ses mécanismes de contrôle pour empêcher l’utilisation de son système financier à des fins illicites.

L’avenir de l’offensive en cours menée par l’Armée d’Arakan (AA) dans l’État de Rakhine dépendra de la réponse du régime militaire birman, a déclaré Khaing Thukha, porte-parole de l’organisation ethnique armée. Dimanche, l’AA a exprimé sa volonté de privilégier une résolution politique au conflit interne, plutôt que de poursuivre les hostilités militaires. Cette annonce survient alors que l’AA a pris le contrôle total de Gwa, la ville la plus méridionale de l’État de Rakhine. Désormais, l’organisation contrôle 14 des 17 townships de cette région occidentale, seulement 13 mois après le début de son offensive. En consolidant son emprise sur l’État de Rakhine, l’AA dispose désormais d’un levier stratégique majeur. Elle contrôle une grande partie des projets chinois dans la région, notamment les pipelines de pétrole et de gaz naturel, ainsi que l’accès crucial à l’océan Indien depuis la province du Yunnan en Chine.

Le média Irrawaddy s’est récemment rendu à Lashio, six mois après que la capitale du nord de l’État Shan soit tombée aux mains de l’Armée de l’alliance démocratique nationale du Myanmar (MNDAA) en août dernier. Depuis lors, de nombreux habitants sont revenus, et environ 70 % de la ville a retrouvé une certaine normalité, suite à l’arrêt des frappes aériennes quotidiennes du régime, après une médiation du gouvernement chinois. La MNDAA a établi une administration locale à Lashio et gère désormais plusieurs hôpitaux publics, en collaboration avec des professionnels de la santé ayant rejoint le Mouvement de désobéissance civile après le coup d’État de 2021. Toutefois, la réouverture des écoles reste un défi. La MNDAA et le régime militaire, sous l’égide de la Chine, devraient entamer des pourparlers le 15 janvier.

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