La dirigeante birmane, Prix Nobel de la paix 1991, a finalement commenté cette semaine la condamnation à sept ans de prison des deux journalistes de l’agence d’information Reuters, accusés d’avoir enquêté sur un massacre de Rohingyas par l’armée. Pour celle qui fut pendant des années l’égérie des droits de l’homme en Asie du sud-est, la justice birmane a fait son travail, car les deux reporters ont «enfreint la loi». Une déclaration qui intervient à quelques jours de la publication, le 18 septembre, de l’intégralité du rapport de l’ONU sur les massacres en question.
« Ils n’ont pas été emprisonnés parce que c’étaient des journalistes » mais parce que « le tribunal a décidé qu’ils avaient enfreint » la loi (..) Si nous croyons en l’État de droit, ils ont tout à fait le droit de faire appel du jugement ». Ainsi s’est exprimée la dirigeante Birmane Aung San Suu Kyi à propos de la condamnation le 4 septembre à sept ans de prison de deux journalistes de l’agence internationale d’information Reuters.
L’ex opposante aux militaires birmans, assignée à résidence à Yangon pendant plus d’une décennie et plusieurs fois emprisonnée elle-même, s’est exprimée lors du sommet régional du Forum économique mondial de Davos, organisé à Hanoï (Vietnam). Le quotidien français Le Monde relate son intervention dans son édition du 13 septembre: «Campant sur sa ligne de défense, Aung San Suu Kyi s’est aussi montrée imperméable aux accusations contre l’armée birmane venues de l’ONU, qui a parlé fin août de « génocide » de la minorité musulmane des Rohingya. Tout juste a-t-elle concédé que les militaires auraient pu « mieux gérer » la crise, qui a conduit à l’exode au Bangladesh de 700 000 personnes depuis l’été 2017».
Le procès des journalistes de Reuters a déclenché une levée de boucliers des organisations de défense des droits de l’homme et de la presse à travers le monde. Il est révélateur de la réalité du pouvoir en Birmanie, où l’armée continue de régner presque en maître, et où la question des Rohingyas est considérée comme annexe, voire marginale par la grande majorité de la population qui perçoit ces musulmans de la région de l’Arakan comme des immigrés du Bangladesh. La question pourrait toutefois accoucher d’une crise politique majeure en Birmanie, avec la mise en cause par la mission d’enquête de l’ONU de plusieurs généraux de l’armée Birmane. La publication intégrale de ce rapport est attendue le 18 septembre et la Cour Pénale Internationale de La Haye s’est déclarée compétente pour entamer sur cette base des poursuites.
Selon le Monde, un début de déblocage est en train d’avoir lieu. «Après des mois de blocage par le gouvernement birman, des fonctionnaires de l’ONU ont commencé mercredi une mission en Birmanie afin d’évaluer les conditions d’un éventuel retour des centaines de milliers de Rohingya qui ont fui le pays» explique le quotidien français (…) Aung San Suu Kyi est directement visée par le rapport des experts de l’ONU, qui déplore qu’elle n’ait pas utilisé son « autorité morale » pour tenter de faire cesser les atrocités». 700 000 déplacés Rohingyas ont fui la Birmanie depuis un an pour s’amasser dans d’immenses camps sur la bande côtière qui longe la frontière, coté Bangladesh.
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