Le quotidien helvétique Le Temps, dont nous vous recommandons la lecture, publie ce mardi 2 février un entretien avec l’envoyée spéciale des Nations unies pour la Birmanie, la diplomate suisse Christine Schraner-Burgener. Celle ci a suivi de très près les événements qui ont mené au coup d’État militaire de lundi. L’intégralité de l’entretien réalisé par Stéphane Bussard est disponible sur www.letemps.ch
Le Temps: Y avait-il des signaux précurseurs d’un tel coup d’État ou est-ce que cela a été une grande surprise pour vous?
Christine Schraner-Burgener: Ça n’a pas été une très grande surprise. L’armée avait déjà soumis trois conditions au gouvernement. A la tête de ce dernier, Aung San Suu Kyi les a toutes refusées. La semaine dernière, le commandant en chef de l’armée (le général Min Aung Hlaing) avait averti que les militaires prendraient le pouvoir si les conditions n’étaient pas remplies. Pourtant, vendredi et samedi, de nombreuses discussions ont eu lieu entre le gouvernement et l’armée. J’étais un peu rassurée. Même dimanche matin, j’ai eu des échanges par courriel avec des militaires. Le dialogue semblait normal.
Avez-vous pu contacter Aung San Suu Kyi et les membres de son gouvernement?
Les ministres et Aung San Suu Kyi ont été immédiatement mis en résidence surveillée. J’ai essayé de les contacter tout de suite à Naypyidaw, mais c’était impossible. L’armée avait coupé l’internet. J’ai pu atteindre en revanche des gens à Yangon. Ils étaient tous très nerveux. J’ai essayé en vain de contacter l’armée qui a diffusé deux déclarations. Dans la première, elle affirme qu’il y a eu des irrégularités dans l’élection [qui a permis à la Ligue nationale pour la démocratie (LND), le parti d’Aung San Suu Kyi, de remporter 83% des suffrages, ndlr], qu’il faudra réformer la Commission électorale et de nouvelles élections. On peut se demander pourquoi l’armée procède à un coup d’État si elle veut redonner le pouvoir au LND dans un an? Il y a manifestement un risque que ces nouvelles élections soient manipulées.
Que disait la seconde déclaration de l’armée?
Elle impose l’État d’urgence pendant un an et donne les pleins pouvoirs au chef de l’armée (le général Min Aung Hlaing) qui contrôle les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Celui-ci a nommé 11 ministres de l’armée. C’est un gouvernement totalement contrôlé par les militaires. Je vais maintenir toutefois le contact avec l’armée afin de tenter de faire libérer les gens qui ont été arrêtés. (…)
Je connais très bien Aung San Su Kyi. Au cours des trois dernières années, je lui ai parlé plus d’une douzaine de fois. Elle est toujours restée très ouverte. Mais elle a réalisé très tôt la difficulté de gouverner. Elle avait toujours peur d’un coup d’État si elle et son gouvernement souhaitaient apporter de grands changements à la Constitution, aller vers un système fédéral. L’armée occupe 25% des sièges du parlement. Pour changer la Constitution élaborée par les militaires en 2008, il faut 75% des voix des parlementaires. L’armée a toujours un pouvoir de veto pour ainsi dire afin que rien ne change.
L’intégralité de l’entretien est à lire sur le site www.letemps.ch