Les birmans hostiles au coup d’État militaire du 1er février tapent désormais tous les soirs sur leurs casseroles, notamment à Yangon, pour «chasser les démons». Il s’agit bien sûr cette fois de protester contre la prise du pouvoir par l’armée birmane, la Tatmadaw. Mais derrière les généraux se cachent d’autres relais de pouvoir: notamment celui des moines bouddhistes ultra-nationalistes. En voici un exemple, à travers les extraits de ce reportage publié par Géo.
Nous publions ici des extraits d’un reportage du magazine Géo dont nous vous recommandons la lecture
Le moine Ashin Wirathu est le plus influent des prêcheurs de haine en Birmanie. Une haine anti-Rohingya et plus largement islamophobe, loin des idéaux de non-violence et de tolérance attachés au bouddhisme. Un mandat d’arrêt a été émis contre lui en 2017.
Son petit sourire
Dans sa robe safran, face caméra, Ashin Wirathu ne se départit jamais de son petit sourire satisfait, même pour dire les pires atrocités. Barbet Schroeder le laisse déblatérer. Les musulmans ? “Comme les poissons-chats en Afrique, ils se reproduisent très vite et se mangent entre eux.” Le bouddhisme ? “Une armée dont naissent des combattants. Il doit agir comme un rempart contre l’islam.” Les Rohingya (minorité musulmane apatride persécutée en Birmanie depuis des décennies) ? “Il n’y a jamais eu d’ethnie rohingya dans l’histoire. Aussi, on le sait, c’est pour obtenir de l’aide internationale qu’ils brûlent leurs maisons.”
Images d’archives, images amateurs, entretiens, rapports et cartes à l’appui, Barbet Schroeder illustre et décortique avec finesse l’engrenage du mal : incitation à la haine et à la “protection de la race”, propagande, culte de la personnalité… Une mécanique sidérante qui, en Birmanie, conduit aux persécutions dont sont victimes les minorités musulmanes, à commencer par les Rohingya. Glaçant (il est d’ailleurs interdit aux moins de 12 ans), le documentaire n’en est pas moins captivant.
Mégaphone au poing
Mégaphone au poing, le moine Sujana s’adresse aux membres de Ma Ba Tha, le Comité pour la protection de la race et de la religion, à Bagan, haut lieu du bouddhisme birman. Chacune des apparitions publiques de Wirathu fait l’objet d’une mise en scène très éloignée de l’exigence ascétique de la religion. Ce jour-là, un drone sillonne même le ciel pour immortaliser l’événement – bourdonnement incongru dans la quiétude de ce lieu sacré. Pourtant, la consigne est de rester discret. C’est au terme de longues tractations que les portes du temple, fermées au public en attendant les travaux de rénovation, se sont ouvertes pour Wirathu et ses supporters.
Synonyme, aux yeux du monde, de paix et de tolérance, le bouddhisme n’échappe pas à une dérive fondamentaliste qui s’est développée sur la base d’un rejet violent d’une autre religion : l’islam. En Birmanie, au Sri Lanka, en Thaïlande ou en Inde, certains moines incitent à la violence envers les musulmans, vandalisent leurs commerces et brûlent les mosquées. Une hostilité dont les racines plongent dans un lointain passé : “La destruction des grands centres bouddhistes par les musulmans aux XIIe et XIIIe siècles a été vécue comme un traumatisme historique qui a forcément laissé des traces”, estime Sofia Stril-Rever, indianiste et biographe française du Dalaï-lama (avec lequel elle a cosigné l’ouvrage Nouvelle réalité, éd. des Arènes, 2016).
Le reste est à lire ici sur le site de Géo.