La très informée lettre Intelligence Online révèle que la tension monte entre Paris et Phnom Penh après le meurtre du député franco cambodgien le 7 janvier. Nous publions un extrait de son article et vous recommandons de vous abonner à cette source très précieuse.
Anne-Marie Lim, la veuve de Lim Kimya, Franco-Cambodgien qui a travaillé pour le ministère français de l’économie et ancien député d’opposition du Parti du sauvetage national cambodgien (CNRP) de 2013 à 2017, assassiné à Bangkok le 7 janvier, attend avec fébrilité les conclusions de l’enquête préliminaire conduite en France sur la mort de son mari. Elle a été reçue à son retour à Paris par la brigade criminelle de la Direction régionale de la police judiciaire, qui pilote les investigations en cours.
L’enjeu porte à terme sur l’accès au dossier de l’enquête par la famille de la victime. Un mois après les faits, celle-ci envisage de politiser l’affaire, en s’adressant à des représentants politiques s’intéressant au Cambodge ou aux enjeux de répression transnationale.
L’enquête et ses angles morts
Le travail des policiers thaïlandais se poursuit, suivi de près par l’attachée de sécurité intérieure Virginie Font, basée à l’ambassade de France à Bangkok. C’est elle qui a reçu et accompagné Anne-Marie Lim après l’assassinat de son mari. L’ambassade doit être informée prochainement des dernières évolutions par ses interlocuteurs thaïlandais. Le tireur ayant été arrêté, la question est celle du ou des commanditaires.
Des zones d’ombre subsistent, en particulier quant à la marge de manœuvre laissée par la Thaïlande sur son territoire en matière de répression transnationale. Après l’assassinat de son mari, Anne-Marie Lim s’est vu poser quatre fois la même question par le commissaire thaïlandais responsable de l’enquête : il cherchait à savoir si elle et son mari rejoignaient ou non les opposants cambodgiens résidant à Bangkok.
« Rapatriement mort ou vif »
Sam Rainsy, le président du CNRP, Franco-Cambodgien qui vit aujourd’hui en exil, a publié sur son site internet le 28 janvier des photographies et une biographie de Khliang Huot, le gouverneur général adjoint de Phnom Penh. Il mettait ainsi en avant son rôle de missi dominici de l’ancien premier ministre cambodgien Hun Sen – qui reste président du Sénat et chef du Parti du peuple cambodgien (PPC), en plus d’être le père de l’actuel premier ministre Hun Manet – auprès de Thaksin Shinawatra, homme d’affaires et ex-premier ministre thaïlandais.
La France a condamné sans équivoque le meurtre, à travers la déclaration du porte-parole du Quai d’Orsay le 9 janvier. Les diplomates prennent très au sérieux l’affaire, mais celle-ci embarrasse considérablement, d’autant qu’elle intervient après une année 2024 riche en signes de rapprochement entre Paris et Phnom Penh, aussi bien sur la guerre en Ukraine qu’en termes économiques.
Or depuis le 7 janvier, la gêne domine, côté français.
L’enquête, et la médiatisation qui en est faite, est susceptible de mettre à mal les échéances bilatérales. Le roi du Cambodge Norodom Sihamoni prévoit par exemple une visite en France, où il a longtemps vécu, au cours de l’année 2025. À Paris, il est courtisé par l’Académie des sciences d’outre-mer, qui le verrait bien rejoindre ses rangs.
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