L’opposant numéro un à l’actuel pouvoir cambodgien a annoncé le 8 septembre son intention de retourner au Cambodge où il est la cible de poursuites judiciaires. Ce retour, qu’il justifie dans le texte ci-dessous, est fixé au 9 novembre et relance son bras de fer politique et personnel avec le premier ministre Hun Sen. Que peut faire Sam Rainsy face au rouleau compresseur du parti au pouvoir ? Que peut-il obtenir alors que son partenaire de l’opposition Kem Sokha demeure en résidence surveillée ? Les prochaines semaines nous apporteront un début de réponse.
Nous reproduisons ici une tribune de Sam Rainsy adressée à Gavroche
L’exil fait depuis longtemps partie de ma vie. Même si c’est douloureux, le risque de mort violente pèse sur les chefs de l’opposition cambodgienne.
J’ai décidé de rentrer dans mon pays cette année malgré le grand nombre de condamnations légales et de mandats d’arrêt lancés contre moi. Mes 25 années de lutte pour un régime anti-autoritaire dirigé par d’anciens membres des Khmers rouges ont donné lieu à plusieurs assassinats et à une persécution politique et judiciaire continue à mon encontre. Mais je suis lié par mon histoire: les premières publications de l’opposition, les premières manifestations populaires pour la liberté et la justice sociale, l’organisation des premières grèves industrielles et la création du premier parti d’opposition parlementaire…
J’ai choisi le 9 novembre comme date de retour. Il s’agit à la fois de la fête de l’indépendance du Cambodge et du mur de Berlin, événement marquant le rétablissement de la liberté aux yeux du monde. Depuis 2017, le Cambodge est plongé dans une grave crise politique, que l’influence croissante de la Chine risque d’aggraver avec des conséquences internationales.
Tendance au totalitarisme
La tendance au totalitarisme s’est poursuivie avec la dissolution arbitraire du seul parti d’opposition parlementaire, le CNRP, l’arrestation et la détention continue de son chef Kem Sokha et la répression sévère des opposants politiques, de la société civile et des médias indépendants. Cette tendance à l’autoritarisme a été condamnée par les Nations Unies, la communauté des nations démocratiques et les organisations internationales de défense des droits de l’homme.
Le retour soudain à un système de parti unique à la suite de la dissolution du CNRP et des accords de paix français de 1991. J’ai décidé d’essayer d’arrêter cette étreinte de l’autoritarisme. Mais pour tenter de rétablir la démocratie face à un pouvoir aveugle qui nie l’existence même, je n’ai qu’un seul levier: un appel direct à la population pour qu’elle utilise le «pouvoir populaire» comme jadis aux Philippines en 1986. Le peuple cambodgien doit s’engager massivement et pacifiquement vers un changement démocratique.
Je demande à tous les amis du Cambodge, et notamment aux pays signataires des accords de paix de Paris (1), de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour dissuader le régime de Phnom Penh de recourir à la violence contre une population par un traité international qui reste en vigueur.
Sam Rainsy
Cofondateur et président par intérim du CNRP