Chaque semaine, notre ami Richard Werly, conseiller éditorial de la rédaction de Gavroche, partage sa vision de la France sur le site d’actualités helvétique Blick. Vous pouvez vous abonner ou consulter sa lettre d’information Republick.
En voici l’éditorial. L’intégralité de la newsletter disponible ici.
Michel Barnier se targue toujours d’être un « montagnard ». Mais il ne suffit pas de bons appuis pour gravir des pentes devenues trop glissantes. Il faut aussi pouvoir se fier à sa cordée, et être sûr qu’elle ne va pas céder au premier vent contraire. Or cette fois, le bon skieur et alpiniste qu’est Barnier, chef du gouvernement français depuis le 5 septembre 2024, aurait mieux fait de vérifier son matériel avant d’escalader Matignon par la face Macron. Sauf énorme surprise, les 48 heures prochaines devraient en effet être celles d’une avalanche en forme de motion de censure qui emportera tout sur son passage. Lui comme premier ministre. L’ensemble de son gouvernement. Et les dernières illusions sur la possibilité de gouverner la France au centre. Avec comme cordes de rappel, le pragmatisme, l’arrimage européen et le sens de l’État face aux périls extérieurs ou financiers.
Marine Le Pen était, depuis l’automne, la passagère clandestine de la cordée Barnier. C’est vers elle que s’était discrètement tourné ce premier ministre de droite, depuis trop longtemps éloigné de la politique domestique. Mauvais casting alpin. La candidate déjà déclarée à la prochaine présidentielle (après celles de 2012, 2017 et 2022) n’a pas supporté d’être la dernière de cordée. Pas question pour elle, menacée d’inéligibilité par les juges qui statueront le 31 mars, d’éviter à ses adversaires de tomber dans les crevasses qu’ils ont eux-mêmes creusées.
Le savoyard Michel Barnier aurait dû se méfier. Chez les Le Pen, famille bretonne de la Trinité sur Mer, les bourrasques ont la fâcheuse habitude de finir en tempêtes. Surtout quand le ciel politique français est uniformément gris.
Bonne lecture, d’autant que la montagne est belle !
(Pour débattre: richard.werly@ringier.ch)
Chaque semaine, recevez Gavroche Hebdo. Inscrivez vous en cliquant ici.
L’opinion publique crédite M. Barnier d’immenses talents de “négociateur”. Son expérience gouvernementale n’a pas contribué à accréditer ce qui apparait désormais comme une légende. Fort de sa superbe et de sa morgue il a su s’attirer les hostilités et les haines recuites et congelées. D’abord celles de son prédécesseur qui n’a pas apprécié d’être morigéné et publiquement et qui s’est ingénié à lui savonner les planches de son cercueil. Mais aussi de M. Le Pen qu’il a tenu à distance par ses postures dédaigneuses si policées alors qu’elle tenait la corde d’un pendu en sursis. Une dernière de cordée à moins que ce ne fût la première… Une reconnaissance minimum mais trop tardivement concédée et exprimée et contrariée par un réquisitoire potentiellement mortel pour sa candidature future ont fait le reste. Quitte à signer une motion de censure dont le texte élucubré par le chef du parti antisémite la couvre, paradoxalement, d’opprobre.
Il reste au Président, faute d’obtenir un asile à Djeddah, comme ce fût naguère le cas pour Ben Ali, de s’empresser de nommer un successeur à Matignon faute de hâter un enterrement de première classe dont l’imminence ne cesse d’enfler. Doué d’un sens insurpassable de l’humour et bien conseillé par une épouse aux petits soins, deux suggestions possibles : soit nommer M. Barnier et redécouvrir une variante du mouvement perpétuel ; Soit nommer, en cette période Noël, M. Sapin. Dans les deux cas les obsèques ne manqueraient pas de suivre et dans le deuxième cas, le choix aurait été particulièrement judicieux. Il importerait, pour cette option, de prévoir un caveau à deux places, le titulaire de l’Élysée pourrait suivre. Ce sont, semble t-il les vœux mortifères de ceux qui, au delà des anathèmes, vont joindre leur sang au bas de la motion de censure, ce pacte faustien…