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GAVROCHE HEBDO – ÉDITORIAL : Alain Delon et Thaksin Shinawatra, deux « Guépards »

Date de publication : 20/08/2024
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Vous connaissez bien sûr la fameuse réplique de Tancrède Falconeri, l’aristocrate sicilien joué par Alain Delon dans « Le Guépard », de Luchino Visconti (1963). « Il faut que tout change pour que rien ne change » lâche Delon, au sommet de sa diabolique beauté, devant le prince Fabrizio Salina incarné par Burt Lancaster. Claudia Cardinale les regarde. Pas étonnant que ce dimanche, jour de la disparition du plus célèbre acteur français, cette dernière a choisi de faire référence au film . « Le bal est fini. Tancredi s’en est allé danser avec les étoiles… » a-t-elle déclaré.

 

Thaksin Shinawatra est le prince Salina, en version Thaïlandaise. Et sa fille Paetongtarn pourrait être Tancrède au Royaume de Siam. L’ex premier ministre et milliardaire a voulu tout changer. Il a tout bousculé. Il a connu l’exil. Puis il est revenu. Et le revoici au pouvoir via sa fille, avec, en plus, le bénéfice d’une grâce royale. Il doit encore comparaitre le 19 aout pour répondre du délit de lèse majesté. Mais le clan familial a donc fini par reprendre repris les rênes du gouvernement.

 

« Il faut que tout change pour que rien ne change » : ce pourrait être, au fond, une devise pour le Royaume. Alain Delon, dont la marque inondait jadis les centres commerciaux asiatiques, pourrait y ajouter une autre de ses répliques fameuses, dans « Mort d’un pourri » (Lautner, 1977) : « Je serai démissionné, deux ou trois guignols politiques sauteront, vous irez en prison… Mais ça ne changera fondamentalement rien ».

 

Bonne lecture !

2 Commentaires

  1. Le Prince Salina, Don Fabrizzio, est un représentant de l’aristocratie, une haute figure de la haute noblesse siciliènne. Le roman de Giuseppe Tomasi de Lampedusa, Le Guépard, (Il gattopardo) en décrit sa décadence. Le contexte historique, à partir de 1860, est l’unification lente de l’Italie. L’épisode se déroule en Sicile alors que les troupes de Garibaldi, “les milles” appuyées par Napoléon III viennent de débarquer. La Sicile se trouve, à la fin du XIX ème siècle entre les temps anciens et modernes…

    Le Prince Salina, n’arrive pas à s’adapter à la vie bourgeoise ordinaire ; on peut même dire qu’il est inapte à la vie (comme l’Oblomov de Gontcharov). Il est impropre à toute évolution ce qui n’est pas le cas d’une partie le l’aristocratie sicilienne qui s’est liée à la bourgeoisie montante.
    Le roman décrit à l’intérieur de l’intimité d’une famille, l’opposition entre l’ancien régime et le nouveau qui fait irruption. Comment une famille de haute noblesse réagit-elle face à ces bouleversements. C’est le sujet du Guépard ; Le remplacement des guépards, des lions par des chacals, des hyènes.

    Le personnage de Tancrède, l’énigmatique neveu, joue le rôle de catalyseur des évènements en somme révolutionnaires. Tancrède, la génération d’avant, rejoint le camp des modernes et surtout, entre les mains de Sédara et sous son charme, la femme aimée, celui de la bourgeoisie, aussi riche et plus puissante que le prince. Un conflit entre deux fortunes mais deux sources de la fortune et du pouvoir.

    L’auteur du Guépard met en scène le conflit entre deux classes, l’une aristocratique et en voie de disparition comme le Prince lui-même et une bourgeoisie en voie d’ascension si ce n’est dominante dont les valeurs sont à l’opposé. Le roman est essentiellement le récit d’une lente substitution de classes. Une saga en somme de type marxiste (ce sera l’approche de L. Aragon dans les lettres françaises dans le numéro 17-23 décembre 1959 et du 18 février 1960) qui, pour cette raison fascinera Visconti, aristocrate lui-même et “compagnon de route” et qui en fera fera un film quasi didactique.

    Contrairement à la phrase iconique reprise à satiété, mais visiblement incomprise faute d’avoir lu le livre, le changement se fait aussi dans la personne du Prince ; rien ne reste identique. Dans l’entretien avec le jésuite Pironne il confesse : “… nous ne sommes pas aveugles, mon Cher Père. nous ne sommes que des hommes. Nous vivons dans une réalité mobile à laquelle nous cherchons à nous adapter comme les algues se courbent sous la poussée de la mer. L’immortalité a été promise à la Sainte Église ; à nous, en tant que classe sociale, non. Pour nous, un palliatif qui permet de durer cent ans équivaut à l’éternité. Nous pouvons tout au plus nous faire du souci pour nos enfants, peut-être nos petits-enfants ; mais au delà de ce que nous pouvons espérer caresser avec ces mains ci, nous n’avons pas d’obligations ; et moi, je ne peux me préoccuper de ce que seront mes descendants éventuels en 1960”.

    Le roman nie la phrase de Tancrède ; les Salina vont disparaitre. Un roman pessimiste si ce n’est désespéré qui ne laisse aucun espoir si ce n’est une certaine nostalgie, celle d’un temps englouti…

    L’avènement du fascisme et les affrontements violents qu’il a suscité, la place à accorder à la résistance, pourra, pour certains, donner au Guépard une coloration défaitiste voire réactionnaire. Il sera vilement critiqué et fera l’objet de polémiques à la libération.

    Sylvie Servoise : “Politiques du temps : le Guépard de Lampédusa dans l’histoire”, Presses Universitaires de Rennes, 2018, 182 pages.

    PS : Les rapprochements faits dans votre papier ne sont pas éclairants ; Les deux personnages cités appartiennent aux mêmes classes sociales. Nous serions, ici, dans la continuation d’un ordre déjà installé, celui de la deuxième génération, une génération post-Tancrède. Les représentantes de ces classes se sont alliés, déjà depuis longtemps, à une “aristocratie” ayant embrassé les “valeurs” bourgeoises et dont la pouvoir ne repose plus sur la fortune agraire.

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