Regardons les choses en face. La décision de l’Indonésie de maintenir son invitation adressée à Vladimir Poutine pour le sommet du G20 à Bali les 15 et 16 novembre est tout, sauf une anomalie. Le plus grand pays musulman du monde a toujours, depuis la conférence de Bandung dans les années 50, été le chantre du non alignement. Sa dépendance énergétique, dans un contexte économique dégradé par la Covid, explique aussi cela. Élu démocratiquement, le Chef de l’État Indonésien Joko Widodo a choisi la solution la moins embarrassante pour son pays. Il sait que les occidentaux, même énervés, ne lui en tiendront pas grief. Alors qu’un camouflet à la Russie aurait pu avoir des conséquences.
La réalité est qu’en Asie, le blocus anti-Poutine ne fait pas recette. C’est un fait. Le conflit ukrainien est trop loin, et il apparait trop régional pour mobiliser les gouvernements et les opinions publiques en Extrême Orient. Mais il y a autre chose: le défi adressé par Moscou à l’occident, dans cette région de plus en plus dominée par la Chine, est perçu comme logique. N’oublions pas que le souvenir des guerres menées par les Etats-Unis, en particulier celle du Vietnam, ne sont pas dissipés dans cette partie du monde qui est aussi le poumon économique de la planète. Oui, le Poutinisme y fait recette. Car il incarne, coûte que coûte, cette défense des intérêts nationaux qui reste la règle de ce coté ci de la planète. Les abstentions à l’ONU sont un paravent. A l’exception des alliés les plus fidèles des Etats-Unis, l’Asie n’estime pas nécessaire de sanctionner le maître du Kremlin. Bien au contraire.
Cet éditorial est parfaitement juste et clairvoyant. J’ajouterai que la Chine est une civilisation cinq fois millénaire, et la Russie, héritière de la civilisation romano-byzantine, deux fois millénaire. En revanche, la “culture du contrat” et “l’économie de marche” ne saurait tenir lieu de civilisation. L’issue de ce conflit ne fait pas de doute; les conséquences en seront “incalculables”.